(Unità Naziunale – 14 janvier 2018 – 16h00) Ié per voi é per i vostri. Mà pè a salvezza di u Populu Corsu è di a so terra, a Pace un pò esse chè quella d’avè fattu ognunu è tutti inseme u nostru duvere di figlioli di stu Populu.
Pour l’heure après Gourault nous attendons Macron. Sa venue fait couler beaucoup d’encre, les commentaires balancent doucement du noir (« pas de coofficialité, pas de statut de résident ») au gris (« officialité » peut être mais sans « co »), « l’autonomie, mais dans le cadre républicain », « l’inscription de la Corse dans la Constitution envisageable »… On espère du Jupiter romain déguisé en sphinx pour la Corse, hologramme du Zeus grec pratiquant volontiers cet art de la métamorphose pour arriver à ses fins, on espère une déclaration, un signe fort qui confirmerait l’idée qu’une porte s’est entrouverte et qu’il n’y a aucune feinte. Du moins il est bon de le dire pour réaffirmer notre volonté de dialogue.
Mais tout le passé doit être présent à notre esprit pour ne pas nous laisser enfumer.
Nous avons un peu plus d’un demi-siècle de lutte, jalonné de trois ou quatre « statuts particuliers » insuffisants, une incantation lancinante au développement économique et à la création d’emplois, par l’entreprise pour les uns ou par le service public pour les autres, avec comme excuse ces dernières années la violence clandestine, excuse qui n’existe plus. Elle s’est auto-dissoute.
La Corse désertifiée jusqu’aux années 60 (160.000 habitants, deux siècles après sa conquête par la France) ne doit rien au hasard. Toutes les autres îles de Méditerranée ont progressé. Pour les besoins coloniaux, guerriers et géostratégiques de l’hexagone, elle n’a été qu’un réservoir d’hommes. Le doublement en un demi-siècle du nombre des habitants (à peu près 320.000 de nos jours) s’est faite sur un Peuple en exil ou vieillissant dans l’île par des flux d’apports divers (continentaux, émigrés de l’ex Empire coloniae..). L’État républicain n’a cessé de manipuler l’opinion et les Corses euxmêmes s’y sont longtemps laissés prendre, cerveaux lavés, ils ont pratiqué l’auto-colonialisme : « la Corse est pauvre… elle a la chance d’appartenir à une puissance riche et généreuse… le sous développement de l’île?… la faute des Corses qui préfèrent être douaniers, gardiens de prisons, de musées, flics ou grâce à l’université républicaine hexagonale, avocats ou médecins… cultiver la terre trop basse pour eux, leur donne mal aux reins…»
J’ai entendu ces bouffonneries proférées comme des vérités pendant toute ma jeunesse et mes études.
La lutte «moderne », celle de ce demi-siècle, a vu l’irruption brusque d’une majorité natios à la CTC. Les clanistes nous balançaient : « présentez-vous aux élections et on verra bien… » Nous l’avons fait mais il a fallu d’abord se battre contre leurs fraudes électorales massives qui faisaient rire tous les chansonniers parisiens. Nous avons largement contribué à assainir le suffrage universel et donc le débat démocratique sans pouvoir réduire le clientélisme, ce qui devient possible avec la gestion institutionnelle que ce suffrage universel nous a accordée.
Il est évident que l’émancipation du Peuple Corse nécessite, va de paire, avec l’approfondissement de la démocratie. « La maison de cristal » de Pasquale Paoli est plus que jamais à bâtir.
Ce sera la base à partir de laquelle, il faudra entreprendre une deuxième étape d’émancipation.
Elle sera peut être moins longue mais elle sera difficile.
Rien n’est acquis tant que nous n’aurons pas les moyens d’agir par nous mêmes en temps réel, donc un statut d’autonomie avec pouvoir législatif, réglementaire et fiscal comme il en est des îles et de bon nombre de régions d’Europe.
Il faut sortir de la situation actuelle de dépendance totale due à la politique de la République des jacobins. La Corse est appauvrie, non développée, vidée. Elle reste un enjeu géopolitique pour la France. Sa vocation touristique évidente ne sert que l’écoulement des marchandises produites à l’extérieur, alimentaires ou pour la construction qui sont subventionnées par l’enveloppe de continuité territoriale. La « vie chère » le reste.
L’enveloppe étouffe la production insulaire comme l’avait fait la cynique loi douanière de 1818 à 1913.
Le jacobinisme reste le fond idéologique de la République.
Jusqu’à preuve du contraire le pacte girondin est un maquillage sinon pour séduire du moins rassurer.
Le Président dûment informé par Madame Corse aura-t-il été mieux orienté ? On va le savoir d’ici un mois. Simu à l’accortu. Il a balisé : pas de coofficialité (peut être une officialité ?), pas de statut de résident (quoi d’autre ?)
Or la coofficialité est une exigence absolue linguistique et non une surenchère démagogique si on veut sauver notre langue. Taper sur Google : « Unesco : Rapport sur les langues minoritaires ». Lire ce rapport et chacun pourra en être convaincu.
Je nous souhaite qu’un maximum de Corses le lisent.