« La Corse est depuis Paoli, une terre de liberté de culte. Mais elle n’acceptera ni communautarisme, ni intégrisme ». Gilles Simeoni. Juillet 2016.
« Des musulmans qui affirment leur compassion avec l’église catholique à Portivechju. Une marche blanche à Bastia pour dénoncer « les crimes, de Kaboul à Saint Étienne du Rouvray », et « donner sens et force à la Communauté de Destin. ». Les initiatives ne manquent pas pour démontrer, face à la sauvagerie sanglante de l’Etat Islamique, qu’ici aussi, des voix s’élèvent pour la dénoncer. La Corse n’est peut être pas non plus à l’abri de ces ténébreux agissements … Pour autant ces voix, dont l’intérêt philosophique et spirituel est à souligner, s’expriment dans un cadre hautement particulier. Celui du Peuple Corse colonisé …
On ne refera pas l’analyse détaillée de tout ce qui a pu être dit : il n’y a pas de place en Corse pour le fanatisme islamiste. Pas plus qu’il n’y a de place pour ces pseudo prêcheurs qui instrumentalisent la religion contre les valeurs du Peuple Corse. La résolution – très importante – prise par la Collectivité Territoriale de Corse d’une part, la pertinente communication du « F.L.N.C. 22 octobre » d’autre part, en attestent.
Il est surement mieux de tenter d’analyser ces manifestations qui ici et là, sur notre territoire, revendiquent à l’instar de Michel Stefani ( élu territorial du P.C.F ), « la fraternité et la solidarité entre les hommes ». Mais cet affichage de la concorde, que nous pourrions faire nôtre, qui pour l’occasion fait très souvent référence à la notion de Peuple Corse, participle-t-il vraiment à l’affirmation de ce dernier et de ses droits sur sa propre terre ?
Sauf à réviser l’histoire – ce que le systęme dominant a tenté sans succés de faire – la Corse est bel et bien une des « dernières » colonies de l’Etat français. Son peuple – Mr Valls, premier ministre de la France, l’a clairement et dernièrement stipulé – n’est toujours pas reconnu. Ses droits purement niés. Face à la réalité historique de notre résistance populaire, nous ne pourrions détacher toutes ces manifestations « religieuses et humanistes » du contexte ou elles se situent.
Pour l’occasion, l’arme de la « communauté de destin » est brandie. Mais un peuple opprimé comme le nôtre a t-il constamment besoin de ces justifications ? N’est ce pas plutôt à tous ces apports humains naturels – quelle que soit leur origine – de montrer leur volonté d’intégrer nos propres valeurs ? Pour exemple quand on lit dans le communiqué « I Paceri », cette séquence des genres » nous hommes et femmes Corses, issus (es) de l’immigration, nous résidents et résidentes de fraiche date venus de tous les ailleurs », on peut s’interroger sur l’opportunité de la distinction entre celles et ceux issus (es) de l’immigration (laquelle ? ) et celles ceux « résidents et residentes de fraiches dates ( lesquels? ). Le distinguo, à défaut d’illustrer la seule diversité humaine, entretient ici la complexité d’une question qui porte sur le contenu de la notion de Peuple Corse.
Au demeurant « I Paceri », si il en reste encore vraiment au sein de notre société, devraient plutôt travailler et produire efficacement contre tous ces mécanismes – mortifères -qui empoisonnent, divisent et ensanglantent bien de nos familles et qui ne sont pas si éloignés que ça de nos préoccupations quotidiennes . Là où justement beaucoup se taisent …
Gouverner c’est prévoir. Les nationaux que nous sommes, dans le contexte actuel doivent avoir conscience de l’énorme chantier qui est le nôtre pour construire, affirmer et enraciner la citoyenneté corse. Parmi ces chantiers, la langue, la culture, l’éducation, la formation, l’emploi, l’habitat sont autant de considérants qu’il nous faudra bâtir pour répondre à l’infamie de la soumission à la France et empêcher, en ce début du XXIème siècle, le funeste piège d’un communautarisme instrumentalisé par l’extérieur.
Cessons de tomber dans la nasse de justifier ce que nous sommes face au système dominant. Le temps de la souveraineté nous appelle plutôt à affirmer et à construire « cio chi no semu » face à ce même système. Osons le pari de notre citoyenneté, avec la naturelle contribution de toutes celles et ceux – sans distinction d’origine – qui intègrent le Peuple Corse, ce » peuple de vieille civilisation » comme l’a si bien dit Ghjuvan Guidu Talamoni dans son excellent discours de Corti.
A beaucoup de méditer sur ce proverbe mongol : Qui boit l’eau d’une terre étrangère en accepte les coutumes. »