Quelle reconnaissance statutaire Des langues régionales en république ? Par Dominique Bucchini, président de l’assemblée de Corse. Le 17 mai dernier, l’Assemblée de Corse adoptait le projet de statut de co-officialité et de revitalisation de la langue corse. Il s’agit d’une date symbolique pour l’avenir de la langue corse.
En effet, ce statut aurait d’importantes conséquences dans les différents domaines de la vie publique. Il vise à garantir l’emploi officiel du français et du corse à parité sur le territoire de la Corse et, pour y parvenir, entend encourager l’emploi du corse par tous et dans tous les domaines. Chacun se verra garantir l’accès à la connaissance et à la pratique du corse et les pouvoirs publics auront le devoir de faire respecter les droits des locuteurs. Ainsi – sans sous-estimer le temps et les moyens nécessaires –, nous pourrons édifier une société bilingue, dans laquelle les institutions, l’enseignement, les entreprises, les médias utiliseront paritairement les deux langues. Les citoyens pourront les employer indistinctement et sans discrimination dans toutes leurs activités. Ce vote est l’aboutissement d’un long processus marqué par plusieurs délibérations de notre Assemblée depuis 1983. Partant de positions parfois éloignées, nous avons su nous rassembler pour voter à l’unanimité le plan d’aménagement et de développement linguistiques 2007-2013. Et si certains élus ont toujours des réserves sur le principe de la co-officialité, il n’est pas indifférent qu’aucun ne se soit prononcé contre le projet de statut. Le groupe des élu-e-s communistes et citoyens du Front de gauche a voté favorablement, dans le droit-fil d’une démarche ancienne. Dans cette promotion du corse où le bilinguisme fait notre richesse, les communistes ont, des années 1930 à aujourd’hui, tenu toute leur place. Dès 1985, nous popularisions la revendication de la co-officialité, à partir des thèses de Jean-Baptiste Marcellesi apportant « une contribution décisive à la revendication linguistique ».
Si le vote de l’Assemblée de Corse exprime une volonté largement majoritaire, nous avons conscience des obstacles – juridiques et politiques – qui demeurent. Qu’une telle évolution statutaire puisse faire débat, c’est compréhensible. D’abord parce que, si les langues régionales ont finalement été inscrites dans la Constitution, c’est à l’article 75 et sans réelle portée normative, tandis que l’article 2 de la Constitution stipule que « la langue de la République est le français ». Au-delà de l’état actuel du droit, il existe, en France, y compris à gauche, une certaine conception liant langue, nation et République, considérant qu’au principe d’indivisibilité de la République correspond l’usage d’une langue unique et que la promotion des langues régionales affaiblirait le français, en particulier face à l’anglais. Ce n’est pas à cette conception uniformisatrice, improprement attribuée aux Jacobins, que nous nous référons mais à une autre tradition du mouvement ouvrier, plus démocratique, nourrie de culture populaire ouverte à la diversité linguistique. Celle de Jean Jaurès plaidant pour l’apprentissage des langues méridionales ou du basque ; de Marcel Cachin, engagé avec force dans la défense de la langue bretonne ; celle d’Antonio Gramsci, qui recommandait « de tout cœur » que les enfants apprennent et parlent le sarde. Devrais-je ici rappeler les initiatives des parlementaires communistes pendant l’entre-deux-guerres et le fait que le dernier grand projet de loi sur les langues régionales ait été porté, en 1988, par notre regretté camarade Guy Hermier ?
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by @Lazezu
Revue de Presse et suite de l’article :
sur Corse Matin, sur Alta Frequenza, sur RCFM, Sur Corsica, Sur le Journal de la Corse, Sur Paroles de Corse
Sur Alcudina, sur Corsica Infurmazione/Unità Naziunale, sur France 3 Corse, Sur Corse Net Info (CNI)
Corsica Infurmazione: l’information de la Corse, des Réseaux sociaux et des Blogs politiques [Plateforme Unità Naziunale]