Texte de trois membres emprisonnés de la Lutte Révolutionnaire: Aucune prolongation de la vie du système

La restructuration imminente de la dette grecque, entamée par l’élite économique et politique en collaboration avec le gouvernement du PASOK, sera le premier aveu de l’incapacité à gérer la dette et à freiner sa dynamique toujours grandissante. Elle fait partie d’un plan ambitieux de faillite contrôlée de la Grèce afin d’éviter l’éclatement de la bulle de la dette. Cet éclatement aura des conséquences -économiques, politiques et sociales- incalculables, à l’intérieur du pays, et provoquera  des réactions en chaine dans les autres pays européens; parmi ces impacts, l’amorce d’une nouvelle crise financière incontrôlable, à dimension internationale, qui révélera une fois de plus la pourriture du système capitaliste et provoquera une grande agitation sociale et politique.

Nous avons vécu, il y a un an, le premier acte de ce plan de faillite contrôlée –un plan vain en raison de la dynamique de la crise structurelle du système: la soumission de la Grèce à l’élite supranationale et ses mécanismes économico-politiques (FMI, BCE et UE) et la signature du mémorandum. En fait, en vertu de cet accord, l’état grec a effectué l’opération de titrisation d’une vieille dette, pas officialisée jusqu’à ce moment, rendant ainsi impossible le défaut de paiement; en même temps il a hypothéqué les biens et richesses du pays.

Le mémorandum montre que le gouvernement grec et l’élite économique voient très loin; cet accord garantit qu’en cas de révolte sociale –très probable dans un futur proche- il n’y aura pas la possibilité de défaut unilatéral sur la dette (de la part du débiteur); une telle révolte pourrait conduire à la formation d’un gouvernement d’unité nationale comme «dernier recours» pour rétablir la normalité dans le pays et éviter une vraie révolution sociale. Nous pourrions caractériser cet accord comme un acte de trahison du peuple grec, pour lequel Papandreou et son gouvernement seront jugés par la société grecque. Le défaut sur la dette conduirait à un conflit frontal avec l’élite: en tant que créancière elle exigerait par tout moyen la protection de ses droits (des droits pour lesquels le gouvernement s’est engagé en signant le mémorandum avec le sang du peuple grec et la sortie du pays hors de l’économie du marché).

Le prochain objectif du mémorandum et du prêt de 110 milliards d’euros accordé par la troïka est le remboursement des détenteurs des anciennes obligations grecques et le transfert de la dette à des organisations internationales (UE, BCE, FMI). D’assurer, à travers la prolongation du délai pour la faillite grecque, que les détenteurs d’obligations réussiront à s’en débarrasser avec la moindre perte. (A noter que ces obligations sont considérées comme des bouts de papier sans valeur dans le monde des investissements et seront bientôt appelées des «produits toxiques»). Cela est atteint aujourd’hui; la BCE est devenue la principale détentrice des obligations «toxiques» de l’état grec puisqu’elle garde 30% de ces obligations; les créanciers précédents de la Grèce –notamment les banques allemandes et françaises- gardent une… distance de sécurité vis-à-vis de bulle de la dette qui est prête d’éclater.

Le processus du défaut de paiement «contrôlé» comprendra dans un premier temps l’allongement de la durée de remboursement et le remplacement de l’ancienne dette par la nouvelle. Cet allongement donne un soi-disant second souffle à l’état grec afin de payer ses dettes (le prêt de 110 milliards inclus). En réalité, il apportera une nouvelle charge à la dette en raison de l’intérêt supplémentaire puisque le taux d’intérêt restera inchangé ou sera légèrement réduit. Le remplacement de l’ancienne dette par la nouvelle est un geste qui favorise clairement les détenteurs d’obligations vu que l’Etat grec achètera les obligations dégradées à un prix certainement surévalué par rapport à leur vraie valeur et vendra des nouvelles obligations garanties par le Fonds Européen de Stabilité Financière (le FESF sera remplacé en 2013 par le Mécanisme Européen de Stabilité, MES). La mission de ces nouveaux mécanismes est d’achever le processus de faillite contrôlée des pays surendettés, couvrant les mauvaises créances des créanciers qui ont investi dans la dette publique, afin de protéger le système financier de l’Europe face à la crise. En même temps, les banques européennes continueront de puiser dans les liquidités de la BCE profitant de ses garanties pour l’investissement dans la dette grecque.

Les avantages de la restructuration pour les banques ne s’arrêtent pas là, même si elle comprend non seulement un remplacement de l’ancienne dette par la nouvelle mais aussi une légère réduction de la dette. Une grande partie du paquet de soutien de 78 milliards euros –fourni aux banques grecques par les gouvernements de la Nouvelle Démocratie [Nea Dimocratia] et du PASOK-  ce sont des garanties qui se transforment, suite à la restructuration, en obligations et finalement en nouvelle dette. D’ailleurs, le processus de la restructuration lui-même apportera des profits supplémentaires aux banques responsables pour la restructuration.

Ainsi, alors que le gouvernement parle d’un allègement de la dette, il impose de nouvelles mesures d’austérité et d’ajustement néolibéral, beaucoup plus dures que ce que nous avons vécu jusqu’à aujourd’hui. En pratique, c’est la société grecque qui va porter le fardeau de la charge (tant l’ancienne que la nouvelle), et les banques, grecques et européennes, seront ceux qui sortiront une fois de plus gagnants.

Et avant même l’annonce de la restructuration, le gouvernement a commencé de racheter des obligations d’état au 97% à 99% de leur valeur nominale et a donné 2,3 milliards d’euros, tandis que leur prix sur le marché varie de 50% à 60% de leur valeur nominale. Tout cela, apparemment pour empêcher la soi-disant coupe de la dette et assurer que les banques auront le moins de perte possible de leur «investissement» dans les obligations d’Etat.

Finalement, le plan d’une forme contrôlée de défaut sur la dette aidera l’élite économique non seulement à préserver les fonds investis en obligations grecques mais aussi à continuer de tirer des profits et déplacer les fardeaux sur les épaules des prolétaires de ce pays.

Il y a un an, Papandreou et son état-major disaient sans cesse des mensonges organisés. Ils prétendaient que la soumission du pays à la troïka et la dette de 110 milliards euros, qui «améliorerait la situation économique de la Grèce», étaient la seule façon d’éviter la faillite, de continuer de donner de l’argent pour les salaires et les pensions, financer les secteurs comme la santé et prévenir une déclaration de cessation de paiement envers la société. Ils persistent jusqu’aujourd’hui dans le même mensonge et continueront à terroriser la société grecque avec le dilemme «faillite ou troïka», jusqu’au moment où il sera impossible de maintenir la bulle de la dette grecque, jusqu’à proclamer l’effondrement du pays.

Aujourd’hui, un an après la signature du mémorandum et tandis que tout le pays agonise sous l’occupation du FMI, de l’UE, de la BCE et des politiques néolibérales imposées, les secteurs publics, comme la santé, sont abandonnés, des écoles et des universités ferment, une grande partie du financement des soins est coupée, pensions, salaires et prestations sont réduits ou supprimés et la cessation de paiement de la part de l’État envers la société est déjà une réalité. Alors que les banques auront la moindre perte –voir même des profits-  de leur implication dans la dette grecque, les caisses d’assurance (assurance maladie et retraite) se trouvent juste avant l’effondrement et seront certainement les grands perdants de la faillite de l’Etat; ainsi il est sûr qu’une cessation de paiement envers les assurés aura lieu. En même temps, le gouvernement vend pour une somme dérisoire les entreprises publiques, ainsi que toute la richesse du pays, à l’élite économique, alors que les milliardaires de la planète accourent comme des «hyènes».

Les sacrifices et le saignement de la base de la société grecque doivent continuer sans relâche, non pour l’amélioration des conditions de vie mais pour la survie du système. Il ne s’agit pas d’éviter un défaut de paiements (de la part du gouvernement) envers les employés et les retraités, les hôpitaux et les services publics. La faillite de l’état grec était assurée avant même la soumission du pays à la troïka; non seulement l’élite mais le gouvernement lui-même le connaissaient. Et les mensonges qu’ils ont dit et disent sont de tromperie délibérée, afin de nous obliger à accepter la tempête criminelle néolibérale. Cette tempête ne sera pas freinée suite à la restructuration de la dette mais au contraire, elle s’intensifiera encore plus.

Finalement, tout retard de l’effondrement de l’économie -sous forme d’allongement de la durée de remboursement ou de coupe de la dette, et sur l’initiative du créancier ou en collaboration avec le débiteur- non seulement n’allège pas le fardeau de la crise financière qui accable le peuple mais aggrave encore plus sa situation. Le seul choix que nous avons est celui de tourner le dos aux dilemmes de la souveraineté, d’accepter que la situation actuelle ne peut plus continuer, de comprendre que la faillite de nous tous est déjà une réalité, de précipiter  nous-mêmes l’effondrement et prendre la situation économique entre nos mains.

LA FAILLITE DU PAYS EST LA CONDITION POUR LE SAUVETAGE DU CAPITAL

Le projet néolibéral imposé au pays par le FMI, l’UE et la BCE comme une condition pour l’emprunt de 110 milliards euros n’a pas réussi à soulever l’économie grecque et la rentrer dans l’orbite du développement capitaliste. Au contraire, les réductions des salaires et des pensions, les coupes dans les dépenses publiques –le défaut de paiement dans certains cas, comme nous avons dit plus haut–, les conditions de travail extrêmes que les employés doivent accepter, la dégradation et la dépréciation des services publics (santé, éducation etc.), les services publics qui ferment définitivement, tout cela conduit à l’intensification de la pauvreté, l’augmentation rapide du chômage, la baisse de l’activité économique. Les banques ne peuvent plus fournir des liquidités et l’argent qui circule ne cesse de diminuer.

C’est logique que ce processus de de-développement  non seulement ne rentre pas de l’argent dans les caisses de l’État mais diminue sans cesse les recettes publiques puisqu’il est impossible de collecter les impôts avec lesquels l’état espère d’assurer la liquidité  et «faire face à ses obligations envers les créanciers».

Les détracteurs du néolibéralisme –qui font aussi partie du système- défendent l’ «expansion financière» comme une solution pour le développement et la sortie de la crise, ainsi que l’intervention étatique dans le fonctionnement de l’économie. Ils critiquent le programme du FMI et de l’UE et le considèrent comme mauvais, inapproprié et inefficace, comme une voie sans issue, puisqu’il ne peut pas -malgré les déclarations de ceux qui le promeuvent- redémarrer la machine capitaliste et ainsi le processus d’accumulation.

Nous avons déjà écrit que les néolibéraux ne sont pas stupides pour imposer sans arrêt les mêmes recettes dans plusieurs pays, espérant des résultats différents. Depuis l’Afrique, l’Asie du Sud, le Mexique et l’Argentine jusqu’à la Grèce d’aujourd’hui, le FMI applique à peu près les mêmes méthodes. Des procédures de production disparaissent toutes entières, les économies des pays s’effondrent, les pays et les gens tombent en faillite et le système capitaliste mondial reprend son souffle et se développe, laissant derrière lui des déserts sociaux.

L’aggravation des inégalités, la pauvreté croissante, la marginalisation des populations entières ne sont pas les méfaits d’un système qui «ne fonctionne pas correctement et se trouve dans la mauvaise direction», qui est «susceptible de corrections»; elles ne sont pas la conséquence du «capitalisme débridé», du «capitalisme en déroute», «de la spéculation effrénée», comme le prétendent les détracteurs du néolibéralisme. Ce sont des conditions pour la survie d’un système en crise. Ce sont des conditions afin de tirer des nouveaux profits, continuer le développement capitaliste, prolonger la vie d’un système malade.

L’attaque néolibérale sans précédent, lancée par l’élite économique et politique à travers le gouvernement grec et la troïka, est une étape de la «répression financière thérapeutique» afin de faire face à toute bulle créée durant la période de développement capitaliste précédente. La faillite grecque fait partie de cette thérapie «douloureuse mais nécessaire» qui va nettoyer un système pourri; l’élite connait très bien que la faillite est inévitable mais aussi la souhaite puisque la bulle de la dette grecque est un… abcès dans le système mondial qui doit être rompu.

La période de «guérison» sera longue et laborieuse ayant pour objectif l’accroissement de la productivité et le retour à la rentabilité à travers la dépréciation du capital social et du travail, à travers la baisse continue des prix, le déclin économique et le de-développement. Pour la Grèce, comme pour tout pays confronté à un grave problème financier, la sortie de la crise de la dette -précédée d’une grande baisse du PIB, des revenues, des salaires-  peut durer plus de 100 ans.

Le problème est que l’élite, économique et politique, a toujours l’illusion qu’elle peut gérer et même contrôler des faillites comme la grecque et assurer une explosion contrôlée de la bulle de la dette. Elle a l’illusion qu’elle peut contrôler et même prévenir le facteur sociopolitique. Elle a l’illusion qu’elle peut gérer efficacement un système confronté à la plus grave crise de son histoire. Cette crise est la plus grave puisqu’elle est la première crise économique vraiment mondiale, avec une dimension d’interaction des fonctions économiques sans pareille. Mais aussi, en raison de la destruction et la dépréciation des capitaux -qui ne peuvent plus être investis dans la production et donner du profit- qui sera si grande que les dimensions réelles de la crise seront inconcevables. Si nous considérons que le capital notionnel accumulé, concernant les produits «dérivés» financiers, est à peu près  900 billions, tandis que le PIB mondial en 2009 a été 55 billions, nous réalisons que la bulle du développement mondial a atteint des proportions sans précédent et son éclatement aura des conséquences économiques, politiques et sociales «explosives».  Le montant énorme des capitaux fictifs ne peut pas être interprété comme le résultat de la cupidité de quelques spéculateurs qui parasitent un système «sain et équitable».  Il est le résultat cumulatif d’un effort long pour surmonter la crise systémique en reportant à plus tard la marge bénéficiaire du capital. Ce report constant de la… rentabilité du capital, suite à la création et l’utilisation de tous les outils financiers connus -dont certains sont excommuniés par plusieurs soi-disant «moralistes» multimillionnaires, même comme des «armes de destruction massive» (entendant par cela les produits «dérivés» financiers)- a créé cette énorme bulle dans le système financier, ainsi que la bulle de la dette dans les pays du centre capitaliste.

LA REVOLUTION SOCIALE EST LA SEULE ISSUE

Nous ne croyons pas que le control de l’explosion de la bulle du développement capitaliste mondial soit possible. Nous ne croyons pas que le control de l’explosion de la bulle de la dette grecque et de l’économie grecque soit possible non plus. Le crash économique va induire une explosion politique et sociale à travers laquelle vont surgir des nouvelles forces ; des nouvelles forces qui poursuivront soit le retour à la normalité, à travers la gestion politique de la crise et avec l’argument que «l’heure des subversions n’est pas encore arrivée», soit un virage vers des issues révolutionnaires pour le dépassement de la crise en valorisant l’occasion de l’effondrement du régime. Quelques unes des propositions qui font objet de la propagande gauchiste dernièrement concernent la faute de paiement de la part de l’Etat grec, la sortie de l’UEM, la sortie de l’UE, le retour à la drachme. C’est la dynamique de la crise systémique qui va amener à un défaut de paiement, puisque la dynamique de la dette grecque n’est pas affrontable. La faillite grecque, qui ne sera pas contrôlable, va entraîner l’ «expulsion» de la Grèce de l’UEM et la zone euro, afin de garantir la stabilité économique de la zone européenne, alors que le retour à la drachme sera le résultat de l’effondrement économique.

Ladite mutation aura bien évidement lieu dans le cadre de l’UE et les politiques «thérapeutiques» qui seront adoptées vont intensifier d’avantage l’attaque néolibérale, alors que la Grèce va devenir officiellement le paria de l’Europe en se vendant presque gratis à ses créditeurs face auxquels elle ne s’est pas montrée valide. La force et la dynamique des événements invalident de fait les propositions de la gauche pour une sortie radicale, mais dans aucun cas révolutionnaire, de la crise, puisque «les conditions ne sont pas et ne seront pas remplies».

Prenons l’exemple de la sortie de l’UEM et du retour à la drachme, sur laquelle basent leurs espoirs les adeptes de la gauche parlementaire en Grèce en pensant qu’elle va aider à surpasser la crise de la dette : il s’agit d’un procès qui n’a besoin d’aucun mouvement pour qu’elle soit atteinte, puisque c’est le système en crise lui-même qui travaille dans cette direction.

Il n’y a aucune monnaie de pays qui pourrait aider en soi au relèvement de l’économie nationale d’un pays qui, dans les conditions actuelles d’une crise mondiale, est en état de faillite. La dévalorisation de la monnaie, qui ne sera pas contrôlable, va conduire non seulement à la baisse de la valeur des marchandises, mais aussi à la baisse des salaires en intensifiant encore plus la dévalorisation intérieure –à savoir la baisse de la valeur de la force du travail – et en conduisant à une pauvreté encore plus grande que celle qui existe actuellement. La dette de la Grèce, une dette en euros, va s’augmenter de plus en plus, puisque la monnaie nationale sera dévalorisée et nulle réduction partiale de la dette ne pourra faire sortir le pays de la crise.

D’après les «radicaux» de la gauche, la sortie de l’UE va donner la possibilité au pays d’exercer une «stratégie économique nationale», de payer sa dette aux créditeurs et à la société, à travers la création de la nouvelle monnaie, et de financier le développement. Or, la création de l’argent – et il faudra en créer beaucoup puisqu’il n’y aura pas de source d’emprunt des marchés – va amener à une nouvelle baisse de la monnaie et à une hausse de l’inflation. Il s’agit d’un effort de Sisyphe, d’une impasse. Les propositions de taxation des riches et du grand capital sont plutôt hors réalité, puisque dans un environnement économiquement mondialisé, nulle entrave ne sera capable de garder les riches et leur beau capital à l’intérieur des frontières nationales d’un pays en état de faillite pour les taxer, en plus, avec des hauts taux de rendement.

En plus, un pays en état de faillite qui est passé à un défaut de paiement –même si celui-ci n’est pas fait d’une façon «coup d’état», par un gouvernement d’«unité populaire»- va rester en dehors des marchés qui vont refuser de lui prêter pour plusieurs années. En ce qui concerne la maxime selon laquelle «les marchés ont la mémoire courte», comme le soutiennent les partisans gauchistes du «projet de la survie nationale», cela peut être vrai en partie et au cas par cas pendant les périodes du développement capitaliste. Or, dans la période actuelle de la grande crise économique et alors que les bulles nationales des dettes vont commencer à exploser les unes après les autres, nul «agent» du marché ne va se permettre le luxe d’oublier, s’il ne sera pas prêt à faire face à des pertes encore plus grandes de son capital et à la dévalorisation absolue de ses valeurs. Par ailleurs, depuis 2001, l’Argentine n’a pas encore réussi de retourner sur les marchés afin de se faire prêter et la crise économique n’accorde pas de la marge à une levée de l’embargo économique de la part des marchés, au moins pour les décennies à venir.

Etant donné que toutes les propositions de sortie de la crise de la dette, tant les plus que les moins «radicales», ne contestent pas le système du capitalisme et de l’économie des marchés –nonobstant que celui-ci traverse actuellement la plus grande crise de son histoire – créent des illusions pour la société. A savoir que la sortie de la crise économique est possible à travers des «propositions réalistes et applicables» que l’on pourrait demander au gouvernement d’appliquer sans qu’on s’implique dans le «dur processus d’un renversement du système».

C’est cette illusion que relèvent les propositions récentes pour la création d’un mouvement qui va lancer la création d’une Comité de Contrôle de Gestion chargé d’examiner les prêts de l’Etat grec en cherchant la partie inacceptable de la dette qui ne doit pas être payée. Les critères selon lesquels une dette est jugée inacceptable (p.ex. les pots-de-vin pour l’armement et non pas l’armement en soi) sont les critères de ceux qui ne questionnent pas le système en soi, mais qui questionnent quelques unes de ses pratiques comme des «illégales», qui en défendent d’autres comme socialement légitimes et acceptables et qui fonctionnent, au fond, comme des défenseurs, de la gauche, du capitalisme, au moment où celui-ci se trouve dans la phase la plus vulnérable de son histoire.

En conclusion, lesdites propositions, qui sont loin d’être innocentes, contribuent à la stabilisation d’un système qui est en train de s’ébranler, en créant des soupapes de sûreté pour la colère sociale venant d’en bas et exigeant des réponses immédiates, des solutions et des issues. Quand on se trouve devant un effondrement économique inévitable, des propositions comme celles, mentionnées plus haut n’ont d’autre visée que d’assurer que les explosions sociales à venir ne conduisent pas à des ruptures sociales définitives avec le système, mais que les voies de retour à la normalité soient maintenues. Etant donné que nulle issue réaliste de sortie de la crise ne peut exister dans le cadre du système, nous croyons que tous ceux qui vont se précipiter, pendant les révoltes qui vont suivre l’effondrement économique, à promulguer ce type des propositions et à soutenir un gouvernement qui pourra les réaliser, ne le feront pas pour l’intérêt social, mais auront comme but de faire fonctionner le régime de nouveau et de le faire rebattre le plus tôt possible. Finalement, cela va se prouver par une trahison de plus –cette fois-ci venant peut-être d’en bas. L’histoire a d’ailleurs prouvé que nul retournement des relations de classe ne puisse être obtenu par de biais pacifistes et sans mettre en question à travers des actions, des grands conflits sociaux et de classe, la domination elle-même. Nul retournement des relations sociales et de classe n’est possible à travers des «propositions d’arrangement de la crise de la dette», tandis que le renversement du système capitaliste et du système de l’économie du marché ne soit pas mis au cœur de n’importe quelle proposition pour la sortie de la crise. Pour nous, n’importe quel effort de redémarrage du système est un crime, peu importe d’où il vient.

La période actuelle est appropriée pour la création d’un courant social qui va demander l’effacement immédiat de la totalité de la dette, la sortie de l’UE et de l’économie de marché, la socialisation de toutes grandes propriétés, mobiles ou immobiles, publiques ou privées, la restitution de l’expropriation de l’argent aux caisses publiques ravagées par les gouvernements, aux services de santé, aux hôpitaux, à l’éducation. Le moment d’effondrement qui va signifier le début de la période politique et sociale la plus inconstante pour le pays, sera la plus adaptée pour la propulsion du changement révolutionnaire sans aucun délai. Comme nous l’avons déjà dit, c’est parce que le noyau de la crise systémique se trouve dans les divisions sociales et de classe, qui constituent les cellules du système capitaliste et de l’économie de marché, que la seule garantie qu’on pourra sortir définitivement de la crise actuelle consiste dans l’abolition du régime économique lui-même, dans l’élimination de toute sorte de division sociale et de classe, dans la suppression de l’Etat et de toutes les institutions ainsi que les mécanismes qui le reproduisent et qui pérennisent les relations d’exploitation et d’oppression.

La solution se trouve dans la Révolution Sociale elle-même qui va poser des nouvelles bases pour la création d’une organisation sociale et économique nouvelle, sans inégalités ni divisions, sans pauvres ni riches. D’une organisation sociale horizontale qui aura comme valeurs inviolables celles de l’égalité économique et de la liberté politique pour tous. Qui aura comme noyau de son organisation sociale la communauté ou la commune. Qui va poser toutes les activités sociales et économiques sous la gestion d’un réseau d’Assemblées populaires et de Conseils, où chacun d’entre nous va prendre, à travers ses collectivités, sa vie entre ses mains, sur les lieux de travail, dans la ville, le village, le quartier. La solution se trouve dans une Révolution Sociale qui va créer des structures sociales, économiques et politiques aptes à entraver une nouvelle organisation des pouvoirs économiques et politiques.

Nous avons besoin d’une Révolution Sociale qui va laisser définitivement dans la passé de l’histoire humaine les divisions sociales et de classe, les discriminations, les inégalités. Qui va créer un monde dans lequel il n’y aura pas de la place pour la pauvreté et la richesse, les classes et les puissants. D’une Révolution Sociale qui va expulser, en tant que réprouvable, du sein de la société toute logique de profit dans la production, les relations humaines et les relations entre l’homme et la nature. Qui va restituer l’équilibre environnemental et faire guérir les plaies que le long parcours capitaliste d’exploitation inexorable des ressources naturelles a crée. Nous avons besoin d’une Révolution Sociale qui va embrasser la planète et qui va garantir la liberté et la prospérité pour tous les êtres humains.

Pola Roupa, Nikos Maziotis, Costas Gournas,

mai 2011

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