(Unità Naziunale – Publié le 25 avril 2018 à 16h03) L’hypothèse d’un nouveau site d’enfouissement des OM à proximité de Ponte Leccia vient de relancer le feuilleton du dossier sans fin du traitement des OM en Corse.
170.000 tonnes enfouies en 2017. Après une année 2016 qui avait réussi à « inverser la courbe » (-10.000 tonnes par rapport à 2015), marquant un premier succès des incitations à renforcer le tri par les collectivités, 2017 n’a pas poursuivi la baisse et a produit le même tonnage que l’année précédente. La faute –un peu- à l’accroissement de la fréquentation touristique qui produit mécaniquement des déchets supplémentaires, mais la faute – surtout – à la faiblesse des politiques de développement du tri à la source.
Le Syvadec, l’Office de l’Environnement et les grandes Collectivités productrices, sont en échec. Leurs déclarations d’intention restent sans passage à l’acte à l’échelle du problème posé.
Actuellement deux sites enfouissent l’ensemble des déchets collectés en Corse, Vighjaneddu et Prunelli di Fium’Orbu Leurs capacités de stockage cumulées, renforcées par des arrêtés préfectoraux, est de 138.000 tonnes par an. Mais leur durée de vie est limitée, et la différence avec les tonnages réels est absorbée par une anticipation des quantités prévues les années suivantes, ce qui raccourcit d’autant leur durée de vie. A vitesse grand V, on se rapproche de leur saturation. Et la Corse continue de crouler sous les déchets !
Deux projets mobilisent la CAPA et la CAB, les deux plus gros producteurs de l’île, pour des installations de sur-tri censées débarrasser les ordures brutes avant enfouissement de leur fraction valorisable. Pourquoi pas, mais ces dispositifs sont longs à mettre en place, lourds à financer, et leur efficacité ne sera au rendez-vous qu’à condition de remplir un préalable : les alimenter avec des OM débarrassée des matières fermentescibles qui polluent les OM en vrac et empêchent la séparation des flux.
Est-ce possible ? La Communauté de Communes de Calvi Balagne en a apporté la preuve en collectant les biodéchets et en les envoyant au compostage avec succès depuis deux ans. Une troisième saison commence, mais le centre de compostage, installation pourtant facile à mettre en place, est toujours positionné à cent kilomètres de Calvi ! Et encore heureux qu’il existe !
Mais à part ce volontarisme salutaire, qui démontre contre vents et marées que c’est possible, la question des bio-déchets est restée inchangée ou presque dans toutes les autres collectivités de Corse.
La Sardaigne, qui n’est pas le « champion » du secteur (au quatrième rang pour l’Italie), trie et recycle 450.000 tonnes sur les 750.000 tonnes de déchets produits, près de 60%. En Corse on plafonne à 20%, et encore ! La principale société qui assure le tri de ces déchets (AM Environnement) pour leur valorisation par le recyclage dans les filières du continent a subi un terrible sinistre l’an dernier et s’interroge sur son avenir. D’autant que le goulot d’étranglement des transports maritimes, faute de rotations suffisantes, se fait sentir qui bloque les remorques chargées qui n’ont plus assez de places disponibles pour aller et venir sur les navires de la DSP. Si le tri venait enfin à décoller en Corse, on a là un point d’étranglement de la filière qui se fait déjà sentir.
Dans le contexte de la saturation accélérée des deux centres d’enfouissement encore en activité, les projets fusent pour en ouvrir de nouveaux. On a parlé de rouvrir Tallone où un nouveau casier a été aménagé mais n’a jamais pu ouvrir faute d’accord avec la municipalité et avec les collectifs d’habitants. Projet avancé, puis gelé. Autre projet à Giuncaghju dans un site improbable sur les rives mêmes du Tavignanu. Projet abandonné. Projet en région ajaccienne : véto de la DGAC en raison d’un risque aviaire.
Même sort pour des projets d’impact pourtant sans commune mesure : le plan de création des déchetteries est en panne, les centres de compostage des déchets verts ne se réalisent pas ou peu, et il n’en existe toujours pas à proximité des deux grandes villes, des projets bien acceptés sont bloqués administrativement par l’Etat tatillon comme à Cargèse, etc…
Bref, à quand l’Etat tatillon, à quand les peurs injustifiées, à quand de réels problèmes environnementaux, à quand l’instrumentation politicienne, tout reste bloqué. La Corse va dans le mur !
François Alfonsi
24 avril 2018