L’annonce que vient de faire le Ministre de l’Intérieur, concernant la création prochaine d’une collectivité unique de Corse – collectivité en faveur de laquelle votre assemblée s’est prononcée dans sa très grande majorité, le 12 décembre dernier – constitue une avancée majeure, une avancée historique. Pour votre territoire, son développement et ses habitants. Pour la France, son action publique et son organisation territoriale. Pour la reconnaissance de la diversité des territoires de France.
Cette collectivité territoriale unique, ce sont des questions institutionnelles, certes. Et nous aurons à ce sujet des discussions nombreuses – gouvernance, compétence, budget – j’en reparlerais. Mais c’est d’abord une chance pour la Corse et pour les Corses. Car, au-delà de ces questions techniques, qui parfois peuvent paraître obscures à nos concitoyens, c’est le cadre pour une action publique plus efficace et mieux à même de répondre aux besoins de ses habitants. C’est le cadre, pour vous donner à vous, élus, les moyens de répondre aux défis qui sont ceux de votre territoire et d’apporter, emplois, logement, soutien et solidarité à l’ensemble des citoyens vivant en Corse.Cette avancée que nous proposons, est la preuve que l’Etat et la collectivité territoriale de Corse, oeuvrent ensemble, pour la Corse et ses habitants.
La décision prise par le gouvernement d’accompagner la création de cette collectivité au 1er janvier 2018, est le fruit, en effet, du dialogue engagé par le gouvernement et les élus de Corse en novembre 2013.C’est le résultat de travaux importants conduits par vous, dans le cadre du groupe de travail sur l’organisation territoriale de la Corse et du comité stratégique de votre assemblée. Ces travaux, je les ai copilotés depuis 2013, avec le Ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, puis son successeur, Bernard Cazeneuve. Lorsque je suis venue devant vous l’été dernier, je m’étais engagée – afin de garantir une meilleure prise en compte des spécificités de l’Ile dans l’organisation institutionnelle de notre pays – à ce que la réforme territoriale face place à vos propositions. Je vous avais exposé les dispositions spécifiques à la Corse, contenues dans le projet de loi NOTRe, que je présentais alors dans tous les territoires de France.
Ces dispositions, inscrites à l’article 13 du texte donnaient suite déjà, à plusieurs de vos propositions. En effet, l’article 13 rend applicable à la Corse, toutes les dispositions législatives relatives aux régions, dès lors qu’elles ne sont pas contraires à celles qui régissent la collectivité territoriale de Corse. Et ce, sans que le législateur n’ait besoin de le mentionner explicitement à chaque intervention. Il prévoit aussi, parallèlement, une prolongation de deux ans du Plan exceptionnel d’investissements pour la Corse, un plan exceptionnel de soutien de l’Etat au développement d’infrastructures, d’équipements et de services collectifs dans l’Ile. Je vous avais annoncé également, au mois de juillet dernier, que dans le cadre du projet de loi NOTRe, vous auriez toute latitude pour exposer et faire valoir vos vues.
Ce projet de loi – je vous l’avais dit – serait un vecteur législatif pour répondre à certaines de vos demandes. C’est ce qui se vérifie aujourd’hui, maintenant que l’examen du texte est entamé au Parlement. Ainsi, lors de la première lecture au Sénat, le gouvernement a porté un amendement concernant la création d’un dispositif de redevance, pour le mouillage des bateaux dans les réserves naturelles. Ce dispositif, que vous appelez de vos voeux, sera –s’il est adopté d’ici la fin de l’examen parlementaire – la première adaptation législative résultant d’une proposition faite par votre Assemblée. Au-delà de son caractère nécessaire pour la Corse, cette mesure – qui sera d’application nationale – a donc aussi une portée symbolique forte.
L’examen du projet de loi NOTRe à l’Assemblée Nationale sera l’occasion d’introduire une seconde adaptation législative émanant de vos propositions. C’est dans le cadre de la première lecture à l’Assemblée, qu’un titre consacré au principe de création d’une collectivité territoriale unique en Corse sera introduit dans le projet de loi NOTRe.
Des discussions avec vous, nous permettront ensuite – entre les deux lectures du texte – de préciser les caractéristiques, le mode de gouvernance, les compétences et le budget de cette nouvelle collectivité. Permettez-moi à cet égard, de saluer les travaux de Pierre Chaubon, qui ne peut malheureusement pas être parmi nous aujourd’hui. Ils nous seront, sans aucun doute, très utiles pour la suite. La création de cette nouvelle collectivité emportera évidemment des conséquences pour les élus de Corse, puisqu’il faudra que ses représentants aient été désignés lors de sa création. De nouvelles élections générales devront donc se tenir au mois de décembre 2017. Des élections départementales auront bien lieu en Corse, comme partout en France – au mois de mars prochain. Des élections territoriales auront également lieu en Corse – comme dans le reste de la France – au mois de décembre de cette année. Simplement, les mandats des conseillers départementaux et des conseillers territoriaux seront plus courts que dans le reste de notre pays. Il nous faudra être sur ce point, tout à fait clairs et transparents auprès des électeurs de Corse. Afin d’assurer la lisibilité et la sincérité des scrutins à venir.
Par ailleurs c’est bien cette méthode de construction commune, initiée il y a près de 18 mois qu’il nous faudra poursuivre et approfondir. C’est la raison pour laquelle, il conviendra que nous définissions ensemble la façon dont fonctionnera cette future collectivité. Nous organiserons à cette fin – avec le Ministre de l’Intérieur – une rencontre avec les élus corses, avant fin du mois d’avril.
Mesdames et Messieurs, c’est un grand pas que nous allons franchir dans les tous prochains mois : un pas qui témoigne de la fécondité de nos travaux communs – je l’ai dit déjà. Qui témoigne aussi du respect des engagements que le Président de la République a pris auprès des Corses et de leurs représentants. Qui témoigne enfin, de la considération qu’a ce gouvernement pour les élus de notre république, sur tous les territoires de France. Ainsi, je ne doute pas – même si quelques divergences de points de vue peuvent subsister – que nous parviendrons à conduire cette grande réforme institutionnelle pour la Corse. Que nous parviendrons aussi, sur les autres sujets soulevés par l’Assemblée de Corse, à faire aboutir nos travaux. Pour une action publique moderne et efficace en Corse, pour une action publique adaptée au territoire corse, pour une meilleure qualité de vie de tous les habitants de Corse. Le gouvernement sera sur l’ensemble des sujets, à l’écoute des élus de Corse.
Il sera toujours prêt aussi, à construire avec vous, des solutions pragmatiques pour permettre un développement équilibré et solidaire de la Corse. Nous sommes déterminés à apporter des réponses aux besoins des habitants de l’Ile – nous le sommes depuis le début de nos travaux. Mais – et c’est le cas depuis le début de nos travaux également – nous devons être attentifs aussi au respect de notre vivre ensemble et de nos textes fondateurs. Cette attitude, qui a été celle du gouvernement tout au long du dialogue que nous avons eu sur la réforme territoriale en Corse continuera d’être la sienne pour la suite de nos travaux. Il nous faut en effet continuer d’avancer. Afin de dessiner, concernant les autres préoccupations qui sont les vôtres, des dispositifs efficaces et pérennes pour la Corse. Afin de lui permettre demain, de relever les défis qui sont les siens et de valoriser davantage ses atouts. Concernant la pression foncière d’abord.
Bernard Cazeneuve et moi-même, vous l’avons dit déjà, le statut de résident ne semble pas être la solution la plus à même de résoudre la situation intenable qui est aujourd’hui celle de l’Ile mais aussi de nombreux autres territoires de France. En revanche, des outils ont été mis en oeuvre. Je pense notamment à l’Office foncier de Corse qui a été créé cet été grâce au soutien financier de l’Etat. Il est désormais, pleinement opérationnel. Par ailleurs, je vous l’avais dit déjà – le gouvernement est prêt à envisager avec vous, des adaptations au droit commun afin d’améliorer le nombre de logements construits en Corse mais aussi dans tous les territoires français qui souffrent de cette pression foncière trop importante, de la Bretagne à la Côte d’Azur en passant par Paris. Concernant le développement effectif du bilinguisme, si la co-officialité telle que vous l’avez définie n’est pas envisageable au regard de nos principes républicains, le gouvernement partage l’objectif qui est le vôtre. C’est la raison pour laquelle, l’Etat soutient des projets comme celui du centre d’immersion linguistique de Bastelica que nous inaugurerons cet après-midi avec Bernard Cazeneuve.
C’est aussi la raison pour laquelle, le gouvernement est prêt à étudier avec vous, plusieurs dispositifs pour favoriser l’apprentissage du Corse tout au long du parcours scolaire et universitaire. C’est la raison pour laquelle, conformément aux engagements pris par le Président de la République, le gouvernement mettra en oeuvre le processus de ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires. Enfin, concernant la fiscalité, vous le savez le gouvernement entend les demandes qui sont les vôtres. Il nous faut dans ce domaine, poursuivre nos travaux, avec en ligne de mire, le PLF de l’année 2016. Je ne doute pas, que le secrétaire d’Etat au budget, Christian Eckert, vous recevra très prochainement à ce sujet.
Mesdames et Messieurs, avant de terminer cette intervention, laissez-moi vous dire la confiance qui est la mienne, à la veille de la création d’une nouvelle collectivité territoriale unique de Corse :
- Confiance dans l’issu de nos travaux à venir ;
- Confiance dans la capacité de l’Etat et des collectivités à élaborer des réponses aux enjeux de la Corse.
- Confiance dans leur capacité à accompagner les citoyens Corses dans leur vie quotidienne par à une action publique réinventée.
- Confiance dans la capacité de la Corse à continuer d’inspirer positivement notre droit national, et à être un exemple pour les autres collectivités ;
- Confiance dans l’avenir d’une Corse forte et dynamique dans une France juste et solidaire.
Je vous remercie.