« Le rapport de l’IGF est fondé sur une idée éculée, la #Corse coûterait cher à l’Etat » @JeanGuyTalamoni

(Unità Naziunale Publié le 21 octobre 2017 à 19h01) La position du Président de l’Assemblée de Corse, Jean-Guy Talamoni, sur ce rapport : 

Lors de la réunion de demain avec Bruno Lemaire, Ministre de l’économie et des finances, sera présenté et débattu le rapport qui vient d’être rendu par l’Inspection Générale des Finances. Le gouvernement n’est aucunement obligé d’en mettre en œuvre les préconisations. Il a d’ailleurs d’ores et déjà annoncé qu’il en refuserait certaines (fiscalité sur le vin et TVA sur la construction neuve). Pour notre part, nous lui demanderons d’écarter largement ce rapport qui, sous une forme moins provocatrice, s’inscrit s’agissant du fond dans la lignée de tous ceux qui l’ont précédé depuis des décennies.

Ce rapport de l’IGF est fondé sur une idée éculée : la Corse coûterait cher à l’Etat.

En outre, le rapport compare la Corse à la Creuse, rapprochement incongru pour ne pas dire davantage.

Ce rapport de l’IGF prétend engager une politique fiscale en Corse sans retenir l’insularité, la démographie, la saisonnalité ou le caractère montagneux de l’île, ce qui constitue un déni de réalité et une négation manifeste des engagements internationaux de la France (article 174 du traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne).

Le document est fondé sur une argumentation spécieuse et contradictoire : la Corse serait trop riche pour prétendre à un statut fiscal mais elle serait trop pauvre pour pouvoir exercer ses compétences en responsabilité. Trop pauvre, pour promouvoir des innovations sociales lui permettant de disposer d’une véritable autonomie fiscale.

En résumé, la Corse étant à la fois trop riche et trop pauvre, elle ne saurait disposer de mesures particulières. Elle devrait donc voir sa fiscalité s’aligner sur le droit commun malgré le faible niveau de vie réel des Corses et les difficultés de nos entreprises. Et cela au mépris du droit européen.

Ce rapport ne peut pas servir de base à la future politique fiscale de la Corse.

L’alternative à ce document calamiteux est le projet de Statut fiscal et social que nous défendons, bénéficiant de l’adhésion des chambres consulaires et des autres forces vives de Corse.  C’est ce que nous exposerons à l’occasion de la réunion de demain.

Nous joignons au présent communiqué une note développant notre argumentation relative aux principaux éléments du rapport de l’IGF.

Président de l’Assemblée de Corse, Jean-Guy Talamoni.



RAPPORT IGF, POUR UNE ECONOMIE CORSE AU XXIème SIECLE : PROPOSITIONS ET ORIENTATIONS.

Le titre présente une intention louable avec laquelle les auteurs du rapport n’ont pas tardé à se départir car à moins qu’il ne s’agisse d’une imposture, rien de ce qui est contenu dans le document, n’est de nature à construire l’économie corse du XXIème en l’adaptant aux profondes mutations technologiques et écologiques.

Les propositions annoncées dans les intitulés de paragraphes sont parfois en décalage avec les contenus.

Enfin, les deux propositions qui seraient votées dans le Projet de loi de finances sont celles qui avaient déjà été évoquées par Bruno Le Maire en juin 2018 lors de sa visite en Corse, portant sur le Crédit d’impôt pour investissements en Corse (CIIC), le Crédit impôt recherche (CIR) et le Crédit impôt innovation (CII).

Le rapport présente donc 24 mesures dont il convient d’analyser la portée.

Analyse des 24 propositions

I/ Les propositions sont-elles de nature à « Accélérer la résorption du désordre foncier » ?

  • « L’accélération de la résorption du désordre foncier » n’est que le rattrapage d’une action dont l’Etat porte l’entière responsabilité. Dans les 7 propositions de l’IGF, le maintien du Groupement d’Intérêt public pour la Reconstitution des actes de propriété en Corse (GIRTEC) s’opère sur le désengagement financier de l’Etat (proposition n°4), en contrepartie de la possibilité de saisine directe par les particuliers dans des conditions, notamment financières, qui restent floues (proposition n°1). Le financement du GIRTEC à l’acte ne semble pas de nature à « accélérer la résorption du désordre foncier ».
  • Organisation des services de l’Etat : plus de géomètres au cadastre (proposition n°5).

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  1. Or la tendance au ministère de l’Action et des Comptes publics est à la
    réduction des effectifs (20 000 en 5 ans).
  2. Le cadastre n’a pas pour fonction de titrer les propriétés. Plus de géomètres au cadastre signifie pour l’Etat plus de personnel pour asseoir l’impôt.
  • Une partie de la Taxe Spéciale d’Equipement (TSE), qui constitue le budget de l’Office
    Foncier de Corse (OFC), serait versée au GIRTEC (proposition n°4). Le rapport élude
    les modalités de remplacement de cette ressource dans le budget de l’OFC ?
  • Proposition d’amender le code général de la propriété des personnes publiques afin
    de rendre opérationnelle la procédure relative aux biens non bâtis vacants et sans
    maître (proposition n°2). Il faudrait plus de précisions. En tout état de cause c’est
    marginal par rapport à l’enjeu.

II/ Les propositions sont-elles de nature à accroître la capacité de production et d’innovation de l’économie corse ?

1/ Le CIIC (proposition n°8)

La mise en conformité du droit français avec le droit communautaire est présentée
comme une proposition de l’IGF.

Par effet mécanique -et seulement par effet mécanique-, il devrait y avoir une
augmentation du nombre de PME potentiellement éligibles au CIIC. Ce n’est pas une
découverte de l’IGF, ce n’est pas non plus une proposition de l’IGF, ni même un cadeau
à la Corse, il s’agit de l’alignement sur la définition entérinée par le Règlement général
d’exemption par catégorie (RGEC) du droit communautaire de 2014, dans lequel
s’inscrit le CIIC. En fait, l’IGF propose avec 4 ans le retard, le respect de la règle
communautaire qui s’imposait à la France. Certaines entreprises corses ont donc été
privées de leur droit en étant exclues du bénéfice du CIIC. Le rapport n’évoque nulle
part les compensations qui leurs sont dues au titre du préjudice subi.

Définition actuelle d’une PME pour bénéficier du CIIC :

– Avoir moins de 250 salariés ;
– Avoir soit un CA < 40 M€, soit un bilan < à 27 M€.
Or pour les FIP, les seuils retenus, conformes au règlement communautaire sont:
– Soit un CA < 50 M€, soit un bilan < à 43 M€ ;
– Pour l’effectif le seuil semble maintenu à 250.

L’IGF propose de ne retenir qu’une seule définition, celle utilisée pour les Fonds
d’investissement de proximité (FIP).

2/ Reconduite de la mesure de gel de franchissement de seuil qui serait inscrite dans
la futur loi « Pacte ».

Si au titre de l’exercice clos entre le 31 décembre 2017 et le 31 décembre 2018,
l’entreprise PME ou TPE dépasse les seuils d’effectif, elle ne perd pas le bénéfice de
son exonération au titre de l’exercice en cours et des deux suivants.

3/ CIR et CII (proposition n°9)

L’Assemblée de Corse a demandé l’alignement sur les taux de l’Outre-Mer. Il s’agit de
savoir à quel niveau le gouvernement compte placer le curseur. Le rapport prend soin
de laisser le bénéfice de l’annonce au ministre.

4/ Agriculture (propositions n°10 et 11)

Les propositions n’ont pas vocation à développer la production agricole pour
encourager le « produire et consommer » sur place.

III/ Les contribuables corses sont-ils des privilégiés ?

A propos du bénéfice du FIP pour les contribuables corses, page 19, le rapport souligne
que « les contribuables investissant pour une durée minimale de cinq (sic) ans dans un
FIP Corse, bénéficient d’une réduction d’impôt (RI) sur le revenu de 38% ». Il poursuit
: « Seuls 1,5% des montants versés en 2016 proviennent de contribuables résidant en
Corse ». A contrario, les 98,5% restants sont versés par des contribuables résidant hors
de Corse. Le rapport ajoute : « …2016, année pour laquelle le montant versé a atteint
102 M€, correspondant à un montant total de RI de 38 M€ (cf tableau 5, page 20) ». Il
convient de préciser que l’obligation d’injecter les fonds levés par les FIP dans
l’économie corse, est limitée à 70%, soit, en l’occurrence 70 M€.

Les 38 M€ pour 2016 sont certes un avantage fiscal spécifique à la Corse, mais la
réduction d’impôt sur le revenu n’est pas consentie au profit des seuls contribuables
corses, très largement minoritaires au regard des capitaux investis. Si l’on en croit les
chiffres de l’IGF, les contribuables corses bénéficieraient d’une réduction de 1,5% de
38 M€, soit 570 000 €.

IV/ Les propositions sont-elles de nature à promouvoir un tourisme plus équilibré ?

Voeux pieux ou serpent de mer, l’allongement de la saison touristique n’est pas non
plus une trouvaille innovante de la mission de l’IGF. Mais il est posé comme un enjeu
fondamental (page 23). Afin de parvenir à promouvoir un tourisme mieux réparti sur
l’année, l’IGF propose :

  • D’une part de moduler voire supprimer la taxe sur les transports pour faire baisser
    les coûts (proposition n°12), d’autre part de stimuler l’offre de transport hors saison
    (proposition n°12). Donc faire venir des compagnies low cost ?
  • Puis le rapport enchaîne d’autres propositions.

– Investir dans des infrastructures de formation dans les métiers du tourisme
(proposition n°13). Sur proposition du Président de l’Assemblée de Corse, l’Assemblée
a installé un comité de pilotage pour la création d’une école hôtelière. Contre toute
logique par rapport au thème central du paragraphe, cette proposition concerne
également le numérique et les énergies renouvelables, faisant fi des formations déjà
dispensées par l’Université. L’empathie des rapporteurs à l’égard de la Corse les
conduit donc à proposer une vision stratégique du développement de la Corse, à la
place des Corses. Le paragraphe 2.3.2. page 24, semble être un paragraphe «fourretout» ne serait-ce que par son intitulé « investir dans la formation professionnelle
notamment pour valoriser les métiers du tourisme ».

Ce caractère « fourre-tout » est confirmé par la proposition n°14 sur l’AFPA qui arrive
comme un cheveu sur la soupe, AFPA dont une réforme est en cours.

– Suivent le travail de l’INSEE pour faire reconnaître les statistiques élaborées en Corse
par Eurosat (proposition n°15)

– L’exclusion du para-hôtelier du CIIC (proposition n°16), sur lequel l’Assemblée de
Corse a déjà délibéré et sur lequel les députés Pè a Corsica ont déposé un amendement
au PLF 2019.

-Enfin, à un problème économique, la mission de l’IGF répond par le renforcement du
contrôle fiscal sur les locations de meublés de courte durée (proposition n°17). Lorsque
l’on sait que les services fiscaux ne procèdent déjà pas à ces contrôles et que la tendance
de leurs effectifs est à la baisse, on ne peut que douter de l’intérêt et des modalités de
mise en oeuvre de cette proposition.

V/ Les propositions sont-elles de nature à poursuivre les programmes d’investissements publics ?

Elles sont tout au plus de nature à renforcer l’immixtion de l’Etat dans la gestion et les
orientations de la Corse et d’opérer une recentralisation à rebours de l’histoire. Il
reviendrait à l’Etat de déterminer un nombre limité de grands projets structurants
autour desquels il obtiendrait, bien sûr, un consensus politique (proposition n°18).
Après avoir cédé aéroports et autoroutes au privé, le rapport juge que la Corse ne
dispose pas des compétences suffisantes (proposition n°19) en termes d’ingénierie. Il
accuse l’Etat comme les précédentes majorités en Corse de n’avoir réalisé que des «
projets de petite envergure » avec le PEI (2.5.1. page 27). Cela n’est pas faux. Les
travaux du comité d’évaluation des politiques publiques de l’Assemblée de Corse qui
ont porté sur le sujet de 2015 à 2017 vont dans le même sens.

La volonté de substituer l’Etat à la Collectivité de Corse apparait à plusieurs reprises
dans le document :

– Dans la constitution de la « task force » avec les services de l’Etat pour réaliser les
documents d’urbanismes des EPCI (proposition n°6).
– Dans la proposition de fusion AUE et OFC (proposition n°3) alors que ce sont des
organes de la Collectivité.
– Dans la suggestion de supprimer la taxe sur les transports (proposition n°12) alors
que cela relève d’une décision politique de l’Assemblée de Corse.
– Dans les choix de tourisme que devrait faire la Corse (proposition n°12).
– Dans les conseils appuyés quant aux orientations du futur programme
d’investissement.

VI/ Les propositions sont-elles de nature à encourager la concurrence et faire baisser les prix ?

L’IGF veut faire baisser les prix en augmentant les taux de TVA (proposition n°20) !
Elle propose aussi d’éviter les monopoles en offrant sur un plateau le monopole de la
distribution de l’essence aux enseignes de la grande distribution (proposition n°21) sur
lesquelles, qui plus est, l’Etat n’a aucun moyen d’action.

Le rapport se conclut sur la définition d’un « statut fiscal rénové » (page 31) pour «
permettre de mieux accompagner le développement de l’île ». Encore faudrait-il qu’il
y en ait déjà un !

L’affichage est séduisant, « créer ses propres outils de fiscalité », le cadre est pompeux
« renforcer la cohérence des sources de financement de la Collectivité de Corse dans le cadre d’un statut fiscal rénové », mais les propositions sont pauvres : elles ne sont à la
hauteur ni de l’annonce, ni des enjeux.

Selon le rapport, ce statut fiscal « rénové », ces « propres outils » seraient :

– soit des propositions déjà formulées par l’Assemblée de Corse, refusées par
l’Etat et que l’IGF conditionne à l’aboutissement de la réforme constitutionnelle : taxe
sur les camping-cars et de la taxe de mouillage dans les aires marines protégées ;
– soit le transfert d’une fiscalité existante : taxe spéciale sur certains véhicules
routiers (TSVR) ;
– soit le remplacement des droits tabacs par une fraction additionnelle de TVA
(pages 30 et 33) ;
– soit la réforme, voire la suppression de la taxe sur les transports.

Conclusion

  • Ce rapport, plus subtil que les précédents, ne sombre ni dans l’outrance, ni dans
    l’insulte délibérée envers la Corse, comme ceux que l’on a pu connaitre jusqu’à présent.
    Cependant, sous une écriture recherchant l’objectivité, l’obsession de normaliser la
    Corse est toujours sous-jacente, animée par l’idée que l’île bénéficierait de « trop de
    privilèges ». Le seul souci de l’IGF demeure le budget de l’Etat. Par exemple, lorsqu’il
    évoque le désordre foncier, il chiffre le manque à gagner pour le Trésor : 50 M€ par an,
    sans jamais se soucier de l’impact de ce désordre sur le développement de la Corse.
    Les sempiternels développements sur les taux de TVA dérogatoires qui ne
    rapporteraient rien à la Corse et qui coûteraient à l’Etat, sont une fois encore répétés
    avec insistance.
  • La Corse serait toujours incapable de se débrouiller « seule ». Par exemple, on peut
    lire une fois de plus que nous serions incapables d’assurer le niveau des prestations
    sociales si nous mettions en oeuvre notre principe de responsabilité. En revanche, il
    n’est pas mentionné que le système social français est inefficace, intenable
    (endettement de la France en 2017 équivalent à 97% du PIB) et injuste. Pourquoi la
    Corse ne pourrait-elle pas en expérimenter des améliorations ? Par exemple, le rapport
    souligne le « déficit d’ingénierie territoriale constaté auprès de tous les niveaux de
    collectivités territoriales » (§ 2.4.3. page 27). C’est donc parce que les Corses ne
    sauraient pas faire, qu’au nom de la « solidarité nationale », autre nom de la
    recentralisation, l’Etat devrait reprendre les rênes de sa gestion et se substituer aux
    Corses dans le choix des orientations de développement de l’île.
  • Enfin, sous la plume de l’IGF, l’insularité de la Corse est soit niée, soit évoquée pour
    démontrer qu’elle n’est pas une particularité justifiant un traitement fiscal différencié.
    A cela s’ajoute la négation obstinée d’autres réalités physiques et géographiques : Corse n’est jamais envisagée comme une montagne, encore moins comme une
    montagne dépeuplée, ou comme un territoire transfrontalier. (Critères de l’article 174
    du Traité sur le Fonctionnent sur l’Union européenne).

Du point de vue méthodologique, lorsqu’est abordée la situation des entreprises
insulaires, comparaison est faite avec des territoires soit « ruraux » comme la Creuse,
soit ayant une forte activité saisonnière (§ 1.4.3. page 12). La comparaison avec les îles
de la Méditerranée est seulement retenue (Annexe VI) pour arguer que « la Sicile et la
Sardaigne ne bénéficient pas aujourd’hui sur le plan fiscal d’une autonomie
significativement différente de celle des autres régions italiennes ». On semble les
présenter ainsi comme des modèles, tout en occultant leurs possibilités de déterminer
leurs ressources et de façon plus générale, le fait que les compétences des régions
italiennes de droit commun sont très supérieures à celles de la Corse.

Quant à l’autonomie fiscale des Baléares, le rapport la présente comme comparable à
celle des autres régions espagnoles. L’insularité ne justifierait donc en aucune manière
l’obtention d’un statut fiscal adapté. Le rapport se garde bien de reconnaitre la
différence abyssale entre les compétences de ces îles et celles de la Corse. En outre,
l’IGF s’est bien gardée de s’intéresser au cas de Malte.

En résumé, ce rapport est plus subtilement injuste que tous ceux auxquels la Corse a
eu affaire depuis des dizaines d’années. Sous des centaines de pages et derrière des
centaines de chiffres, il ne dit rien de différent, il apporte peu de solutions, il est
toujours animé du même état d’esprit de défiance et d’infantilisation.



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