« La session budgétaire de l’assemblée de Corse , retransmise en direct sur internet, n’a pas dérogé à la tradition: indépendamment du sérieux des enjeux en débat , le spectacle a oscillé entre tragédie et comédie.
Sans doute la présence de la presse , les caméras de la télévision et la retransmission des débats sur internet n’y étaient ils pas pour rien, mais au delà , et plus sérieusement, on est en droit de s’interroger sur les simulacres de combat politique auquel j’ai assisté , confortablement assis devant mon ordinateur.
Résumons la situation: le jeudi 14 avril, Gilles Siméoni et la majorité importante mais relative de l’assemblée de Corse constatent en arrivant aux affaires, une impasse considérable dans les comptes de la CTC, qu’ils évaluent à environ 100 millions d’euros. Un cabinet de consultants réputés pour ses compétences en matière de finances publiques confirme, et estime à 107 millions d’euros l’impasse en question, due pour l’essentiel à un nombre considérable d’engagements pris par l’ancienne majorité envers entreprises, communes, et associations, qui n’ont pas été honorés.
Pour pouvoir honorer ces engagements , et remettre ainsi à flot les finances des créanciers concernés, et pour poursuivre et amplifier à la marge un certain nombre d’investissements, l’exécutif élabore un projet de budget dont l’équilibre est assuré par un emprunt de 158 millions d’euros.
Se hérissant devant l’importance de l’emprunt concerné, les deux principaux groupes de l’assemblée, les républicains et les giacobbistes menacent de ne pas voter les propositions de l’exécutif , et entament de concert une danse du scalp qui se termine sans résultat le vendredi à 3h30 du matin.
La nuit portant conseil, et la perspective d’un retour précipité aux urnes aidant, les points de vue se rejoignaient le lendemain matin autour d’une proposition de compromis présentée par Gilles Siméoni et qui pourrait se résumer de la sorte:
- on est tous d’accord pour constater que l’impasse financière existe et qu’elle est suffisamment importante pour souscrire un emprunt d’une importance exceptionnelle
- on réduit dans l’immédiat l’importance de l’emprunt de 30 millions d’euros, mais on s’accorde pour le porter sensiblement au montant initialement prévu à la session budgétaire de septembre prochain si les hypothèses qui ont servi à l’élaboration du budget sont confirmées.
- la commission des finances se réunira chaque mois aux fins de vérifier le respect de la feuille de route.
- les deux partis les plus importants de l’opposition et le FN s’abstiendront pour permettre au budget d’être adopté. Seul le PC vote naturellement Niet !
Autrement dit, on ne change rien, on lisse tout cela sur quelques mois et chacun rentre chez soi enn clamant qu’il a sauvé la Corse !
C’est sur les bases de cet accord que le budget a été adopté et c’est une bonne chose. Chacun dans l’opposition naturellement s’en est bruyamment attribué la paternité.
Le résultat des discussions, et l’accord résumé plus haut qui a permis l’adoption du budget prouvent à mon sens qu’il n’en est rien, et que le cirque auquel on a assisté aurait pu être évité.
Le groupe giacobbiste devrait être le seul à ne pas claironner qu’il a sauvé la Corse: il est en effet le seul responsable de la situation calamiteuse des finances territoriales . C’est sans compter sur le culot d’acier de son chef de file, qui a été le premier, alors que l’assemblée de Corse était encore en séance à essayer de tirer la couverture à lui dans un communiqué de presse.
J’avoue que j’ai du mal à qualifier cette attitude qui consiste à refuser d’assumer ses responsabilités, à nier l’existence d’un quelconque passif , et la réalité des 100 millions d’euros d’arriérés de factures à régler, et, dans le même temps , par son abstention, autoriser la mise en place d’un budget comportant un emprunt dont le montant aurait été considérablement réduit si cette dette , héritage de la précédente mandature, n’avait pas pesé sur les comptes ! »