(Unità Naziunale, publié le 30 avril à 19h02) Le 19 avril 2018, le Comité Vérité Justice a écrit à Emmanuel Macron, président de la République française pour demander l’ouverture des archives sur les assassinats de militants indépendantistes restés impunis ou ayant été couverts par l’amnistie.
Voici la lettre
Comité Vérité Justice
BP 1525
98890 PAITA (Nouvelle-Calédonie)
Mail : comite.veriteknky@gmail.com
À
Monsieur le Président de la République française
Emmanuel MACRON
Nouméa, le 18 avril 2018
Objet : Comité Vérité Justice & demande d’ouverture d’archives
Monsieur le Président,
Notre comité, le « Comité Vérité Justice », a été créé en 2011 suite à la commémoration des trente ans de l’assassinat de Pierre Declercq. Cette initiative a été celle des familles des leaders assassinés qui souhaitent connaître la vérité sur ces assassinats.
Notre comité a souhaité rencontrer la inistre de la Justice, Nicole Belloubet, lors de sa visite en Nouvelle-Calédonie fin 20171. L’objectif était de porter à son attention et à celle du gouvernement des demandes effectuées à maintes reprises auprès des représentants de l’État français, et restées jusqu’à récemment sans réponse. Nous souhaitons également porter ses demandes à votre attention.
Depuis 2012, le Comité Vérité Justice a sollicité les représentants de l’État pour demander :
- La réouverture et l’accès aux dossiers qui ont fait l’objet de l’amnistie ;
- La possibilité de consulter les archives des ministères de l’intérieur, des DOM-TOM, et celles de l’armée, de la Direction Centrale du Renseignement Intérieur (DCRI), la synthèse des Renseignements généraux sur la Nouvelle-Calédonie, et le Fonds Foccart pour la période 1981 à 1990 ;
- La levée des secrets-défense pour les affaires qui nous intéressent.
Ainsi, depuis 2012, nous avons soumis notre demande aux personnes ressources suivantes :
- Tous les candidats à l’élection présidentielle de 2012 ;
- Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, lors de sa visite en Nouvelle-Calédonie en juillet 2013 ;
- Le Président de la République, François Hollande, lors de sa visite en Nouvelle-Calédonie en novembre 2014 ;
- Une note a été remise par le Groupe UC-FLNKS et Nationalistes lors du Comité des signataires de février 2016 ;
- Deux lettres au Ministre de la Justice, Jean-Jacques Urvoas, en décembre 2016 et mars 2017 ;
- Une lettre à la Ministre des Outremer, Ericka Bareigts, en décembre 2016 ;
- Une lettre au Premier ministre, Bernard Cazeneuve, en décembre 2016 ;
- Une lettre à la Ministre de la Justice, Nicole Belloubet, en décembre 2017.
Il y a quelques semaines, notre comité a demandé à rencontrer le Haut-commissaire de la République française en Nouvelle-Calédonie, Thierry Lataste, pour évoquer ces demandes. Monsieur Lataste nous a reçus lors d’un entretien. Des pistes ont pu être discutées avec lui mais celles-ci ne nous satisfont pas entièrement et jusqu’à ce jour il n’y a rien de concret.
Il nous paraissait donc primordial de communiquer au Président de la République notre demande. D’autant que vous avez récemment fait des déclarations dans le sens de la recherche de la vérité pour l’affaire Thomas Sankara. Notre comité souhaite qu’un geste dans le même sens puisse être effectué pour la Nouvelle-Calédonie et les leaders indépendantistes assassinés dans les années 1980.
De plus, nous avons appris que vous souhaitez vous rendre à Ouvéa le 5 mai pour la commémoration des trente ans de la grotte d’Ouvéa. Sachez, Monsieur le Président, que notre comité considère qu’un déplacement aussi symbolique de votre part, à Ouvéa, le jour de l’exécution des dix-neuf militants indépendantistes kanak à la grotte n’est pas acceptable s’il n’est pas accompagner d’un geste dans le sens de la vérité et de la justice. Il ne peut y avoir de réconciliation ou de pardon sans vérité et sans justice pour les familles des assassinés.
Votre prédécesseur, François Hollande, a eu des mots qui sont malheureusement restés lettres mortes en ce qui concerne la Nouvelle-Calédonie. En effet, en juin 2014, à l’occasion de la remise du « prix Maurice Audin, pour les mathématiques », celui-ci a déclaré concernant l’assassinat de cet instituteur à Alger en 1957 que :
« depuis mon entrée en fonction, j’ai fait de l’exigence de vérité la règle à chaque fois qu’il est question du passé de la France. »
Comme vous le savez, des demandes similaires d’ouverture d’archives ont été acceptées pour l’affaire Pouvanaa et pour l’affaire Justin Catayee.
Nous souhaitons qu’un engagement et un geste similaires de vérité et d’ouverture d’archives soient faits pour la Nouvelle-Calédonie. Dans ce sens, notre comité souhaiterait rencontrer l’un de vos conseillers lors de votre venue en Nouvelle- Calédonie.
En vous remerciant de votre attention, veuillez agréer, Monsieur le Président, l’expression de notre très haute considération.
Pour le Comité Vérité Justice
La présidente Diana MACHORO et Le vice-président Dönemwa Darewa Kagnapa DIANOU
1. Le Comité Vérité Justice n’a pas rencontré la Ministre mais les conseillers présents.