Visite de la CTC par la 35e promotion de l’IRA le 24 février 2016 : discours du président de l’Assemblée de Corse, Jean-Guy Talamoni :
Je suis heureux de vous accueillir aujourd’hui au sein de la collectivité territoriale de Corse car ouvrir les portes de cette institution correspond parfaitement à l’idée que nous nous faisons de l’exercice des responsabilités qui sont désormais les nôtres.
Accomplir la mission que nous ont confiée les électeurs au mois de décembre dernier, celle de gouverner la Corse, nécessite aussi, nous en sommes convaincus, des moments tels que celui-ci, de pédagogie et de présentation du fonctionnement de la plus haute institution démocratique de l’île.
C’est aussi dans cet esprit-là qu’ont été rappelées au moment de notre investiture les paroles de Pasquale Paoli qui disait : « Il faut que notre Administration ressemble à une maison de cristal où chacun puisse voir ce qui s’y passe ».
Je ne m’attarderai pas aujourd’hui sur le fonctionnement de cette assemblée car, vu leur connaissance de cette maison, je suis convaincu que le secrétaire général, Serge Tomi, et le directeur de cabinet du président de l’Exécutif, Norbert Pancrazi, vous ont déjà donné de nombreux renseignements.
De plus, je crois pouvoir parler au nom du Président Simeoni, à l’issue de nos interventions, nous sommes tout à fait disposés à répondre à vos questions.
Pour ma part, cela ne vous étonnera pas, je reviendrai sur ce qui fait la particularité de l’Assemblée de Corse.
Une légitimité toutefois qui n’est pas toujours reconnue par Paris ! En témoignent certaines délibérations de l’Assemblée de Corse, votées lors de la précédente mandature, avec une majorité de gauche, que le gouvernement refuse de prendre en considération. Je veux parler, vous l’aurez compris, de la délibération sur le statut de résident, de celle qui concerne la co-officialité de la langue corse et de la langue française, ou encore du vote sur l’amnistie des prisonniers politiques.
À ces délibérations, fruits de l’expression démocratique par excellence, Paris oppose un refus systématique, alors même que la loi du 22 janvier 2002, ayant suivi les Accords de Matignon, stipule que » l’Assemblée deCorse règle par ses délibérations les affaires de la Corse « , et alors même que cet organe délibérant est habilité à se saisir de tout sujet intéressant les Corses.
Malgré ces réticences, l’Assemblée de Corse, tant dans les textes que dans les faits, joue véritablement un rôle de proximité. C’est précisément cela que je vous disais en préambule : cette mandature qui débute se veut être au plus proche des préoccupations des Corses et mener une politique vraiment en phase avec leurs besoins.
Vous recevoir aujourd’hui participe d’ailleurs du maintien indispensable de relations avec le terrain, vous qui, peut-être, serez amenés dans vos futures fonctions, à travailler à de nouvelles avancées pour la Corse, avancées d’ordre constitutionnel comme nous le souhaitons !
Cela ne vous aura pas échappé, nous portons des ambitions très fortes et notamment celle qui consiste à voir conférer à cette assemblée un véritable pouvoir législatif, mais également :
– le statut de co-officialité de la langue, seule voie pour empêcher la disparition du corse,
– le statut de résident, outil indispensable pour stopper la spéculation immobilière et permettre aux Corses, d’origine ou d’adoption, de se loger,
– le transfert de compétence en matière de fiscalité.
Ainsi, à mon sens, il est de la responsabilité de l’Assemblée de Corse d’imaginer, de concevoir et de mettre en œuvre des réponses politiques adaptées à des préoccupations et des situations qui sont extraordinaires, au sens premier du terme.
Dans cette perspective, l’un des rôles fondamentaux de cette assemblée est de lancer de nouvelles initiatives. À cet égard, nous avons mis en place des conférences permanentes sur différents thèmes, dans le cadre desquelles le dossier de la fiscalité du patrimoine apparaît par exemple comme une priorité. Voyez à quel point le droit commun n’est pas un cadre pertinent pour ce que l’on a coutume d’appeler « la question corse », voire « le problème corse ». Durant les deux années qui viennent, je souhaite que l’Assemblée de Corse travaille à dépasser ce cadre pour enfin permettre à notre peuple de maîtriser son destin.
Je vous remercie pour votre attention et vous souhaite pleine réussite dans la poursuite de votre scolarité ainsi que dans vos futures responsabilités.