Séance publique des jeudi 29 et vendredi 30 octobre 2015
Extraits de l’allocution d’ouverture du Président Dominique BUCCHINI
Mes chers collègues,
mon propos d’actualité, une fois n’est pas coutume, restera centré sur notre institution.
Nous ouvrons aujourd’hui la dernière séance publique de notre mandature.
Installée le 25 avril 2010, cette Assemblée aura œuvré un peu plus de cinq ans pour prendre en charge, avec le Conseil Exécutif, les rênes de la collectivité territoriale de Corse. Si vous me permettez la comparaison, cela représente le temps d’un quinquennat entier, pour ce qui concerne la fonction gouvernementale, ou celui de toute une législature, s’agissant de l’organe délibérant.
Beaucoup de choses auront donc changé, en bien comme en mal, ici ou ailleurs, pendant cette période. Chacune à leur niveau, européen, national ou local, les institutions publiques ont été confrontées à de nombreuses crises, et elles ont eu à relever de nombreux défis. Mais pour satisfaire aux attentes de la population, gérer la proximité et préparer l’avenir, leurs moyens n’ont cessé de diminuer. Ce décalage, autant que les contestations des options politiques, légitimes en démocratie, aura alimenté le mécontentement et la défiance qui caractérisent la phase actuelle.
Pour autant, le rôle de la collectivité publique demeure incontournable dans nos sociétés modernes : pour organiser et structurer le débat démocratique ; pour faire prévaloir l’intérêt général au-dessus de la somme des intérêts particuliers ; ou pour maintenir les services publics sans lesquels les plus vulnérables –je parle aussi bien des personnes que des territoires- seraient en état d’abandon.
Dans ce contexte, la Collectivité Territoriale s’est efforcée d’agir, de répondre aux urgences comme aux enjeux de moyen terme avec les prérogatives que lui confère le statut particulier. Chacun d’entre vous reste bien sûr libre de porter ses appréciations sur le bilan de la mandature et l’action de ses responsables : c’est d’ailleurs l’un des fondements de la campagne électorale qui a déjà commencée.
Pour ma part, et depuis cette tribune, je me limiterai à quelques considérations sur non pas les résultats, mais sur l’obligation de moyens qu’il nous appartient, collectivement, d’assumer devant le peuple.
Incontestablement, cette mandature aura été active.
On peut déjà le noter par la densité de l’ordre du jour de cette session.
On peut le vérifier quantitativement, avec 63 séances publiques, préparées par 11 séances plénières et 364 réunions de commissions. 1.364 délibérations ; 345 questions orales posées dans le cadre de la mission de contrôle de l’exécutif et depuis cette mandature, retransmises en direct sur la télévision régionale ; et 211 motions, adoptées à l’initiative des membres de l’Assemblée.
Cela, sans parler des agences et offices, suffirait à démontrer que la Collectivité Territoriale de Corse fonctionne à un rythme bien plus considérable que les régions de droit commun. Malgré une base démographique beaucoup plus élevée là-bas alors qu’elle est des plus étroites ici.
J’ajoute volontiers que nous ne nous sommes pas tenus au seul champ –déjà large !- de nos compétences, ni à une conception restrictive de celles-ci.
Il serait déplacé de faire de l’autosatisfaction. Mais lorsque le doute, le scepticisme ou la méfiance sont parfois « tendance » dans l’opinion, il n’est jamais inutile de rappeler au citoyen quelques vérités objectives.
Nos travaux, ensuite, se sont déroulés dans un état d’esprit particulièrement constructif.
Les élections territoriales de mars 2010 avaient exprimé un changement significatif dans le rapport des forces politiques, entrainant la première alternance à la CTC depuis un quart de siècles. Le Conseil Exécutif et l’Assemblée n’ont pas hésité à aborder des dossiers sensibles, politiquement ou juridiquement, au niveau de notre île comme dans la relation avec le pouvoir central. Le contexte, de surcroit, était de nature à exacerber les enjeux, notamment en matière de foncier, d’économie ou de social, d’environnement et d’aménagement du littoral.
Pourtant, et c’est autant l’élu chevronné que le président qui souhaite en porter publiquement le témoignage, rarement les débats dans cet hémicycle auront été aussi constructifs au niveau des idées, respectueux au niveau des personnes.
Je n’ai assisté qu’à de rares escarmouches verbales ; mais j’ai souvent entendu les uns saluer l’évolution des autres, ceux qui s’opposaient à un texte ne pas chercher à bloquer la position commune, ceux qui étaient majoritaires reconnaître la valeur des arguments de la minorité.
J’ajoute que les relations entre un Conseil Exécutif stable et homogène, et une Assemblée plurielle et évolutive, ont continué à s’équilibrer : ce sont même des commissions qui sont à l’origine de plusieurs délibérations ou réformes d’envergure. Et il serait à mon avis hautement souhaitable que cette tendance longue se poursuive dans la réforme institutionnelle en cours.
En Corse, le débat public s’est apaisé, sans pour autant s’endormir, et notre Assemblée en aura été le reflet, quand elle n’a pas donné l’exemple.
Enfin, cette mandature aura pu s’appuyer sur un bon niveau d’implication des conseillers.
Les tableaux de présence demandés par la presse révèlent une assiduité moyenne plus que « globalement positive », si vous me passez cette expression.
Ils seront d’ailleurs complétés par l’état des commissions : l’appréciation sera peut-être plus nuancée, tant nous pouvons constater que l’alourdissement continu de l’ordre du jour, l’importance des décisions à prendre, ont pour effet de dégarnir la phase des commissions, pourtant fondamentale à la préparation des séances publiques.
Il s’agit là d’une réflexion à porter dans le cadre de la future collectivité unique : le rythme des séances de l’Assemblée, le délai préalable de communication des principaux dossiers, également la nécessaire valeur ajoutée du conseil consultatif, seront autant de questions déterminantes pour la qualité de nos décisions.
On pourra y ajouter le statut de l’élu et les moyens mis à sa disposition.
L’assiduité est une exigence légitime du peuple envers ses mandataires : à cet égard, une des premières délibérations de la prochaine assemblée consistera à définir un régime de retenues pour sanctionner les absences injustifiées.
Quant aux moyens techniques, vous avez constaté que cet hémicycle et les salles de délibérations ont été modernisés, et qu’un système de télé-présence ne va pas tarder à fonctionner entre Ajaccio, Bastia et Corte. Cela facilitera certainement les travaux de la prochaine assemblée.
Pour conclure, mes chers collègues,
Je tiens à vous dire que j’ai eu, personnellement, beaucoup de plaisir à œuvrer avec chacun d’entre vous. J’en connaissais la plupart, j’ai découvert de nouveaux talents. J’associe bien sûr celles et ceux qui pour des raisons personnelles ou de cumul des mandats, n’ont pas été jusqu’au bout de leur mandat. Je félicite également plusieurs conseillères –elles se reconnaîtront- qui ont affronté de gros problèmes de santé sans que cela altère leur courage ni leur dévouement.
En saluant le Président du Conseil Exécutif et son équipe pour la qualité et la sincérité de nos relations, je leur demande de remercier l’ensemble des directeurs et des agents de notre collectivité, notamment celles et ceux qui sont venus défendre et expliquer leurs rapports en commission ; et j’y inclue le secrétariat général de l’Assemblée, toujours aussi patient, disponible et efficace.
Je vous souhaite, à toutes et à tous, une bonne campagne électorale, dans le souci des intérêts collectifs du peuple corse, en ne doutant pas qu’elle contribuera à faire émerger une nouvelle Assemblée à l’honneur de notre île.
Je vous remercie.
DOMINIQUE BUCCHINI