Le gouvernement actuel arrive en fin de parcours. La présidentielle aura lieu dans huit mois, et d’ici quelques semaines, il ne fera plus qu’expédier les affaires courantes. Désormais, les choses ne bougeront plus qu’à la marge.
Pour Jean Michel Baylet, les ordonnances prévues à la loi NOTRe dont l’article 30 crée la Collectivité Unique de Corse sont bouclées. Elles sont « à prendre ou à laisser », et donc elles seront prises. Principale conséquence : de nouvelles élections auront lieu en Corse en décembre 2017 pour désormais 63 conseillers territoriaux au lieu de 51, et disparition de 52 conseillers départementaux. Onze conseillers exécutifs au lieu de neuf sont prévus, qui pourront retourner sur les bancs de l’Assemblée en cas de démission, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
En janvier 2018, il y aura donc 74 élus en fonction dans une Collectivité Unique, au lieu de 105 aujourd’hui répartis dans trois collectivités. Une seule élection au lieu de trois, et une montée en puissance des Intercommunalités comme élément complémentaire du paysage politique insulaire, en raison de la réforme générale des collectivités territoriales qui étend leurs pouvoirs au détriment des communes. Dans le contexte particulier de la Corse, la suppression des départements leur confère un autre champ pour l’expansion de leurs compétences, par délégation de la Collectivité Unique, et via la mise en place de ce que la loi appelle « Conférence de coordination des collectivités territoriales » et que l’Assemblée de Corse souhaite voir évoluer en « Chambre des Territoires », avec des compétences déléguées, et non plus simplement consultative, à travers l’ordonnance institutionnelle. Mais Jean Michel Baylet l’a annoncé : l’Etat n’ira pas jusque là. Les derniers ajustements se feront désormais à la marge, et le futur paysage institutionnel de la Corse est désormais acté.
Toujours en marge de ce débat institutionnel, figure aussi la question des arrêtés Miot et de comment arrêter la machine infernale lancée en 2OO2 pour arriver à leur suppression définitive programmée pour janvier 2018. Leur avenir ne peut être traité par la loi NOTRe, car ce n’est pas son objet, et leur maintien via la loi des finances se heurte à la jurisprudence rigide du Conseil Constitutionnel. Exécutif, parlementaires corses et gouvernement ont planché pour un autre chemin, via le Code civil. Valls a pris des engagements, tous les représentants élus de la Corse ont construit un consensus à cet égard et le trimestre qui vient sera décisif. Si l’opération est couronnée de succès, l’Exécutif pourra se flatter d’avoir débouché sur un sujet qui, depuis dix ans, accumule les échecs.
Un autre dossier pourrait connaître un épilogue heureux, celui des transports maritimes. Pourtant sur fond d’errance judiciaire et de Beresina économique pour la compagnie SNCM, l’affaire semblait bien mal engagée en janvier dernier, quand l’entreprise reprise par Patrick Rocca voguait contre la Corsica Linea créée par ses concurrents évincés par le tribunal de commerce de Marseille. Faire cesser le bras de fer entre concurrents, ramener tout le monde autour de la table, CMN y compris, et proposer à tous de constituer la compagnie régionale annoncée au programme de Femu a Corsica : ce parcours est déjà un bilan en soi, après six mois, et alors que le dossier avait habitué la Corse à d’autres développements. Le modèle proposé, inspiré de l’Ecosse, a convaincu en Commission à l’Assemblée de Corse, et devrait probablement en faire autant en session plénière. L’Exécutif n’a pas encore réussi son pari, mais il a déjà réussi à démentir tous les cassandres qui prédisaient un échec fracassant sur ce dossier semé d’embûches.
Tout aussi semé d’embûches est le dossier des ordures ménagères. Mais l’accord intervenu en fin d’été pour résoudre la crise des centres d’enfouissement est là encore un succès manifeste. Le plan voté au printemps pour « renverser la courbe » des déchets en Corse prend toute sa place. Rarement les collectivités n’ont été aussi réceptives, à l’instar de la Balagne ou du Pumonte où elles se sont engagées, parfois au cœur même de la saison touristique, dans une campagne destinée à recycler les déchets alimentaires de la restauration, secteur tellement producteur de bio-déchets en saison.
Dans la région de Portu, nous avons converti à ce tri salutaire quarante huit restaurateurs sur les cinquante concernés. Ce qui permet de tordre définitivement le cou à l’antienne constamment répandue : les restaurateurs ne trieront jamais, les gens refusent de faire des efforts, etc.. A Portu, ils l’ont fait, à 95%, y compris en plein mois d’août !
Tout cela nous donne quelques raisons d’espérer. L’horizon de la loi NOTRe ne permet pas d’envisager grand chose, mais le parcours politique depuis la victoire de décembre dernier ne peut qu’encourager les Corses à renouveler leur choix en faveur des nationalistes. L’après loi NOTRe est déjà commencé.
François Alfonsi
9 septembre 2016
Président de l’ALE (Alliance Libre Européenne) en anglais EFA
Ancien député européen, membre du PNC, Maire d’Osani.