Ce procès politique devait durer encore deux mois. De lourdes peines étaient attendues, entre 7 et 10 ans de prison, pour les 35 militantEs.
Ils étaient accusés d’avoir voulu reconstruire Batasuna après 2003, année où l’organisation a été interdite en Espagne (mais pas en France où elle avait pignon sur rue), considérée par Madrid comme liée à l’ETA. Il était ainsi reproché aux deux Françaises d’avoir participé à des réunions, meetings, d’avoir signé des articles de presse etc. Il faut préciser que ces activités entraient dans le nouveau cadre impulsé par la gauche abertzale, celui du processus de paix à venir, qui allait se concrétiser par la déclaration d’Aiete en 2011, un processus que le gouvernement espagnol refuse à ce jour de prendre en considération.
Une bonne et surprenante nouvelle est tombée le mercredi 13 janvier dernier. Le procès a pris fin après un accord entre le procureur, les parties civiles (Association de victimes et « Dignité et Justice », groupements généralement peu enclins au dialogue) d’une part, et les inculpés et leurs avocats d’autre part. Les condamnations vont de 18 mois à 2 ans de prison. Or dans la loi espagnole, les peines n’excédant pas deux ans de prison n’entraînent pas l’incarcération. Les 35 sont donc libérés, sans contrôle judiciaire, sans interdiction de sortie du territoire. Aurore et Haizpea, respectivement condamnées à 18 et 20 mois de prison, sont rentrées au Pays Basque Nord.
Dans le cadre de l’accord, les accusés ont dû reconnaître avoir agi « contre le code pénal », de plusqu’ « ils renonçaient à une activité en relation avec la violence et reconnaissaient les victimes et les dommages engendrés ». Ils ont dû admettre « appartenir à une organisation armée » ce qu’ils avaient toujours nié. Il faut savoir que le gouvernement espagnol considère comme « terroriste » la mouvance abertzale de gauche donc Batasuna, où militaient les 35. Pour Pernando Barrena, porte parole de Sortu, qui était l’un des 35, « cet accord a pour objectif qu’aucun des mis en examen n’aille en prison. Nous avons atteint cet objectif. Nous désirons maintenant que cet accord contribue à la fin de l’application des législations d’exception ». Il a insisté sur la volonté de son organisation d’avancer vers l’indépendance du Pays Basque par des voies exclusivement politiques et démocratiques.
Cet accord est une première pour un procès de ce type, dans un contexte où, à ce jour, le gouvernement espagnol refuse tout dialogue, bloque le processus de paix et s’en tient à la voie répressive. Se renouvellera-t-il ? Est-ce le premier signe d’une volonté d’apaisement, le début d’un changement d’attitude de Madrid ? Les semaines et mois à venir permettront sans doute de répondre. Pour l’heure, Madrid (et Paris dans son sillage) ne réagit toujours pas aux demandes de rapprochement des prisonnièrEs politiques basques, de libération de celles et ceux qui sont gravement malades, revendications immédiates réitérées par les 80 000 manifestantEs à Bayonne et Bilbao samedi dernier. La mobilisation va se poursuivre et s’intensifier au Pays Basque Sud et au Pays Basque Nord.
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