20 mars 2016, 20h. Le président de l’assemblé de Corse annonce les résultats en direct sur l’antenne régionale, qui deviendra bientôt nationale. 56% de oui, c’est la claque. Après l’Ecosse et la Catalogne, petit à petit, toutes les nations sans Etat du vieux continent se payent le luxe de choisir leur destin. C’est désormais chose faite pour l’Île de Beauté.
Jean-Pierre Pernaut a été obligé d’en faire sa une, relégant au second plan les résultats d’un concours bovin dans le Limousin. Presque 250 ans après son annexion militaire par les troupes de Louis XV, la Corse quitte le Royaume de France, devenu depuis République. C’est la nouvelle de ce 21 mars 2016, lendemain de réferendum sur l’île.
Croyant, en organisant ce scrutin, se débarasser des vélléités de sécession des insulaires avec la victoire d’un « NON » fracassant, l’Etat Français se réveille avec la gueule de bois. Terminée, la base militaire de Solenzara louée pour une fortune aux copains de l’OTAN. Terminé, le ponton avancé vers l’Afrique, le porte-flingue de luxe en pleine Méditerrannée d’où partaient les avions soi-disant pacificateurs, qui bombardaient de l’indigène au gré de l’évolution du cours du baril. Terminées, les villas de luxe en bord de mer pour notables français, construites au mépris des lois, bénéficiant d’innocentes largesses préfectorales. Si cette nouvelle a refroidi Paris, elle a réchauffé le maquis. Le 20 au soir, quelques minutes après l’annonce du résultat, la Corse s’est embrasée de joie, de colère aussi, de violence, comme elle en a l’habitude. Sur la place du marché de Bastia, bastion du « Iè », on a brûlé des dizaines de drapeaux français, sous les caméras de la BBC, de TVE, de la Rai et même de CNN et Al-Jazeera. Plus qu’une sécession, c’est encore un coup dur porté à l’image de l’Hexagone, déjà fortement ternie depuis des décennies. Pas un seul CRS, un seul gendarme de l’Etat français ne s’est aventuré dans les rues ce soir là. Des milices citoyennes ont assuré la sécurité comme elles l’ont pu. Partout dans l’île, sauf dans quelques villages uniquement peuplés de personnes âgées encore attachées à la croupissante Marianne, les bannières bleu-blanc-rouge sont violemment tombées des frontispices publics, ne laissant place qu’à la tête de Maure et à la couronne d’étoiles.