L’envoi d’une lettre de menace de mort au préfet de Corse lui enjoignant de ne pas faire démolir des établissements de plage construits illégalement sur le domaine public maritime (DPM), ravive la « guerre des paillotes » entre l’Etat et les propriétaires et gérants de ces installations.
Menace anonyme
La missive anonyme menaçant le préfet Patrick Strzoda de lui « régler (son) compte » est arrivée le 17 janvier au palais Lantivy à Ajaccio, siège des préfectures de Corse et de Corse-du-Sud. Le corbeau, qui dénonce notamment « la corruption et la prévarication » en Corse, enjoint le plus haut représentant de l’Etat dans l’île de surseoir à faire appliquer des décisions de la justice administrative envers cinq établissements de plage illégalement édifiés sur le Domaine Public Maritime au sud d’Ajaccio.
Protection renforcée
Toutes les pistes, y compris celle d’un déséquilibré, sont envisagées sur l’origine de la lettre, mais la menace, révélée par la journal Corse-Matin, est tout de même prise au sérieux à la préfecture. Le dispositif de protection du préfet assuré notamment pour sa sécurité rapprochée par des policiers du Service de protection des hautes personnalités (SPHP) du ministère de l’Intérieur, a ainsi été renforcé.
La PJ enquête
Le parquet a ordonné l’ouverture d’une enquête confiée à la police judiciaire. La lettre manuscrite de quelques lignes a été confiée à des spécialistes de la politique technique et scientifique, chargés d’effectuer des analyses graphologiques et d’y prélever de l’ADN et des empreintes digitales.
Pas de commentaire
M. Strzoda n’a fait aucune déclaration sur cette lettre, dont l’envoi n’a suscité aucun commentaire mercredi en Corse, comme à Paris. Le corbeau, qui demande au préfet de ne pas faire démanteler les paillotes incriminées, fait allusion dans sa lettre à deux prédécesseurs de M. Strzoda.Il mentionne ainsi le préfet Bernard Bonnet, limogé et condamné après avoir faitincendier clandestinement par des gendarmes, en 1999, une paillote proche d’Ajaccio, et son prédécesseur Claude Erignac, assassiné le 6 février 1998 par un commando nationaliste.
Endiguer le crime
Les propriétaires et gérants de cinq paillotes dans le collimateur de l’Etat avaient été mis en demeure par la justice administrative de démonter leurs installations et de remettre la plage en état avant le 15 janvier. Après avoir d’abord refusé de le faire, certains ont commencé à effectuer ces travaux. Trois de ces établissements sont installés sur la rive sud du golfe d’Ajaccio. Les deux autres se trouvent plus au sud, sur la plage de Cala d’Orzu, où l’ex-préfet Bonnet en avait fait incendier un troisième, toujours debout, la tristement célèbre paillote « Chez Francis » . Le propriétaire avait été accusé dans des tracts anonymes retrouvés sur place d’être une « balance des flics ». Les établissements de Cala d’Orzu sont en cours de démantèlement. Sur les trois autres sites de la commune de Coti-Chiavari, sur la rive sud du golfe d’Ajaccio, des travaux de démontage ont plus ou moins avancé, selon les cas. M. Strzoda a clairement indiqué jusqu’à présent que le nécessaire devrait être fait « avant le printemps, sinon c’est l’administration qui le fera. »
Deux jours avant la visite du ministre de la justice
L’avocat d’un collectif de défense de ces « paillotiers », Me Stéphane Recchi, s’est insurgé contre la lettre de menace, soulignant qu' »un tel courrier ne peut que nuire aux intérêts de (ses) clients alors que les deux parties étaient en voie de régler le différend ». L’envoi de ce mystérieux document a été révélé deux jours avant une visite à Ajaccio de la ministre de la Justice Christine Taubira. Elle fera notamment le point jeudi avec les magistrats et les responsables de la police et de la gendarmerie sur la mise en oeuvre de dispositions pénales spécifiques pour la Corse, adoptées pour tenter d’endiguer le crime organisée et les assassinats.
Suite et source de l’information
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