Pour Yvan Colonna, le courrier adressé à Pierre Alessandri, l’un des membres du commando responsable de l’assassinat du préfet Erignac, est un montage, réalisé à partir de sa véritable correspondance en prison.
Enfin… Après la bataille de procédure engagée par ses avocats, Yvan Colonna s’est lui-même exprimé sur le courrier menaçant qu’il est censé avoir écrit. L’existence de cette lettre de quatre pages avait été révélée le 27 mai.
Son exposé très construit, tel qu’il l’a livré à la cour d’assises de Paris ce jeudi, tient en trois points.
1. Il n’est pas l’auteur de cette missive même si elle porte bien son écriture. « Quand j’ai vu cette lettre, je me suis dit: « C’est mon écriture, ce sont mes mots, ce sont mes expressions. Mais je l’affirme solennellement: [depuis mon incarcération] je n’ai jamais écrit à Pierre Alessandri, ni à personne de sa famille. Je n’ai jamais eu de contacts avec les membres du commando. Jamais. Jamais », assure Yvan Colonna.
2. Il s’agit donc d’un faux dont il ne s’explique pas l’origine.Selon lui, le montage a été réalisé à partir de bribes de phrases, émanant de sa propre correspondance. « Depuis huit ans que je suis en prison, j’écris énormément […] J’ai forcément employé des termes peu élogieux à l’égard de certaines personnes. […] Tout ce que j’ai à l’intérieur de moi, ça sort de temps en temps. Je suis persuadé que ces paroles là, elles sont quelque part », explique Colonna. Il fait notamment allusions aux courriers en corse, relus et archivés par l’administration pénitentiaire…
3. Pour autant, il n’est pas loin de penser comme l’auteur de ces lignes. Et il le dit de vive voix aux intéressés. »Depuis douze ans, je subis des accusations, des mensonges, des demi-vérités, des revirements? […] C’est vrai, je vis avec la rage, la haine même. Est-ce qu’il y a un mot plus fort que la haine? Ca me ronge. De temps en temps, il faut que ça sorte », confesse Yvan Colonna.
Il aurait par exemple exigé de son fils qu’il ne salue plus celui de Pierre Alessandri, avant de réaliser l’absurdité d’une telle situation.
Extrait de cellule, Pierre Alessandri, justement, vient expliquer à la barre qu’il n’a jamais reçu une telle missive et que sa famille ne subit aucune pression. D’ailleurs, il « n’imagine pas un seul instant, connaissant son parcours humain et politique, qu'[Yvan Colonna] ait employé ces mots. »
Restait à entendre Alain Ferrandi, traité de « merde » dans ce courrier que personne n’a écrit et que personne n’a reçu. Une audition expresse. « Je ne réagis pas », tranche en fronçant les sourcils ce militant nationaliste, condamné à perpétuité pour l’assassinat du préfet Erignac.
Yvan Colonna entend clarifier la situation, lançant à son ancien ami avant qu’il ne regagne sa cellule: « J’ai la rage, la haine, ça dépend des jours pour ce que vous m’avez fait tous… [il a été mis en cause lors des gardes à vue et durant une partie de l’instruction par des membres du commando et leurs épouses qui se sont rétractés depuis] Comme il était hors de question pour moi de dire ces choses devant une cour d’assises, je voulais que tu le saches avant que tu t’en ailles. »
Il y a des jours comme aujourd’hui où les écrits s’envolent et les paroles restent.
Revue de presse du dossier Procès Colonna : http://www.lexpress.fr/actualite/societe/justice/yvan-colonna-s-exprime-sur-la-lettre-versee-a-son-proces_1001099.html