UN’ BASTA PIU’ A’ DI’ BASTA !
AVRIL 2012 : 6 ASSASSINATS EN 16 MOIS DANS LE FIUMORBU. « Le premier, celui de Marco Paolini, date du jour où l’Assemblée de Corse consacrait sa session à la question de la violence. Le lendemain, vendredi 17 décembre 2010, j’intervenais pour « parler », en tant qu’élu du Peuple Corse et élu de Ghisunaccia. Je crois opportun, au nom de Femu a Corsica, de diffuser l’essentiel du propos, non sans vous avouer notre peine immense. « «Ce pays est en train de changer de culture»
« Comme élus de la Corse, aujourd’hui réunis ici, comme en tant que citoyen, on ne peut pas rester muets, moi le premier, au lendemain de débats que l’on a initié ici, dans cette assemblée, sur la violence. Aujourd’hui, il n’y a pas d’effervescence médiatique, il n’y a pas de représentants de l’Etat, il manque beaucoup de nos collègues, il manque beaucoup de monde dans les tribunes, mais il nous reste quand même la parole. Alors je prends la parole, avec mes mots simples, pour vous dire qu’il faut s’opposer à l’horreur, cette horreur qui continue, poursuit sa route inexorablement. Aujourd’hui cette horreur touche une famille de mon village ; ses enfants ont été mes élèves, et le sont toujours pour le plus petit. C’est d’ailleurs lui, qui a 16 ans, qui a trouvé son père hier soir, mort, en entendant les détonations devant la porte de la maison.
Ce drame, vous pouvez l’imaginer, dans notre commune, et même au-delà, dans notre région, a ébranlé l’ensemble des habitants à un point que vous ne pouvez pas soupçonner. Pas simplement parce que Marco était un acteur du monde économique, mais parce que c’était surtout pour nous un bâtisseur. C’était le président du club de football de Ghisunaccia : un club auquel il vouait toute son énergie, tout le temps qu’il avait, et d’ailleurs, hier soir, il était encore au stade à 20 heures. Quelques minutes avant sa mort, il était en train de monter un dossier de subvention pour les jeunes. C’est quelqu’un qui va manquer dans notre village ; en même temps, ce que je voudrais dire, pour ramener aussi le débat ici, c’est que toutes nos incantations, tous nos débats, n’arrêtent pas et n’arrêteront pas les balles ; pas plus que la bonne conscience des représentants de l’Etat.
Ce pays est en train de changer de culture. Il change de culture et celle qui prévaut aujourd’hui, elle porte l’instinct de mort et elle tue n’importe lequel d’entre nous, aujourd’hui, demain, après-demain, n’importe où, au nom de n’importe quoi et même au nom de rien. La vie d’un homme ici ne vaut plus rien (…).
Alors sans pousser dans un développement d’exposé – des débats on en aura encore malheureusement – je crois qu’il est indispensable pour nous ici de nous inscrire dans la durée. Il faut absolument réagir fortement et durablement.
L’heure est sans doute venue, je pense, à analyser que le pays d’où l’on vient, celui des nôtres, di i nostri vechji, ne sera plus jamais le pays où l’on va. À nos exhortations à la paix, celles d’avant-hier par exemple, qui répond? La loi des armes.
C’est pourquoi, je reviens à avant-hier, je crois qu’il est important aujourd’hui, rapidement, d’amorcer une initiative populaire d’ampleur. Je crois qu’à un moment donné, il faut mobiliser les Corses, au-delà des murs de l’hémicycle, au-delà des colonnes des journaux, au-delà des écrans de télévisions. Je crois que nous nous devons d’avoir un sursaut qui s’appelle l’espoir. Il est encore là.
Mobiliser la Corse, mobiliser les Corses, les mettre dans la rue, pourrait, à notre avis, être une étape. De toute manière, et j’arrête, au nom de ce que nous sommes et de la Corse, non sans évoquer tous ces « élus de proximité » qui ressentent encore plus « le poids » de cette situation (…). Aujourd’hui, nous avons l’impérieux devoir d’intervenir pour ouvrir, comme le disait récemment quelqu’un qui est à nos côtés, une voie apaisée et sereine, pour toutes nos générations à venir.
Saveriu Luciani, Elu Territorial de Femu A Corsica
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