Le 14 octobre 2012 (www.unita-naziunale.org) [10h40] : Le processus de paix lié aux accords d’Oslo entre Palestiniens et Israéliens piétine depuis bientôt vingt ans. Et, durant les quelques jours que nous avons passé sur place, il nous est apparu plus menacé que jamais. Un calme apparent s’est installé et la communauté internationale en oublie ses devoirs. Il y a urgence à donner une nouvelle chance à l’espoir.
L’actuel gouvernement israélien est en train de détruire l’espoir de paix né des accords d’Oslo qui avaient abouti à la poignée de mains historique entre Yzhtak Rabin et Yasser Arafat en septembre 1993. Deux ans plus tard, un extrémiste religieux juif a tué le premier ministre israélien, prix Nobel de la Paix, et, presque vingt ans plus tard, cet acte de terrorisme est en passe de réussir son objectif : annihiler toute volonté d’aboutir à une paix réelle du côté d’Israël.
Dans ce conflit de cinquante années, les souffrances et les torts sont certainement partagés, mais il est une réalité politique incontestable, établie sans ambiguïté par les rapports de forces : l’Etat d’Israël est dominant, et le peuple palestinien dominé. Dès lors, la responsabilité de l’ouverture politique est avant tout celle d’Israël. C’est ce qu’avait compris Izhtak Rabin, ce qui lui a coûté la vie, et c’est ce que refuse absolument la classe politique israélienne aujourd’hui.
Nous avons rencontré l’opposition travailliste héritière de Izhtak Rabin et le leader du mouvement Maaretz qui incarne la tradition pacifiste en Israël. L’un et l’autre cèdent désormais au fatalisme, en écartant la question palestinienne du champ politique des futures élections au profit des questions sociales. Ils s’avouent prisonniers de la montée de l’extrémisme religieux juif qui pèse sur la vie politique en confortant le pouvoir du faucon conservateur Benyamin Netanyahu, qui en retour apporte le concours aveugle des pouvoirs publics israéliens aux colonies qui parsèment le territoire de la Cisjordanie où est établie l’autorité palestinienne, ainsi que Jérusalem Est reconnue palestinienne par la résolution de l’ONU de 1967.
À Jerusalem, c’est la municipalité en charge de tout le territoire, mais désignée par les seuls Israéliens, et gouvernée sous pilotage direct de Tel Aviv, qui met en œuvre une véritable politique de ségrégation mise en évidence par cet épouvantable mur de béton qui serpente au milieu des maisons et des paysages. Le pire aspect de cette politique est son insupportable hypocrisie. Derrière des arguments prétextes, censés faire taire les critiques internationales, on met en œuvre un rouleau compresseur bureaucratique inhumain destiné à faire la place aux colons et à expulser un maximum de Palestiniens, de façon à réduire à néant l’espoir contenu dans les accords d’Oslo d’une future capitale pour l’Etat palestinien.
Premier argument prétexte : la sécurité, agitée à tout bout de champ, là pour détruire des habitations et faire passer le mur, ailleurs pour ériger un no man’s land, ou encore pour refuser les services minimaux comme l’évacuation des ordures. Puis, si la sécurité ne peut être invoquée, ce sera l’urbanisme qui sera mis en avant en interdisant toute nouvelle construction au nom des espaces verts, ou en opposant l’absence de document d’urbanisme, dont toute la ville est dotée, à l’exception des zones occupées par les Palestiniens.
Par contre, dès qu’une poignée de colons plus intégristes les uns que les autres décident de s’établir à l’Est, les documents d’urbanisme sont aussitôt réalisés, les espaces verts abandonnés et les permis attribués. Autre avatar d’une persécution bureaucratique manifeste, le motif de fouilles archéologiques qui permet, par exemple pour le quartier de Silwan, en créant de toutes pièces des périmètres à excaver là où se trouvent des centaines de maisons habitées par les Palestiniens, de les expulser.
C’est une véritable machine de guerre bureaucratique qu’Israël met en œuvre avec un cynisme effrayant, face à des populations qui ont pour seuls papiers d’identité des « cartes de résident », révocables à tout moment, alors qu’ils sont nés et qu’ils ont grandi là. À Jérusalem, il est une évidence : la phase de transition n’a que trop duré, et le gouvernement israélien agit en boute-feu irresponsable
Dans le reste des territoires occupés, c’est tout aussi dramatique. L’école palestinienne que nous avons visitée en plein centre d’Hébron, ville administrée par l’Autorité Palestinienne, est dominée par un poste militaire israélien, et, en contre-bas, isolée par des check-point militaires. En effet, une rue entière de la vieille ville est réservée à des colons juifs religieux intégristes.
Les Palestiniens qui habitent alentour doivent se barricader, et pour gagner l’école ou les marchés, les familles passent sous les portiques devant les soldats armés. La tension est insupportable et quand nous avons emprunté à notre tour cette rue, elle n’était peuplé que de militaires et de policiers. Quelle paix peut-on espérer construire en encourageant de telles colonies de peuplement ?
Il y en a des dizaines comme cela, clairsemées au cœur des cités, ou répandues sur tout le territoire de la Cisjordanie, y compris sur les meilleures terres le long du Jourdain, et chaque année il y en a de nouvelles, mises en place par les activistes religieux et soutenues par l’armée d’un Etat d’Israël pourtant officiellement signataire des accords d’Oslo.
Comment faire cesser cette terrible machination politique de la part d’un Etat qui se prévaut du soutien sans faille de la Communauté Internationale au nom de sa nature réputée démocratique ?
Ne faut-il pas tirer la sonnette d’alarme et demander que cesse enfin cette politique d’agression que, volens nolens, l’Europe et la communauté internationale soutiennent ? Dans deux semaines le Parlement Européen votera sur un accord commercial avec l’Etat d’Israël.
C’est l’occasion, en refusant de l’approuver, de lancer un premier message d’alerte. En espérant que la raison l’emporte enfin, et que l’esprit d’Izhtak Rabin revienne enfin raviver l’espoir en Palestine.
François ALFONSI
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