#Corse – « Corte, et après ? » [Ghjurnate di Corti]

Début août, Corsica libera créait l’évènement en faisant s’asseoir des responsables de droite et de gauche à la tribune des Ghjurnate internaziunale. Deux mois plus tard, que reste-t-il de l’initiative cortenaise ? La suite pourrait s’écrire à l’Assemblée de Corse, qui s’apprête à se pencher sur l’avenir institutionnel de l’île. Mais aussi dans le cadre du congrès du PS et de la bataille pour l’élection du président de l’UMP.

La politique insulaire se détermine-t-elle à la tribune de Corte, haut lieu de l’indépendantisme ? Pour provocatrice qu’elle soit, cette question n’en est pas moins légitime. Depuis leur retour en grâce aux territoriales de 2010, les dirigeants de Corsica Libera ont transformé un rendez-vous qui ronronnait gentiment en évènement politique majeur, comme à la plus belle époque – à la différence que la partie se joue désormais sur le terrain des idées et du débat démocratique, alors qu’elle n’était autrefois qu’une mise en scène dont le bal était réglé en sous-main par la clandestinité.

Il y a deux ans, déjà, quelques mois après des élections qui avaient constitué une agréable surprise pour les siens, Talamoni s’était placé au centre du jeu politique insulaire, lançant sa proposition choc d’une citoyenneté, avec dix ans de résidence pour pouvoir faire valoir des droits sur la terre de Corse. Une sonde qui a nourri le débat tout au long de ces derniers mois. Cet été, rebelote : en conviant des personnalités qu’on n’avait pas l’habitude de croiser à Corte à cette période de l’année, les indépendantistes prennent à nouveau l’initiative.

L’affiche proposée pour cette 31e édition aura ainsi permis d’entendre un Laurent Marcangeli deviser sur l’autonomie et concéder que la droite insulaire n’avait sans doute pas saisi la nature des évolutions dans l’île depuis Aleria. Dans la bouche du nouveau parlementaire UMP, qui se sent une âme de « révolutionnaire » (!), ce droit d’inventaire résonne comme le signe d’un changement d’époque. À la tribune, également, le conseiller exécutif giacobbiste Pierre Ghionga, le président de la commission des compétences législatives et réglementaires de l’assemblée de Corse, Pierre Chaubon, venu plaider pour une évolution institutionnelle, le président du comité de soutien de François Hollande lors de la dernière présidentielle, Jean-Sébastien de Casalta, ou encore Jean-Martin Mondoloni, le leader d’Une Nouvelle Corse. Sans oublier quelques habitués des lieux – François Alfonsi, Edmond Simeoni…

Mais la plus belle prise des organisateurs, pendant à gauche de Marcangeli, est une femme : conseillère exécutive et membre du conseil national du PS, Emmanuelle de Gentili avait également souhaité honorer l’invitation. En vedette américaine. « Son père n’y serait jamais allé », relève un vieux militant indépendantiste, qui connaît ses classiques. Du coup, face à ce parterre inhabituel, la présence d’un certain Charles Pieri, qui aurait autrefois fait l’événement, aura à peine été remarquée. Signe de temps qui changent ? Certains en sont fermement persuadés.

Ce casting de choix, les responsables des journées ont mis de longs mois à l’élaborer. « Tout ça a été possible parce que les interlocuteurs ont changé : avec une nouvelle droite qui émerge dans les urnes et, évidemment, le changement de gouvernement à Paris », détaille un dirigeant de Corsica libera. Les premières approches avaient été lancées au début de l’année, à l’Assemblée de Corse. « On n’a imposé aucun préalable, ni sur la reconnaissance du peuple corse ni sur la citoyenneté, précise un de ceux qui ont oeuvré pour préparer cette édition 2012. Et puis, ils connaissent Jean-Guy (Talamoni, ndlr). Avec lui, ils savaient qu’ils ne tomberaient pas dans un traquenard ». À la sortie, tout le monde s’est d’ailleurs félicité de l’état d’esprit qui a présidé aux débats. Et chacun des participants de vanter l’accueil, évoquant ici une « grande courtoisie », là « une assistance à l’écoute », là encore… « l’élégance » (!) de la force invitante. Une surenchère d’éloges qui laisse presque sans voix.

« Lorsque l’on m’invite, justifie Emmanuelle de Gentili, je réponds toujours présente partout où il y a un débat démocratique, respectueux des points de vue et des différences. C’était le cas à Corte. » « Ils ont tous été applaudis », fait remarquer en écho un cadre nationaliste. À croire que les Journées de Corte ne sont plus ce… qu’elles étaient. Et que le public, autrefois frondeur, est devenu aussi sage que celui, très comme il faut, qu’on croise habituellement dans les salles des Rotary… À voir le spectacle inédit d’un Marcangeli salué par les applaudissements nourris de l’assistance, certains avaient envie de se pincer pour être sûrs de ne pas rêver.

« En acceptant, on a peut-être donné un beau jeton à Jean-Guy Talamoni, mais en n’y allant pas, ça donne quoi ? », fait mine de s’interroger Jean-Sébastien de Casalta, pour justifier sa présence. Certains, pourtant, ont préféré cette dernière option. Ainsi, ni Jean-Christophe Angelini ni Gilles Simeoni n’ont pris la route de Corte. « Ils ont eu tort de ne pas y aller, juge un participant. À mon avis, c’est une erreur ». Une absence qui aura valu aux modérés un commentaire peu avenant de Talamoni. Dans son discours de clôture, le leader indépendantiste a en effet soldé l’échec des tentatives de rapprochement avec Femu a Corsica, en dépit de la présence d’Alfonsi et de Simeoni père : « Cette proposition ne convient pas au courant dit « modéré », dont nous aurions voulu faire un partenaire privilégié. Nous en avons pris acte ». La main ostensiblement tendue aux modérés une année plus tôt est donc refermée. Et les indépendantistes la dirigent dorénavant vers ceux avec qui, à droite comme à gauche, les modérés ont… discuté pendant des mois, sans donner suite.

La rentrée consommée, deux mois plus tard, que reste-il de l’esprit d’ouverture qui a soufflé sur Corte ? Ce courant d’air peut-il se transformer en un Libecciu puissant capable d’agréger largement autour de la question institutionnelle ? Le dialogue affiché lors de ces Journées est-il un premier pas qui en annonce d’autres, ouvrant « l’ère nouvelle » appelée de ses voeux par Talamoni, ou faut-il le ranger immédiatement au rayon des souvenirs de vacances – à l’image de ces promesses de s’écrire, qu’on se fait la main sur le coeur dans l’euphorie estivale, conscients qu’elles seront aussi vite oubliées, une fois chacun rentré chez soi ? Alors, feu de paille ou dynamique en marche ?

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