Le 17 avril prochain, c’est la journée internationale des prisonniers politiques (<– lien ici)
(Unità Naziunale – Lutte Internationale – Publié le 8 avril 2021 – Source) 4 ans se sont écoulés depuis cette journée historique du 8 avril 2017 où grâce à l’impulsion et la volonté de la société du Pays Basque, le désarmement civil de l’organisation ETA avait lieu.
Cette journée marque un engagement sans faille, un virage, une nouvelle étape vers la construction des conditions d’une paix juste et durable, dans la recherche d’un nouveau vivre-ensemble. Le manifeste lu ce jour-là, à Bayonne, rappelait que « parce-que la paix n’est pas seulement absence de violence, nos regards se portent sur les victimes (…) Nous voulons que justice et vérité leur soient rendues et leur dire « Non cela ne se reproduira pas ! »
Le contexte actuel sanitaire nous empêche de marquer cette date physiquement, comme nous l’aurions voulu. Car ce 8 avril 2021, coïncide aussi avec les 31 ans d’incarcération effective de Ion Parot, Jakes Esnal, et Unai Parot.
Frédéric Haramboure a obtenu sa libération conditionnelle en octobre 2020. Nous nous en sommes réjouis. Mais ce 17 mars 2021, en cette période de crise sanitaire, nous avons évité l’irréparable, l’irréversible, Ion Parot qui pourrait être en liberté conditionnelle depuis 2005, âgé de 70 ans, a contracté la COVID 19. Il a déposé sa 6e demande de liberté conditionnelle, alors que la précédente lui avait été accordée en première instance !
Cela n’aurait jamais dû arriver ! Cela aurait pu être évité, si Ion Parot comme l’ensemble des prisonnier.e.s, n’étaient pas victimes de législations d’exception. Rappelons que, les prisonnier.e.s soumis.e.s à ce régime, avaient été exclu.e.s des mesures prises par le gouvernement, lors du premier confinement. Ainsi, du fait de cet état d’exception, Ion Parot, Jakes Esnal, Frédéric Haramboure, Josu Urrutikoetxea, Gurutz Maiza Artola et Ibon Fernandez Iradi n’ont pas pu faire valoir leurs droits, malgré leur âge et leur maladie. Ibon Fernandez Iradi, gravement malade a, lui aussi, dû faire face au virus de la COVID 19. Comme dans le cas de Ion Parot, le tribunal d’application des peines lui avait accordé une suspension de peine en 2019, afin qu’il puisse se soigner.
Alors que nous approchons des 10 ans de la Déclaration Internationale d’Aiete, comment comprendre cette dérogation permanente au droit commun ?
Le temps passe et le temps presse ! Nous ne pouvons plus accepter cette double réalité qui s’oppose : d’un côté une société basque dynamique et inventive, garante du changement radical survenu dans le contexte politique du Pays Basque, et de l’autre un Parquet national antiterroriste anachronique, aux logiques passéistes et belliqueuses. La paix c’est aussi le respect des droits de l’Homme et du citoyen !
Le 17 mai 2019, le Président de la République française déclarait : “Le Pays Basque est pour moi un exemple de résolution de conflit et de sortie des armes. (…) Le devoir de l’Etat est d’accompagner le mouvement. Nous ne devons pas faire bégayer l’Histoire, il faut l’accompagner. »
Alors, pourquoi en ce 8 avril 2021, devons-nous encore, nous confronter à ces réalités qui se contredisent ?
Nous le rappelons et le revendiquons haut et fort : construire la paix c’est résoudre les causes et les conséquences du conflit. Résoudre les conséquences du conflit, c’est réparer les douleurs, d’abord par la reconnaissance de leur existence, quelles qu’elles soient et d’où qu’elles viennent. Mais résoudre les conséquences du conflit, c’est aussi activer les outils juridiques, existants ou adaptés, qui offriront des perspectives autres que la prison.
Le chemin vers la paix passe par la résolution de la question des prisonnier(e)s au Pays Basque, comme partout où les conflits d’hier, ont pu être dépassés par une volonté d’avenir en commun, plus forte que les sentiments légitimes générés par les souffrances d’hier. Le sort immédiat des prisonnier(e)s est un élément constitutif de ce changement radical de perspective.
Rappelons-le, lors de la Conférence Internationale d’Aiete, Kofi Annan, ancien Secrétaire Général de l’Organisation des Nations Unies, déclarait : “Nous devons aider les populations de ces sociétés fracturées à travailler ensemble pour se réconcilier, réparer et construire des institutions fortes, fondées sur la gouvernance démocratique, le respect des droits de l’homme et l’État de droit. Et dans cette tâche, tous les acteurs sociaux doivent assumer leur rôle : gouvernement, autorités locales, chefs religieux, patronat, organisations non académiques et médias. Enfin, comme le chemin vers la paix est long et difficile, j’ai aussi appris qu’il est essentiel de gérer les attentes des citoyens.”
Le temps passe et le temps presse ! Il est nécessaire que Ion Parot et Jakes Esnal soient parmi nous immédiatement ! C’est pour cela que, malgré le contexte sanitaire et les contraintes qu’il engendre, nous continuons et continuerons à nous mobiliser avec un premier rendez-vous important, le 26 juin prochain. Ce jour-là, nous marcherons pendant 31 kilomètres représentant les 31 années d’incarcération qu’ils ont vécues, de Bayonne à Saint-Jean-de-Luz, pour clamer nos revendications et exprimer la volonté de ce territoire. Parce qu’ici comme ailleurs, Monsieur le Président de la République française, ce chemin vers la paix ne pourra passer que par la gestion des attentes du Pays Basque.