(Unità Naziunale – Lutte de masse – Publié le 9 aout 2022) Des moments forts, il y en aura eu tout le week-end, quoi qu’on puisse en penser, aux Ghjurnate Internaziunale 2022 à Corti.
Le tout résumé en quelques 500 photos sur cet article (armez vous de patience, il y a 2500 photos pour résumé les 40 années des Ghjurnate).
Ligne historique de la Lutte de Libération Nationale.
- Rien que les invités internationaux ont donnée une dimension inégalées à ces journées. Les prises de positions, les discours des invités ont ramenés la Corse dans un positionnement international. La signature entre les différents peuple sans état d’une convention commune, a définitivement internationalisé dimanche la question corse.
- Lors du débat sur Yvan Colonna, il a été mis en avant les responsabilité directe de l’Etat et de ses manquements qui ont conduit inévitablement à l’assassinat d’un patriote corse en prison.
- Josepha Giacometti Piredda, pour Corsica Libera, a rappelé les fondamentaux de la lutte de Corsica Libera : le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes
- Mais les deux dernières interventions du dimanche étaient les plus attendues, celle du Président de l’Associu Sulidarità, Thierry Casolasco, et celle de Petr’antò Tomasi pour Corsica Libera.
Corsica Libera s’est remis en ordre de marche, et appelle à renforcer le mouvement indépendantiste dans les prochains jours, lors de son Assemblée Générale.
Voici le discours de Petr’Antò Tomasi pour Corsica Libera :
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Bona sera à tutte è à tutti,
Dopu à dui anni d’assenza, eccuci di ritornu sottu à i rampali di a citadella di Corti, lochi colmi di a nostra mimoria naziunale, per e nostre 40me Ghjurnate.
À l’orlu di cunclude issi dui ghjorni di dibattiti, di scambii è di sulidarità, vularebbe à nome di noi tutti, ringrazià tutte e militante è i militanti chì dipoi e sittimane si danu di rimenu è chì anu fattu di’ssa 40ma edizione un successu puliticu è pupulare trimendu !
Ch’elli sianu ringraziati dinù tutti i nostri invitati internaziunali vinuti da tanti paesi amichi. Cù a so prisenza fraterna cuntribuiscenu dipoi 40 anni à fà di E Ghjurnate Internaziunale di Corti un appuntamentu di riferenza mundiale di a lotta di i populi per a so libertà.
Tistimunieghjanu dinù aldilà di e nostre cunfine di a so sulidarità à a lotta di u populu corsu. Turnaremu à parlane da qui à pocu.
Infine, vulemu dedicà isse 40 me Ghjurnate à tutti quelli chì anu datu a so vita per ch’ellu campi u populu corsu Hè oghje in a nostra mimoria, Yvan Colonna ,assassinatu in una prigione francese cinque mesi fà. Isse Ghjurnate e vulemu dedicà dinù à i nostri prigiuneri pulitichi chì aspettanu sempre l’ora di a libertà, a vulemu dedicà infine à tutti quelli chì si battenu sempre per a Corsica Nazione, è in particulare à i machjaghjoli di u Fronte à quale avemu sempre purtatu a nostra sulidarità !
Cette 40e édition des Ghjurnate témoigne de la constance et de la vitalité du combat du peuple corse pour son droit légitime à souveraineté, à la liberté, à la dignité, en un mot pour son droit légitime à la vie. Cette édition du retour témoigne également de la capacité du courant indépendantiste à faire face aux enjeux qui se présentent à lui par-delà les épreuves.
La situation que connaît la Corse nous commandait de rejeter avec force l’éphémère sentiment de découragement qui a pu envahir certains d’entre nous les soirs de défaite, car notre combat ne s’arrête pas à des péripéties électorales. À l’inverse, notre histoire nous invite également à relativiser l’euphorie des soirs de victoires, car celles-ci, si importantes soient elles, appelaient encore après elles tant d’autres batailles. Aujourd’hui c’est donc avec lucidité et détermination que les militants de Corsica Libera se présentent en ordre de marche pour contribuer pleinement à l’effort de construction nationale.
Processus historique ?
Notre action, nous la situons incontestablement dans une perspective historique. Mais à l’heure où en politique, et en Corse singulièrement, la moindre initiative est présentée comme une démarche « historique », cette affirmation demande cependant quelques précisions.
À Corsica Libera, nous avons su démontré de façon tangible que nous étions prêts à participer activement à des démarches se situant au niveau de l’Histoire contemporaine de la Corse.
Lors de la décennie passée, nous avons été à l’initiative des grands compromis politiques qui, sous une mandature qui n’était pas nationaliste de 2010 à 2015, ont permis de faire valider démocratiquement nos principales revendications et donc de gagner la bataille décisive des idées. Nous avons soutenu l’initiative de paix du FLNC vers un processus de démilitarisation progressive. Nous avons permis la première victoire électorale des forces se réclamant de la Nation.
Aujourd’hui encore, nous sommes prêts à contribuer à l’émergence d’un véritable processus historique.
C’est-à-dire d’un processus politique qui prendrait pleinement en compte, et dans toutes ses dimensions, la situation de conflit que connaît la Corse depuis plusieurs décennies.
C’est-à-dire un processus politique qui permettrait au peuple corse d’avancer sur le chemin de la souveraineté.
C’est-à-dire un processus politique qui garantirait l’existence sur cette terre d’un peuple qui est aujourd’hui gravement menacé de disparition.
Des discussions sont désormais ouvertes avec Paris. Et le 17 mars dernier le ministre de l’intérieur français Gérald Darmanin ainsi que le Président du Conseil exécutif de Corse, Gilles Simeoni, signaient un protocole qui prétendait marquer l’ouverture d’un « processus à vocation historique ». À l’heure où nous parlons, énonçons les choses clairement : nous sommes très loin du compte.
Les 10 points de Corsica Libera
Alors, depuis Corti à l’occasion de ces 40e Ghjurnate Internaziunale et en présence d’observateurs internationaux, Corsica Libera prend l’initiative de soumettre au débat une proposition de résolution en 10 points. 10 points qui sont incontournables si l’ensemble des parties souhaite aboutir à une véritable solution politique. 10 points sans lesquels il n’y aura pas de processus historique.
La libération des prisonniers politiques et l’arrêt des poursuites.
Par sa portée politique et symbolique, nous situons, pour notre part, cette mesure comme le prélude au processus et un gage de sincérité de la démarche engagée.
La reconnaissance des droits du peuple corse.
Ce deuxième point revêt pour nous une double importance. D’abord, parce que nous avons pris l’engagement avec les dizaines de milliers de Corse qui ont manifesté ces derniers mois, de nous battre pour l’obtention de cette reconnaissance, comme pour la libération des prisonniers d’ailleurs. Ensuite, car de ce point découlent les suivants : le droit de nous doter de nos propres lois et donc de décider de ce qui est juste dans notre pays, le droit à sauvegarder notre langue, le droit de protéger notre terre, le droit d’y vivre et d’y travailler dignement, le droit de gérer nos ressources propres, le droit demain d’accéder à notre pleine souveraineté.
La dévolution du pouvoir législatif.
C’est-à-dire le pouvoir de voter nos propres lois comme cela est le droit commun de la plupart des peuples en Europe et même au-delà. Le périmètre de ce pouvoir législatif étant évidemment évolutif.
La coofficialité de la langue.
C’est une mesure d’urgence à l’heure où la transmission de la langue entre générations ne concerne plus que 2% des familles et alors que l’appareil d’Etat, du gouvernement jusqu’au Conseil Constitutionnel, s’emploie à entraver l’enseignement par immersion. Ci tocca à rimette a nostra lingua à a piazza chì ghjè soia in stu paese.
La citoyenneté corse, fondée sur une durée de résidence permanente, afin réserver l’accès au foncier (le statut de résident), de prioriser l’accès à l’emploi (la corsisation des emplois) et de constituer un corps électoral légitime.
C’est une mesure de salut public. En effet, avec une une augmentation des prix du foncier et de l’immobilier de 138% en dix ans, couplée à un phénomène de décorsisation des emplois, les Corses sont progressivement chassés de leur terre par l’installation massive de nouveaux arrivants, par les forces de l’argent de la spéculation. Cette question est une priorité absolue car nous n’accepterons pas de disparaître.
Le statut fiscal et social
Contrairement à ce que sous-entendent les propos infantilisants du ministre Darmanin sur le refrain bien connu « que ferait la Corse sans l’argent de la France ? », nous ne demandons pas plus d’aides financières à la France. Nous demandons même précisément le contraire ! Nous revendiquons un véritable statut fiscal social afin de maîtriser notre développement économique et d’assurer un mieux-être social. D’ailleurs, dans ce domaine aussi, contrairement au mythe de la fameuse « solidarité nationale », la dépendance a un coût puisque les dotations, donc les subventions d’Etat stagnent ou reculent alors que les impôts que Bercy prélève en Corse augmentent considérablement et de façon constante (117% entre 2004 et 2016 selon l’économiste Guillaume Guidoni). En réalité la pseudo « générosité » de la France à notre égard consiste donc à nous faire les poches et, en plus, à nous donner la leçon !
La justice sociale
Les forces sociales de ce pays ont eu raison de dire que l’évolution politique doit s’accompagner d’un volet social. Cela a toujours été la position de Corsica Libera qui n’a jamais dissocié libération nationale et libération sociale. Durant la dernière mandature à l’Assemblée de Corse, l’ensemble des observateurs a d’ailleurs reconnu notre investissement à ce sujet. Plusieurs projets que nous avons porté sur la lutte contre le chômage de longue durée (Territoire Zéro Chômeur de Longue Durée), l’expérimentation du revenu universel, ou encore le micro-crédit ont été alternativement bloqués par Paris et ignorés par la majorité en Corse. Ces questions doivent figurer au processus.
L’urgence écologique
C’est l’un des grands défis de notre temps. Dans le prolongement de la « déclaration d’urgence climatique et écologique » que nous avons fait voté par l’Assemblée de Corse en 2019, la Corse doit disposer des moyens nécessaires à la préservation de sa biodiversité et à sa souveraineté énergétique.
Le droit à la santé
Est-il acceptable que la Corse soit le dernier morceau de terre sous domination de l’Etat français à être privé d’un Centre Hospitalier Universitaire (CHU) ? Dans les années 1970, les Corses étaient privés de leur droit à l’éducation. Ils se sont battus et ont obtenu la réouverture de l’université. De la même façon, dans les mois qui viennent, nous devrons nous mobiliser et arracher ce droit fondamental qu’est le droit à la santé.
L’abolition des « lignes rouges » par l’abrogation du protocole du 17 mars.
Arrêtons nous un instant sur ce dernier point qui est décisif. En effet, nous avons face à nous un obstacle majeur à la prise en compte de ces différents points. Le protocole signé le 17 mars dernier entre Gérald Darmanin et Gilles Simeoni fixe explicitement une « ligne rouge », à savoir le refus de « créer deux catégories de citoyens ». Pour les représentants de l’Etat français, cette formule signifie clairement le refus d’engager des négociations sur les questions fondamentales que sont par exemple : la reconnaissance des droits du peuple corse, la coofficialité, la citoyenneté corse. Sans compter que la question de l’amnistie des prisonniers est également écartée.
En conséquence, Corsica Libera demande solennellement l’abrogation du protocole Darmanin-Simeoni et l’ouverture de négociations sans aucun préalable ni lignes rouges.
Surenchère ou fidélité ?
D’aucuns considèreront peut-être que ces 10 points de Corsica Libera constituent une forme de surenchère politique. Répondant à cette observation par anticipation, nous formulons publiquement une série de questions auxquelles il conviendra à chacun d’apporter une réponse claire :
- Est-ce de la surenchère que de défendre des délibérations qui ont été votées à la majorité, voire à l’unanimité, sous des mandatures qui n’étaient pas nationalistes ? Pour être plus explicite, est-ce de la surenchère que de défendre des délibérations qui, pour la plupart ont été votées sous la mandature de Paul Giacobbi entre 2010 et 2015 et même, concernant la reconnaissance du peuple corse comme « communauté historique et culturelle », sous la mandature de Jean-Paul de Rocca Serra en 1988 ?
- Est-ce faire de la surenchère que de défendre la citoyenneté corse alors que des dispositifs équivalents existent déjà à Tahiti ou en Kanaky ?
- Est-ce de la surenchère que de se battre pour le droit de voter nos propres lois à l’instar de millions d’européens ?
- Est-ce de la surenchère de que défendre l’expression du suffrage universel ?
- Est-ce faire de la surenchère que de demeurer fidèles aux mots d’ordres derrière lesquels nous avons défilé dans les rues de Corse il y a quelques semaines seulement ?
Enfin, est-ce se prêter à de la surenchère que de demeurer fidèles aux serments que nous avons prêtés devant les Corses et sur les textes les plus sacrés de notre imaginaire national et ainsi refuser le parjure ?
Pour notre part, nous répondons sans ambiguïté aucune « non » à l’ensemble de ces questions.
Sans ces 10 points, il y aura certes des discussions comme nous en avons connu par dizaines mais elles n’auront rien d’historiques, sauf à se payer de mots, à mentir aux Corse et in fine à se mentir à soi-même !
Mobilisation et internationalisation
En conséquence, comment aboutir à la prise en compte de ces 10 points ?
Par le débat politique bien sûr et nous sommes prêts à dialoguer avec l’ensemble des forces de notre pays afin de défendre le bien fondé de ces propositions.
Mais aussi, et surtout, par la mise en oeuvre d’un rapport de force politique, c’est-à-dire par la poursuite de la lutte nationale. Car c’est bien à la suite des manifestations massives et déterminées de ces derniers mois que l’Etat français a été contraint de consentir à quelques concessions. Il en sera de même demain.
À ce sujet, nous avons observé avec beaucoup d’intérêt la récente mobilisation de désobéissance civile menée par nos frères basques. Cette mobilisation exemplaire correspond par bien des aspects à la stratégie que Corsica Libera a défendu pour un rapport de force populaire et institutionnel structuré et qui a été refusée par nos anciens partenaires politiques autonomistes. Mais, il y a quelques jours, à l’initiative du groupe majoritaire « Fà populu inseme », l’Assemblée de Corse a voté une motion de solidarité à l’initiative prise au Pays Basque que Corsica Libera soutient évidemment.. Forts de cette adhésion nouvelle quoique tardive, nous invitons donc l’ensemble des forces politiques ayant voté cette motion à appliquer ici et maintenant les stratégies qu’elles soutiennent désormais au-delà de nos frontières !
Pour finir, quelques mots sur l’internationalisation de notre combat.
Nous tirons au moins deux enseignements de nos deux jours d’échanges.
Premier constat : la revendication d’indépendance ne fait plus peur. Partout, bien qu’à des rythmes différents, elle progresse. L’indépendance des peuples n’est plus synonyme de radicalité mais de normalité. À vrai dire, dans un monde fait d’interdépendance c’est bien l’autonomisme, conçu non pas comme une étape vers la souveraineté mais comme l’acceptation perpétuelle d’une domination ,qui apparaît désormais comme une revendication à remiser au magasin des antiquités.
À Corsica Libera, l’accession à la pleine souveraineté demeure notre objectif. Pour l’atteindre, il nous faudra convaincre, par la pédagogie, que l’option indépendantiste est non seulement un chemin praticable mais que cette option est souhaitable pour le mieux-être des Corses. Il s’agira, dans chaque domaine, de démontrer ce qu’est pour la Corse le prix de la dépendance. Nous avons commencé à le faire sur la question des bases militaires, nous avons évoqué tout à l’heure le coût de la dépendance fiscale ou sanitaire et ce travail va continuer dans les semaines qui viennent.
Second constat : l’internationalisation du combat du peuple corse est également une clé afin de passer outre les blocages et les lignes rouges parisiennes. Cette dimension internationale que nous avons historiquement portée mais qui demeure pour l’heure encore sous exploitée constitue également l’une de nos orientations. La déclaration commune signée avec les autres peuples sous domination de l’Etat français en atteste.
Propositions en 10 points, mobilisations, internationalisation voici les perspectives que nous traçons pour la rentrée politique qui sera, notamment, marquée par notre prochain Congrès et qui nécessitera la participation active de toutes celles et tous ceux qui continuent de croire dans le projet national.
Enfin, nous voudrions clôturer ces Ghjurnate en insistant une dernière fois sur la qualité exceptionnelle des délégations internationales présentes cette année à Corti. Nos invités sont le symbole du combat universel pour la liberté des peuples, cette aspiration à la liberté qui est ici notre patrimoine commun.
Je voudrais appeler, dans un premier temps, à la tribune Moetai, Steeve, Tematai et Jean-Victor qui ont brillamment remporter les élections législatives de juin respectivement à Tahiti et en Guyane. Ils sont la preuve vivante que l’on peut représenter dignement son peuple au sein d’institutions qui nous sont hostiles sans se croire obligés de jouer aux bons élèves de la République française, sans être des “tièdes” pour reprendre tes mots mon cher Moetai ; que l’on peut, au contraire, siéger au Palais Bourbon avec un discours de fermeté à l’égard des principes sur lesquels on a été élu et en portant fièrement les aspirations à l’indépendance nationale !
Vi dumandu di sciaccamanalli ! Nous savons que nous pourrons compter sur eux pour y répercuter nos combats !
Nous demandons maintenant à l’ensemble des délégations internationales de nous rejoindre au moment où nous nous apprêtons à entonner notre hymne national, U Diu vi salvi Regina !
Sciaccamanemu à Catalunya, Euskal Herria, A Scozzia a fiera Alba, A Chanacchia, A Cabillia, A Sardigna, U Biafrà, l’Artsakh, è dinù Tahiti è a Guyana!
E viva a libertà per a libertà di i populi !
E viva a lotta di liberazione naziunale ! Quella sia a manera, chì e sustinimu tutte !
E viva a Corsica Nazione ! E viva a Corsica Libera !
Discours de Petr’antò tomasi dimanche 7 aout lors des GHJURNATE INTERNAZIUNALE