Femu A Corsica tenait une conférence de presse jeudi 13 août à Bastia sur la question des déchets, le groupe propose d’autres modèles de traitement. Selon les élus de Femu a Corsica, la question du traitement des déchets et la crise actuelle représenteront un véritable échec dans le bilan de la mandature de l’Exécutif régional. Ils ont tenu ce matin une conférence de presse à Lucciana pour appeler à une « révolution » des comportements en matière de tri sélectif. (corsematin)
Voici le texte intégral :
Une proposition de Protocole liant les parties prenantes à la gestion des déchets – Communes d’accueil des centres d’enfouissement, Communes et Communautés de communes, Syvadec, opérateurs privés, Etat – est soumise à l’ensemble des partenaires pour engagement et délibération concomitante, avec une date impérative, le 15 septembre prochain.
Nous comprenons la démarche, qui révèle l’inquiétude légitime des élus et de la population d’une région trop longtemps considérée comme la destination « normale » des déchets de l’île.
La 1è partie de ce protocole relève l’urgence d’une vraie politique de collecte et tri à la source, y compris pour les biodéchets : comment ne pas l’approuver ?
Il s’agit en effet de la reprise de l’ensemble des propositions portées depuis 2010 par Femu a Corsica, qui n’a cessé d’affirmer que seules ces mesures pouvaient faire évoluer notre île vers une gestion optimale des déchets : collecte sélective des biodéchets partout où c’est possible, collecte des déchets recyclables au porte à porte, valorisation des déchets au plus près des gisements, etc.
La « crise des déchets » que nous connaissons aujourd’hui était prévisible : la persistance du transport et de l’enfouissement en vrac depuis des années, avec leur cohorte de nuisances insupportables subies par les riverains, a inévitablement entraîné la saturation des centres d’enfouissement.
En matière de tri sélectif, de gros investissements ont été faits par les intercommunalités sans que les limites des systèmes proposés n’aient été évaluées. La question du traitement séparé des biodéchets, qui représentent près de 30% de la poubelle, n’a jamais été prise en compte. La question de la collecte au porte à porte n’a pas été abordée, alors qu’elle est indispensable à une bonne gestion des déchets.
Si les propositions de Femu avaient été mises en œuvre à temps, cela aurait permis de prolonger significativement la durée de vie des centres d’enfouissement en diminuant les déchets entrants et en réduisant considérablement les nuisances et les pollutions liées aux déchets qui fermentent.
Femu a Corsica prend acte de cette (r)évolution dans les orientations générales de cette partie du protocole, qui vont d’ailleurs bien au-delà des objectifs retenus dans le nouveau Plan déchets voté le 17 juillet dernier par l’Assemblée de Corse et les approuve sans réserve.
Cependant, la proposition de protocole rédigée par le « Comité de suivi » et destinée à sortir de la situation de crise, appelle les remarques suivantes :
Sur la forme
Le protocole demande leur engagement et des délibérations à des collectivités qui ont transféré leurs compétences « collecte » et/ou « traitement », et n’ont donc plus compétence dans ce domaine.
En effet, la compétence « traitement » a été pour la majorité de ces collectivités transférée au Syvadec.
Ce protocole leur demande également de contractualiser avec des opérateurs privés, ce qui relève exclusivement du traitement.
Et la compétence « collecte » a été transférée par les communes aux intercommunalités. Au plan juridique, ces communes ne semblent pas pouvoir ratifier et délibérer valablement sur un protocole dont l’objet échappe à leur compétence. Les Communautés de communes ne pourront délibérer valablement sur la partie « traitement » du protocole.
Nous proposons de surmonter cette difficulté par l’établissement d’un protocole distinct pour les collectivités ayant la compétence « collecte » de façon à « sécuriser » les engagements réciproques.
Sur le fond
Parallèlement à l’engagement à réduire drastiquement les déchets, le protocole demande aux collectivités d’acter la création d’une unité de Tri mécano biologique (TMB) à Tallone pour écarter les biodéchets de l’enfouissement ; si la collecte séparative de ce type de déchets est mise correctement en place en amont partout où c’est possible, (comme demandé par ailleurs dans le protocole), l’unité de TMB ne se justifie plus. Et elle risque de créer un « appel d’air » pour les déchets en vrac.
Ces unités de traitement sont peu performantes (les services de l’Etat – ADEME – les déconseillent fortement, y compris dans la Loi sur la transition énergétique votée récemment, et ne les subventionnent plus – voir document 2 en fin de dossier) ; elles sont aussi très coûteuses (environ 15 M d’€) : leur amortissement et leur fonctionnement impactera fortement la facture pour les usagers, d’où un risque important d’augmentation de la pression fiscale.
La réalisation de cette unité de TMB implique une modification « sur mesure » de la Loi Littoral que Femu a Corsica considère comme inopportune.
Des collectivités locales en pleine interrogation
Le délai fixé par le protocole pour des résultats probants est de 3 mois ; or les collectivités locales n’ont pour l’instant aucun « mode d’emploi » du changement de modèle (collecte séparative, compostage collectif, ramassage au porte à porte, etc) et ne savent pas comment améliorer la situation.
Il faudra leur fournir une vraie méthodologie tenant compte des retours d’expérience d’autres régions d’Europe (Toscane, Piémont, Catalogne, Alsace), un accompagnement (comme prévu dans le nouveau Plan déchets, ce rôle doit être assumé par l’OEC), une formation des agents.
Car les méthodes doivent absolument être adaptées en fonction des différentes configurations (villages, agglomérations, villes, habitat vertical ou horizontal). Il est nécessaire de commencer par des expérimentations qui seront reproductibles de proche en proche.
Cela suppose un temps de préparation et de mise en place raisonnables, sauf à penser qu’il s’agit seulement d’un « affichage » destiné à rassurer la population des communes d’accueil des centres d’enfouissement et à justifier des campagnes massives de communication d’une efficacité très relative.
Il est indispensable d’acter un changement de modèle de gestion des ordures ménagères, en privilégiant désormais le tri sélectif, la collecte à la source et la réduction des déchets.
Mais il est nécessaire de clarifier les engagements des partenaires et de veiller à la cohérence du contrat qui les lie.
Le Maire de Bastia, qui s’est déjà publiquement engagé à mettre en place une politique de réduction drastique des déchets, a fait une proposition de « protocole alternatif » séparé pour les collectivités ayant la compétence « collecte ».
Femu a Corsica demande à ses élus dans les intercommunalités de relayer cette proposition et d’inciter à cette clarification.
Documents complémentaires
Extrait de la Conférence de presse Femu a Corsica du 2 juin 2010
« L’enfouissement des OM en vrac, sans séparation préalable des fermentescibles (qui représentent au moins 1/3 des ordures), n’est pas acceptable.
Rappelons que c’est le mélange entre déchets biodégradables et non dégradables qui produit des réactions chimiques irréversibles entraînant les pollutions et des odeurs et que seul le tri à la source donne de bons résultats.Un plan général de tri et ramassage des ordures fermentescibles dans les villes et de compostage en zone péri-urbaine et rurale est incontournable avant toute mise en place de système de traitement proprement dits : les déchets dégradables ainsi séparés peuvent être orientés vers des plateformes de compostage proches des villes (il en existe déjà à la Marana et près d’Aiacciu).
La généralisation du tri des fermentescibles s’organise désormais de façon courante ailleurs en France et en Europe. Ce n’est ni coûteux, ni compliqué à mettre en œuvre. C’est un travail de sensibilisation et d’information des populations d’une part, d’organisation de la collecte d’autre part. Autant dire que c’est largement à notre portée, et dans des délais courts !
On supprimera ainsi l’essentiel du problème du traitement des déchets, on évitera le surdimensionnement extrêmement coûteux des unités de traitements en aval et on favorisera la diminution des transports, polluants et également très coûteux(…)
Femu a Corsica demande :
La mise à l’étude immédiate du plan général de tri et compostage des fermentescibles de toute la Corse.
L’amélioration du tri (verre, papier, métal) par le tri au porte à porte et sa généralisation à toute la Corse.(…)2) Extrait de la Loi sur la transition énergétique adoptée en juillet dernier (Titre IV, Article 19) :
« La généralisation du tri à la source des biodéchets, en orientant ces déchets vers des filières de valorisation matière de qualité, rend non pertinente la création de nouvelles installations de tri mécano-biologique d’ordures ménagères résiduelles, qui doit donc être évitée et ne fait, en conséquence, plus l’objet d’aides des pouvoirs publics »
Femu A Corsica
13 Aout 2015