À quelques heures du débat parlementaire sur les amendements de M. De Courson : Le Président Gilles Simeoni publiait sur les réseaux sociaux des réflexions du en faveur d’un statut fiscal pour la Corse et son peuple.
Comme pressenti, le référé de la Cour des Comptes, en date du 21 juin 2016, et opportunément rendu public le 12 septembre, a servi de prétexte à des offensives brutales contre les rares particularismes fiscaux dont bénéficie la Corse. La première charge a été menée par M. De Courson, multirécidiviste de l’animosité anti-corse.
En ayant fait adopter nuitamment deux amendements visant les droits de circulation des vins et la taxe spéciale portant sur certains véhicules routiers, et en en déposant un troisième visant à remettre en cause l’exonération de la TVA sur les vins corses vendus sur le marché insulaire, M. De Courson a pris sciemment la responsabilité de fragiliser, voire de ruiner, une filière d’excellence de l’économie corse, ainsi que les emplois directs et indirects qu’elle génère.
Cette manifestation injustifiable d’hostilité a suscité une réponse déterminée, responsable et argumentée, portée d’une seule voix par les acteurs économiques concernés ainsi que par l’ensemble des élus de la Corse, territoriaux ou parlementaires. Cette unité d’analyse et d’action devrait normalement nous permettre d’obtenir le rejet des amendements De Courson lors du vote à intervenir dans quelques heures au Palais-Bourbon. C’est cette même unité qui doit être recherchée dans les combats fiscaux qu’il reste à mener. D’abord en ce qui concerne la fiscalité du tabac. La lutte contre les ravages du tabagisme est noble et légitime.
J’en suis totalement solidaire, en tant que responsable politique et en tant que citoyen. Mais en sollicitant la suppression brutale de la TVA préférentielle dont bénéficie la Corse en la matière, Mme Delaunay porte un double coup à l’île. D’abord en mettant en danger la filière des buralistes, qui représente près de 400 emplois directs, dont plus de 60% en milieu rural et de montagne. Partout ailleurs, la suppression du différentiel de TVA s’est faite par des sorties en sifflet et en mettant en œuvre des mesures compensatoires pour les professionnels concernés. Il serait injuste d’agir différemment pour la Corse.
Au surplus, Mme Delaunay propose de réallouer le produit de la taxe sur les tabacs actuellement perçue CUNSIGLIU ESECUTIVU DI CORSICA Presidenza di u Cunsigliu par la CTC (67 M d’euros) à la CPAM. La CTC serait donc privée d’une ressource fiscale dynamique, remplacée par une subvention fixe. Là encore, cette façon de procéder, contraire à la logique d’autonomie fiscale et de renforcement de ses ressources propres que la Corse a vocation à mettre en œuvre, n’est pas admissible. Nous devons le dire sans excès, mais avec fermeté, et obtenir là encore, par la mobilisation collective, le rejet des amendements de Mme Delaunay. Il nous restera alors à remporter, à la fin du mois de novembre, la mère des batailles : celle pour le maintien de notre régime spécifique en matière de fiscalité du patrimoine, le combat dit de « l’arrêté Miot ». «
En début d’année 2016, ce combat pouvait sembler perdu. Le Gouvernement considérait en effet que le débat sur cette question était définitivement clos en suite des deux décisions de censure du Conseil Constitutionnel. Dans le cadre des discussions entre les institutions de la Corse et le Gouvernement, nous avons dit et répété à nos interlocuteurs ministériels, y compris au plus haut niveau de l’Etat, que l’entrée dans le droit commun, prévue le 1er janvier 2018, n’était pas envisageable. Tout simplement parce qu’elle signerait la ruine de milliers de familles corses, et qu’elle accentuerait les phénomènes de dépossession individuelle et collective. Notre détermination a, in fine, été entendue. Le Gouvernement a accepté le principe d’une prorogation du régime actuel. Restait donc à définir le chemin juridique et politique permettant d’atteindre cet objectif.
En définissant une stratégie commune, en portant ensemble un texte unique validé par tous les parlementaires et élus corses, ainsi que les acteurs de la société civile, nous nous sommes collectivement donnés les moyens d’obtenir un vote majoritaire en faveur d’un texte législatif qui devrait intervenir à la fin du mois de novembre. Nous obtiendrons ainsi à nouveau, en cas d’issue positive, un ballon d’oxygène en matière de fiscalité du patrimoine. Mais ces combats sectoriels, pour importants qu’ils soient, doivent, dès les résultats positifs acquis et confirmés, laisser la place à une démarche plus large, visant à une solution globale et pérenne. En matière fiscale comme dans les autres domaines, les élus de la Corse et le peuple corse tout entier doivent rappeler au Gouvernement, à la représentation parlementaire française, et à l’Etat que la Corse ne demande ni passe-droits, ni privilèges mais simplement la reconnaissance et la prise en compte de ses droits.
Parmi ceux-ci, le droit à un véritable statut fiscal, eu égard à ses contraintes naturelles, insulaires et montagneuses, et ceci conformément à la lettre même de l’article 174 du traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne. Définir le contenu de ce statut en concertation avec l’ensemble des forces vives et acteurs économiques et sociaux, le relier à notre stratégie de développement économique, l’inclure dans une réforme d’ensemble de portée constitutionnelle reconnue par l’Etat et validée par l’Union Européenne : c’est le chantier de fond qu’il nous faut mener à bien dans les mois à venir.
GILLES SIMEONI, PRESIDENT DU CONSEIL EXECUTIF