Corse – Langue corse : la révolution culturelle est en marche

La langue corse utilisée dans tous les actes institutionnels et administratifs de la vie publique de l’île. Promue et enseignée de façon systématique depuis la maternelle jusqu’à l’Université. Il s’agit là d’une révolution culturelle qui n’est plus seulement portée et soutenue par les nationalistes. Cette semaine, l’assemblée de Corse s’empare à bras-le-corps du sujet, et nul doute que l’hémicycle territorial servira de caisse de résonance pour se faire entendre jusqu’à Paris, puisqu’une révision de la Constitution sera nécessaire à la mise en application d’un statut d’officialité. Les termes même de statut et d’officialité, qui donnaient des boutons d’urticaire il n’y a pas si longtemps à la classe politique traditionnelle, sont désormais prononcés sans aucun tabou. Que l’on soit favorable, hostile ou partagé, il n’y a plus de barrière intellectuelle à les évoquer.

L’ancienne majorité avait posé les premiers jalons de la promotion de la langue corse, personne ne pourra le contester. Celle qui a repris le flambeau donne un nouvel élan des plus audacieux. La volonté politique du pouvoir territorial actuel s’est déjà manifestée de manière concrète. Les personnels et les crédits ont doublé en l’espace de quelques mois à peine. Et la Corse s’apprête à rejoindre, comme membre à part entière, le NPLD (Network to Promore Linguistic Diversity), le réseau de promotion de la diversité linguistique.

« Ce qui sera entrepris ne le sera pas au détriment de la langue française. La langue corse doit être appréciée comme un facteur d’intégration, pas de rejet ou de repli » insiste Pierre Ghionga qui défendra le rapport.

Le statut sera posé comme principe, et un comité de rédaction devrait être constitué pour faire des propositions concrètes d’ici la fin 2012.

Rentrer dans un cadre juridique précis

En attendant, il s’agira de progresser dans la formation des enseignants, la diffusion, la promotion et l’observation sociolinguistique. Mais surtout de faire sortir la langue corse du domaine du symbolique et de l’affectif pour la faire entrer dans un cadre juridique précis et contraignant. Un objectif qui sera en même temps un parcours d’obstacles à la fois politiques, psychologiques et juridiques. L’article 75 de la Constitution française est trop laconique, se limitant à reconnaître les langues régionales comme appartenant au patrimoine national. Il faudra qu’elle aille beaucoup plus loin pour valider la démarche de l’assemblée de Corse. Du boulot supplémentaire pour la commission, qui n’en manque déjà pas, de Pierre Chaubon, chargée des adaptations législatives. Ce sera en même temps un énième test pour le gouvernement sur sa volonté politique de faire franchir à la Corse un nouveau palier sur l’échelle de l’autonomie, comme l’est la récente demande de transfert de compétences fiscales dans le domaine des successions. Parallèlement, François Alfonsi, député européen nationaliste, travaille actuellement à une proposition de résolution qui sera soumise à la Commission européenne sur la sauvegarde des langues minoritaires menées de disparition.

Mais si les décisions politiques, et à tous les échelons, sont primordiales, il faut encore que soit perceptible l’adhésion de la société civile insulaire. C’est-à-dire de la majorité silencieuse. Et le silence, même en langue corse, reste le silence…

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