Quand il a été dit que cette institution n’est pas l’apanage de la seule Corse, qu’elle a été une adaptation à des conditions historiques économiques difficiles, on survole certes des caractéristiques importantes.
Dans l’île, avec les Génois d’abord puis ensuite avec les Français, elle a été, sous le contrôle strict, voire sous le carcan et avec le concours intéressé de la tutelle, une donnée majeure de la vie politique.
Dans l’île, à partir de 1950, la donne a été bouleversée car le développement a débuté et s’est prolongé, par la fin de la colonisation en Algérie en 1962 – qui a généré l’arrivée de 17.000 personnes et des flux financiers majeurs liés à cette mutation et à l’arrivée des « Rapatriés » (crédits, investissements, ventes de terre, travaux d’infrastructures, circulation d’argent ….) ; il s’est amplifié par les Trente Glorieuses à partir de 1970.
La Corse a basculé dans un autre monde ; la fraude électorale, classique et gentillette, est devenue une pratique quasi systématique et professionnalisée de tous les clans, plus reconnus que les partis – droite et gauche confondues- pour conquérir les postes d’élus, pourvoyeurs d’emplois et sources d’enrichissement pour certains et surtout de maîtrise des électeurs. La corruption s’est étendue et à mesure que la domination claniste, par ses dynasties, s’enracinait dans une fraude institutionnalisée, la complaisance, la complicité de l’Etat – jamais de sanctions pénales mais un lourd contentieux administratif- devenaient d’autant plus insupportables que la contestation autonomiste est née et s’est amplifiée, durcie dès la décennie 60.
Les clans sont les principaux responsables avec la France qui leur assurait l’impunité totale de leurs méfaits et la domination incontestée du système politique, de la situation catastrophique et des drames de la Corse de 1960 à ce jour ; même si les Corses eux-mêmes portent une part de responsabilité dans cette déchéance Les Statuts à répétition ne visaient en fait qu’à gagner du temps. Jamais, l’Etat n’a tenté d’établir la démocratie car elle aurait signé la mort du système colonial. Mieux, il en combattu férocement la naissance qui s’est effectuée, inévitablement, dans les convulsions et les douleurs, après cinquante ans de luttes pour l’émancipation du peuple corse.
Aujourd’hui, il est possible, de lister, sans être exhaustifs, les méfaits de cette tutelle qui a agi en toute connaissance de cause
- Ils ont été les fossoyeurs de la démocratie dans tous les domaines.
- Ils ont été hostiles ou absents lors des innombrables combats ( Langue, Université, emploi, colonisation agricole et touristique, environnement, Statuts, Arrêtés Miot, précarité, contre les barbouzes de Francia, contre les justices d’exception, très répressives…..) Il suffit de consulter le Powerpoint (1) consacré aux cinquante ans écoulés
Il est instructif, édifiant, accablant.
- Mais le passif le plus important se situe au niveau de l’éthique, de la morale ; ils ont corrompu la Corse, désespéré la jeunesse qui s’est révoltée, dénaturé et rompu le lien social insulaire, solide et historique ; ils ont désespéré par l’iniquité, l’immobilisme l’esprit d’entreprise, les Corses de l’île et de la diaspora ; ils ont figé la Corse dans le passéisme et se sont éloignés de l’humanisme. Tandis que la référence incantatoire à la République hérissait les jeunes générations et éloignait les plus anciens.
La révolte a été soutenue, ferme, diversifiée ; les premiers bourgeons tangibles de la liberté sont apparus, dans l’accession aux responsabilités de la Ville de Bastia en 2014, puis de la Collectivité Territoriale de Corse en 2015 ; et signe d’ouverture et de confiance, le choix à l’unanimité du Président du Conseil Exécutif pour représenter la Commission des îles de la CRPM, en vue de convaincre l’UE de tenir compte désormais des handicaps, liés à l’insularité, aux montagnes… Notre existence et notre combativité sont donc reconnues au plan international.
Aujourd’hui la Corse s’est réveillée et prend conscience et de son retard et de ses immenses atouts pour construire, un Pays de liberté, de dignité, de développement et de paix. Elle doit demeurer vigilante pour ne pas sombrer dans un clanisme dont on aurait ravalé la façade et s’ouvrir largement à l’UE, à la Méditerranée, au monde.
Le peuple corse a subi la négation, frôlé la disparition et l’a démocratie a été à l’épicentre du drame ; il ne retrouvera la liberté que dans et par la démocratie placé enfin à l’épicentre de la résurrection. Le seul atout, la seule solution.
Bastia le 26 Mai 2017
Source Docteur Edmond Simeoni
Président de Corsica Diaspora et Amis de la Corse