De ses rivages somptueux qui mobilisent les plus grands appétits spéculatifs à ses profondeurs qui regorgent de richesses, en passant par ses routes commerciales qui développent un trafic sans cesse croissant la Méditerranée est enjeu de toutes les convoitises, de tous les dangers aussi. Chacun se souvient du combat mené il y a un peu plus de deux ans pour empêcher une nouvelle autorisation d’exploration pétrolière en eaux profondes… Marsactu du 5 janvier dernier, sous la plume de Julien Vinzent révèle que ce combat est loin d’être gagné et réclame à nouveau toute notre vigilance. Explications.
Le 26 juillet 2011 par mon initiative, le groupe Femu a Corsica déposait une motion pour réclamer la non reconduction de l’autorisation d’exploration pétrolière au large de la réserve naturelle de Port-Cros et la consultation de l’Assemblée de Corse pour toute demande de ce type. Le gouvernement, saisi par l’Exécutif le 3 octobre 2011 n’a jamais répondu sur le fond.
Deux jours plus tard, le 5 octobre, une demande de prolongation de permis de recherche d’hydrocarbures liquides ou gazeux dit permis « Rhône Maritime » était à nouveau déposée par les sociétés Melrose Mediterranean Limited et Noble Energie France SAS pour une durée de 5 ans.
Le 24 octobre, le ministère de l’écologie répondait à l’Assemblée de Corse pour dire qu’il mettait ce dossier à l’instruction… Depuis, plus de nouvelles de la part du gouvernement (qu’il soit de droite, à l’époque, ou de gauche aujourd’hui). L’Assemblée de Corse n’est toujours pas informée de la situation lorsque celle-ci évolue. Pas plus, d’ailleurs, que les Conseils scientifiques des aires marines protégées qui ont pourtant aussi leur mot à dire !
En 2012, notre groupe déplaçait alors son action sur le terrain, aux côtés de François Alfonsi, eurodéputé de la Corse à l’époque, et de son groupe Verts-ALE au parlement européen. José Bové notamment en première ligne du combat contre l’exploitation du gaz de schiste, mais aussi Michèle Rivasi et Eva Joly, en soutien de la revendication corse, se sont mobilisés autour des nombreuses associations de défense de l’environnement qui organisaient une grande mobilisation sur le littoral méditerranéen, en Corse, sur mer et sur terre, à l’impulsion notamment des pêcheurs insulaires et des associations du Collectif pour la loi littoral, et sur le continent au Fort de Brégançon avec notamment les associations contre l’exploitation du gaz de schiste. Arritti s’en était fait largement l’écho.
À la veille de l’élection présidentielle, le candidat-président Nicolas Sarkozy décidait alors de faire marche arrière et annonçait qu’il ne renouvellerait pas le permis « Rhône Maritime ». Une belle victoire populaire, qui avait été confirmée ensuite par la ministre de l’écologie Delphine Batho, du gouvernement Hollande au lendemain de son élection.
Mais le lobby pétrolier ne renonce jamais.
Le gouvernement sommé d’examiner de nouvelles demandes d’exploration
Loin des projecteurs médiatiques, la compagnie Melrose a poursuivi son action sur le terrain juridique et elle vient de marquer un point important devant le Conseil d’État.
« Dans une décision en effet en date du 19 décembre 2014, et révélée sur son blog par le militant écologiste Achim Gertz », nous informe Marsactu, « il suit ainsi l’ordonnance du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, rendue le 20 février 2014, qui donnait raison à Melrose face au ministère du développement durable ».
C’est une décision sur la forme et non pas sur le fond. Mais elle ouvre d’ores et déjà la porte au dépôt de nouvelles demandes d’autorisation d’explorer les profondeurs de la Méditerranée.
Le ministère de l’écologie qui défendait la décision de l’Etat prise en 2012, s’est vu opposer le fait qu’une demande initiale ayant déjà été accordée, il n’est guère possible d’objecter un refus de reconduction d’un permis d’explorer ; « l’entreprise disposait auparavant d’un permis, et ce depuis 2002. Or, « la prolongation du titre est de droit » dès lors qu’il remplit certaines conditions techniques et financières, ce qui n’est en l’occurrence « pas contesté » »explique Marsactu.
L’existence d’une Zone de Protection Ecologique a été cependant évoquée par le ministère de l’écologie pour justifier l’interdiction d’explorer. Mais elle se heurte à l’existence également d’une Zone Economique Exclusive. Car « rappelle le Conseil d’État, la France dispose de « droits souverains aux fins d’exploration et d’exploitation des fonds marins de son plateau continental au large de la Méditerranée » et la Zone de protection écologique n’a pas pour effet d’obliger la France à y renoncer » explique encore Marsactu.
Ce débat au fond doit encore être tranché juridiquement mais le fait qu’il soit posé est des plus inquiétants ! Pourtant, une demande de classement en « Zone Naturelle Particulièrement Vulnérable » de toute cette zone, y compris du Canal de Corse est également déposée. Les arguments ne manquent donc pas pour faire obstacle aux enjeux industriels. Pour peu que l’on organise la riposte.
Aujourd’hui où en est-on ? Le gouvernement « doit « procéder à un réexamen de la demande de prolongation dans un délai de deux mois ». Contacté, le ministère n’a pour l’instant pas répondu à notre appel. » révèle encore Marsactu. De quoi aggraver les inquiétudes.
Et le média marseillais de préciser : « l’enjeu n’est pas seulement écologique : dans cette procédure, Melrose réclame la condamnation de l’État à verser 63,5 millions d’euros ». Le lobby pétrolier ne recule vraiment devant rien !
Après notre motion de juillet 2011, notre groupe a par ma voix interpellé à plusieurs reprises l’Exécutif territorial sous la forme de questions orales. Femu a Corsica estime que la région Corse doit être davantage à l’offensive dans ce dossier et faire entendre sa réprobation de manière constante, énergique et concertée avec les autres régions concernées par le risque de pollution. Dans ce domaine plus que dans tout autre, c’est bien connu, l’union fait la force !
ARRITTI 2404 du 21/01/2015.