OBJET : Protection de l’abeille corse
Monsieur le Président, Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les conseillers,Je souhaiterais aborder avec vous un sujet qui me semble de première importance : la protection de l’abeille corse.Les abeilles et autres insectes pollinisateurs jouent un rôle essentiel dans les écosystèmes. Un tiers de notre alimentation dépend de la pollinisation. pollinisation manuelle demande beaucoup de main d’œuvre, elle est lente et chère. La valeur économique de la pollinisation par les abeilles a été estimée à environ un milliard d’euros pour toute la planète. Un monde sans pollinisateurs serait désastreux. D’un point de vue purement économique il est donc rentable et indispensable de protéger les abeilles.Les abeilles ne sont pas seulement importantes parce qu’elles fabriquent du miel, elles exercent un rôle majeur dans la production de notre nourriture tels que les légumes, les fruits, les épices, les noix et autres huiles végétales ….. Sur les 100 espèces végétales qui fournissent 90% de la nourriture dans le monde, 71 dépendent des abeilles pour leur pollinisation. 4000 variétés de légumes cultivés en Europe n’existeraient pas sans le travail assidu des abeilles. Malheureusement, on observe depuis quelques années, le déclin massif des abeilles dans le monde entier.En Corse, l’abeille Apis mellifera mellifera corsica, écotype endémique, constitue le socle fondamental de l’apiculture insulaire .Elle se distingue nettement des autres abeilles car elle est parfaitement adaptée aux conditions climatiques et géographiques de notre Île, et elle a la faculté de profiter au mieux de la succession des floraisons exceptionnelles, tout au long de l’année.En termes de conduite apicole et de production, cette adaptation de l’abeille à son environnement permet une exploitation rationnelle et fiable de l’ensemble des ressources du milieu.Concernant l’apiculture insulaire, 400 apiculteurs exploitent environ 19000 ruches réparties sur l’ensemble du territoire.
Cela représente une production estimée à 250 tonnes de miel (chiffres de2014).Cette production est en très nette baisse d’année en année, du fait du changement climatique (printemps pluvieux, sécheresses estivales……) et de l’impact du cynips du châtaignier dont les effets sont de plus en plus importants, notamment sur le miel de châtaigneraie.La filière apicole insulaire présente des enjeux majeurs dans divers domaines :- D’un point de vue économique, la production de miel dont une grande partie bénéficie d’une Appellation d’Origine Protégée est en baisse mais représente tout de même 250 tonnes annuelles.- D’un point de vue écologique, le travail des abeilles, par la pollinisation des végétaux garanti le cycle végétal de la flore sauvage et une grande partie de la production agricole de l’Ile.- D’un point de vue humain, elle représente 400 apiculteurs dont les produits de la ruche constituent, pour certains, la principale source de revenus.L’abeille Corse est donc indispensable.Cependant, elle doit désormais faire face à de multiples menaces.Ces menaces sont diverses :Tout d’abord, l’abeille doit survivre à l’utilisation massive de pesticides et autres produits chimiques qui lui sont nocifs. On peut notamment citer les néonicotinoïdes, employés comme insecticides, dont plusieurs études ont confirmé leur nuisance pour le système nerveux central des abeilles.Ensuite, quelques prédateurs naturels peuvent également lui être fatal.En effet, l’apiculture Corse a déjà subi l’arrivée du parasite Varroa destructor qui, comme son nom l’indique, a fait beaucoup de mal à nos abeilles, dans les années 1980.L’arrivée de ce parasite, en France continentale, avait conduit les autorités, par un arrêté ministériel de 1982, à interdire l’importation en Corse d’abeilles et de matériel d’occasion en provenance de France, ce qui a permis de préserver notre Ile de ce fléau.Aujourd’hui, un autre prédateur, Aethina tumida, venu d’Afrique du Sud, menace d’arriver en Corse. Ce parasite déjà présent en Italie, mettrait en péril notre apiculture.Il est primordial, pour la pour la filière apicole de notre région de faire de notre insularité, un avantage. Nous ne devons pas subir passivement l’arrivée de tels parasites sur notre territoire, comme nous avons pu le voir pour Xylella Fastidiosa.
Le frelon asiatique est aussi un danger pour les abeilles sans pour autant menacer totalement la filière.
Enfin, l’importation de reines, d’essaims, ou de colonies d’abeilles étrangères condamnerait notre écotype endémique à une disparition certaine.
Sur le plan législatif français, le projet de loi sur la biodiversité présenté par Ségolène ROYAL fait état de la protection des abeilles, mais ce projet nous paraît largement insuffisant.
Le Sénat, a par ailleurs, clairement refusé un amendement proposé par l’Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l’alimentation, de l’Environnement et du Travail (Anses) visant à supprimer les néonicotinoïdes.
Face à cette situation d’urgence qui menace l’abeille Corse, nous souhaiterions que des mesures soient prises concernant notre filière apicole.
L’apiculture est une activité respectueuse de l’environnement mais aussi actrice du maintien de la biodiversité.
Quelles pourraient être, Madame la Présidente, les pistes à suivre pour que notre abeille survive à ces multiples dangers ?
Serait-il possible d’envisager un plan d’action visant à la protection de l’Apis mellifera mellifera corsica ?
Je vous remercie !
Mme Mattea CASALTA Au nom du groupe «FEMU A CORSICA »