Yvan COLONNA est déclaré coupable pour son appartenance à une association de malfaiteurs, sa participation à l’attaque de la gendarmerie de PIETROSELLA, le 6 septembre 1997, aux infractions concernant les gendarmes PANIEZ et l-IIERNAUX commises à cette occasion et à l’assassinat du préfet Claude ERlGNAC perpétré le 6 février 1998 à AJACCIO, ces crimes et délits étant en rapport avec une entreprise terroriste.
L’accusé a contesté formellement toute implication dans ces faits, mais les débats ont permis de mettre en évidence les éléments suivants:
Le groupe dit« des anonymes », qui est à l’origine des actes reprochés, s’est constitué en 1997, ses membres indiquant avoir voulu s’élever contre les dérives du mouvement nationaliste auquel ils avaient appartenu précédemment et commettre des actions à caractère exceptionnel, susceptibles de provoquer une réaction favorable de l’Etat français à leurs revendications.
Contrairement à ses dires, Yvan COLONNA, qui n’a jamais contesté ses convictions nationalistes, faisait, à l’évidence, partie de ce groupe.
En effet, il connaissait de très longue date deux de ses principaux membres, à savoir son ami d’enfance, Pierre ALES SAND RI, et Alain FERRAND l, avec lesquels il avait milité de nombreuses années et dont il partageait pleinement les engagements indépendantistes.
La dénonciation anonyme, même infondée, dont tous trois ont fait l’objet, en 1994, à l’occasion de la tentative d’assassinat de Pierre POGGIOLI, illustre leur proximité dans le combat politique.
Il admet aujourd’hui, pour la première fois après sept années de procédure, avoir été approché par Pierre ALESSANDRI pour adhérer à ce groupe, ce que ce dernier confirme, mais il ne fournit pas d’explication plausible quant à son refus de l’intégrer et de participer aux actions que le commando projetait de commettre.
Le voyage effectué à Paris par Pierre ALESSANDRI, Alain FERRANDI et Yvan COLONNA, en septembre 1998, est une preuve supplémentaire de leur lutte commune.
En effet, ce séjour, présenté comme étant d’agrément mais,en réalité,dénué de toute motivation sérieuse, a été particulièrement bref, coûteux, dissimulé aux proches et exceptionnel dans la vie des intéressés.
En outre, il coïncide avec l’envoi d’une lettre postée à Aléria annonçant de nouvelles actions et mentionnant, pour la première fois, le numéro de la seconde arme dérobée à PIETROSELLA.
Enfin, le courrier adressé par Yvan COLONNA, au cours de sa fuite, le 19 décembre 2000, au journal nationaliste le U RIBUMBU exprime son adhésion totale aux actions violentes du mouvement clandestin, qu’il qualifie d’actes de résistance contre l’Etat français.
La participation de l’accusé au,x actions reprochées au groupe des « Anonymes» dans la présente procédure est établie par sa mise en cause formelle devant les magistrats instructeurs, en présence de leurs greffiers, pour les deux séries de faits considérés.
Ces mises en cause, réitérées pendant de nombreux mois, ont émané non seulement des autres membres du commando, assistés de leurs conseils, mais également de leurs épouses et compagnes, entendues en qualité de témoins par les juges d’instruction. Il en ressort qu’Yvan COLONNA a assuré le guet lors de l’attaque de la gendarmerie de PIETROSELLA et a tenu le rôle du tireur lors de l’assassinat du préfet Claude ERIGNAC.
En effet, les membres du commando ont livré un récit précis, circonstancié et cohérent des faits et de la participation de l’accusé à ceux-ci, dont l’étude approfondie à l’audience démontre qu’il est conforme à la réalité et ne peut résulter ni de pressions policières suggérant une manipulation, qui serait gratuite, ni d’un désir de vengeance à son égard, quel qu’en soit le motif.
Ainsi, à PIETROSELLA, le 6 septembre 1997, le rôle de guetteur dévolu à Yvan COLONNA, tandis que les quatre autres membres du commando sur place se chargeaient de neutraliser les deux gendarmes et de faire exploser le bâtiment, concorde en tous points avec la description faite par ceux-ci de leur agression.
De même, à AJACCIO, le 6 février 1998 , conformément aux décisions prises par le commando lors des réunions préparatoires, Yvan COLONNA, porteur d’une perruque blonde et de gants en tissu, a tiré sur le préfet Claude ERIGNAC -sous couvert d’Alain FERRANDI, lui même porteur d’une perruque brune, les delLx hommes étant protégés par Pierre ALESSANDRI, situé plus bas dans la rue Colonna d’ Omano-, l’accusé ayant utilisé, puis abandonné sur place, l’une des deux armes dérobées à PIETROSELLA en signature de l’acte collectif du groupe des « Anonymes », comme préalablement prévu.
Si des rétractations ont eu lieu ultérieurement, elles ont été particulièrement tardives et laconiques et, pour certaines, opportunément effectuées après l’envoi, par Yvan COLONNA, au journal U RIBUMBU, de la lettre du 19 décembre 2000, aux termes de laquelle il proteste de son innocence.
Les explications données pour justifier les mises en causes faites de prime abord auprès des magistrats instructeurs ont considérablement évolué au fil des actes d’instruction et des procès.
Ainsi, ont été tour à tour invoqués à ce jour des manoeuvres et pressions policières, la nécessité de protéger les familles du commando, la rancoeur éprouvée par ses membres à l’égard d’Yvan COLONNA, tantôt considéré comme un lâche, tantôt suspecté d’être l’informateur de Bernard BONNET, la volonté de minimiser les responsabilités de chacun et, enfin, la nécessité de sauver une hypothétique seconde équipe.
Ces revirements de dernière heure, après l’observation, pendant un temps considérable, d’un silence obstiné se prêtant à toutes les interprétations possibles, manquent, à l’évidence, de crédibilité.
A cet égard, les déclarations de Pierre ALESSANDRI, qui a finalement prétendu -après avoir été définitivement condarnné- être celui qui avait tiré sur Claude ERIGNAC, sont incompatibles avec les constatations réalisées à l’occasion du transport de la Cour sur les lieux du crime, notamment, au regard des indications des balisticiens et du médecin légiste, lesquelles n’excluent aucunement qu’un tireur d’une taille d’environ 1,70 mètre ait agi alors que la victime, alertée par les deux premiers coups de feu tirés, a été atteinte tandis qu’elle courait, courbée, comme l’a vue un témoin, afin d’échapper aux tirs.
De plus, son affirmation d’avoir été en possession, sur lui, des deux armes dérobées à PIETROSELLA au moment des faits, soutenue pour la première fois à l’audience, est dénuée de sens.
Il en va de même des dires de Martin OTTAVIANI qui a déclaré à l’audience qu’il était sorti de son véhicule pour se rendre en bas de la rue Colonna d’Ornano, ce qui est contraire à ses précédentes déclarations et à celles des autres membres du commando, aux termes desquelles il était exclusivement chargé d’assurer la fuite des auteurs à plusieurs centaines de mètres de là.
De surcroît, ces rétractations ne sont pas unanimes: ainsi Jeanne FERRANDI, qui a fait des déclarations précises quant au retour de son mari, à leur domicile commun, après l’assassinat du préfet, accompagné d’Yvan COLONNA et de Pierre ALESSANDRI, a invoqué auprès du magistrat instructeur en toute fin d’information, une amnésie opportune consistant à ne pouvoir ni infirmer ni confirmer ses déclarations antérieures, avant de se réfugier dans un silence protecteur à l’audience.
Pour sa part, Valérie DUPUY, qui a rappelé, lors de l’audience, avoir toujours dit toute la vérité, a maintenu ses déclarations quant au départ de leur domicile de Didier MARANELLI, dans l’après midi du 6 février 1998, avec son véhicule dont il a retiré le siège-enfant au motif qu’il devait transporter des passagers, et quant à la visite totalement exceptionnelle d’Yvan COLONNA postérieurement aux faits d’assassinat du préfet, qu’elle a immédiatement liée à ceux-ci.
Par ailleurs, les mises en cause dont Yvan COLONNA a fait l’objet sont corroborées par l’étude, à l’audience, des éléments de téléphonie exploités par les enquêteurs d’où il ressort que Didier MARANELLI, situé aux abords de la préfecture lors du départ de Claude ERlGNAC, était en relation avec Alain FERRANDI, lui-même sur les lieux au moment des faits, ce qui confirme leurs déclarations sur le déroulement de leur action.
De même, il apparaît que Marcel ISTRlA a appelé Alain FERRANDI, le 7 février 1998, à 5 h 33, comme l’a indiqué Jeanne FERRANDI qui précisait qu’ensuite de cet appel, Pierre ALESSANDRI et Yvan COLONNA étaient partis dans le maquis, puis revenus quelques heures après à son domicile. Enfin, les appels de Stéphane COLONNA, en fin de matinée de ce même jour, successivement adressés à Pierre ALESSANDRl et à Alain FERRANDI, ce dernier contactant aussitôt Pierrette SERRERl, compagne d’Yvan COLONNA, établissent que le frère de l’accusé, inquiet de l’absence de celui-ci au lendemain de l’assassinat du préfet et résolu à obtenir de ses
nouvelles, se rapprochait naturellement des principaux membres du commando, définitivement condamnés pour ce crime.
Enfin, les déclarations des témoins oculaires de la scène de crime à AJACCIO, qui affirment ne pas reconnaître en la personne d’Yvan COLONNA le tireur, doivent nécessairement être appréciées avec les plus grandes réserves au regard du grimage des auteurs, de la rapidité du déroulement des faits, de leur ancienneté, de la position de ces témoins par rapport à la scène et de la qualité de l’éclairage urbain.
L’attitude d’Yvan COLONNA tant lors de l’arrestation des membres du commando, qu’à la suite de sa propre interpellation, démontre également sa participation au,x faits.
Le 21 mai 1999, il a communiqué par téléphone à cinq reprises avec Martin OTTAVIANI, à l’évidence au sujet des interpellations intervenues le jour même, alors qu’ils ne s’étaient jamais contactés de la sorte auparavant.
Se sachant surveillé, il a, dans un premier temps, simulé une activité normale, puis procédé à un retrait bancaire de 30.000 F, inférieur à sa demande, sous prétexte d’aider sa compagne Pierrette SERRERl dans son commerce, bien que, d’une part, aucun versement de ce type au profit du restaurant de celle-ci n’a été relevé, que, d’autre part, leur relation était conflictuelle depuis plusieurs mois et qu’enfin, cette dernière n’a pas initialement évoqué ce prêt.
Ce retrait était manifestement destiné, dans sa quasi-totalité,à assurer sa fuite.
Au soir du 22 mai 1999, il a, en compagnie de son frère Stéphane et de son beau-frère, Joseph CAVIGLIOLI, donné une conférence de presse visant à les innocenter à la suite de la parution d’un article dans le journal LE MONDE.
Les journalistes présents à l’audience ont souligné qu’Yvan COLONNA était celui qui s’était le plus vivement justifié -alors que son beau-frère était visé au premier chef- déclarant notamment qu’il avait peut-être le « profil» mais qu’il faudrait « le prouver ».
Aussitôt après,Yvan COLONNA a pris la fuite pendant plus de quatre années, malgré l’appel de son propre père l’invitant à se présenter à la justice.
Interpellé le 4 juillet 2003 en possession, notamment, d’une grenade, d’un chargeur approvisionné et de cagoules, l’accusé, face aw( charges recueillies à son encontre, a refusé délibérément de fournir
ses emplois du temps des 6 septembre 1997 et 6 février 1998, ce qu’il n’a consenti à faire qu’à la fin des informations.
A l’audience, il persiste à taire le nom de la personne l’ayant accompagné dans la montagne, qui aurait, pourtant, pu conforter ses affirmations quant à la recherche alléguée de chèvres égarées, comme celui de la personne l’ayant informé des recherches dont il faisait l’objet.
Les emplois du temps qu’il a finalement fournis reposent sur ses horaires de travail habituels, qui restent aléatoires, sur les déclarations de membres de sa famille nécessairement incertaines au regard du temps écoulé et sur celles de témoins entendus plus de dix ans après les faits, lesquelles sont dépourvues de toute fiabilité.
En outre, Pierrette SERRERI a affirmé au cours de la procédure qu’il n’avait jamais été question qu’Yvan COLONNA garde son fils au cours de la soirée du 6 février 1998.
Enfin, ces derniers éléments sont en contradiction avec les mises en cause ci-dessus rappelées, dont la pertinence est pourtant établie de façon décisive par le contenu de deux lettres adressées en juin 1999 par Pierre ALESSANDRl, alors en détention et mis en examen, au propre frère de l’accusé.
Des termes de celles-ci, il ressort que Pierre ALESSANDRI, soucieux de la réaction de Stéphane COLONNA quant à sa mise en cause de l’accusé, indique avoir fait, en avouant, un choix humain plutôt que militant, dans le but de dégager la responsabilité des personnes non concernées, telles les femmes et Stéphane lui-même, non sans se demander si, par sa fuite, Yvan COLONNA n’avait pas choisi une solution préférable.
Il est manifeste que ces deux courriers, rapprochés de l’ensemble des éléments exposés ci-dessus, valident défmitivement la participation d’Yvan COLONNA aux faits de PIETROSELLA en qualité de guetteur et à l’assassinat du préfet Claude ERlGNAC en qualité de tireur.
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