Deux des hommes condamnés pour l’assassinat du préfet de Corse Claude Erignac en 1998, Alain Ferrandi 55 ans et Pierre Alessandri 58 ans, estiment que leur geste ne serait pas à refaire et évoquent un « échec politique ».
Les deux hommes, l’un présenté comme le chef du commando et l’autre qui s’est accusé d’être le tireur après avoir été condamné, purgent à Poissy (Yvelines) une peine de réclusion criminelle à perpétuité prononcée en 2003.
Dix-sept ans après l’assassinat du 6 février 1998 à Ajaccio, Alain Ferrandi et Pierre Alessandri dressent dans un entretien accordé au quotidien Corse-Matin « l’amer constat de leur échec politique ».
« Aujourd’hui, nous pouvons dire que nous avons, nous aussi, échoué à provoquer la prise de conscience« , disent-ils de leur cellule.
« A chaque fois qu’il y a eu une tentative d’explication politique, on nous a opposé les faits. Or, s’il est vrai que nous avons tué un homme, nous avons aussi tué un symbole politique« , ajoutent-ils, avant de reconnaître qu’ils ont fait erreur.
« Avec le recul, et l’analyse que nous faisons aujourd’hui de ce qu’il s’est passé, cela ne serait évidemment pas à refaire », dit Pierre Alessandri.
Le procès d’Alain Ferrandi et Pierre Alessandri, jugés avec onze autres par la cour d’assises spéciale de Paris en 2003, avait été marqué par l’interpellation après quatre ans de fuite d’Yvan Colonna.
Ce dernier a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité dans cette même affaire en 2011 après trois procès devant la justice parisienne, et a vu un recours validé par la Cour européenne des droits de l’homme en janvier dernier.
« L’arrestation d’Yvan Colonna en plein procès a achevé de brouiller le message politique déjà occulté par le procès. Le fond a été complètement occulté et l’ensemble des médias a laissé libre cours à son fantasme du berger innocent, presque un personnage de Mérimée« , estime Alain Ferrandi.
A quelques semaines de l’élection territoriale de décembre où trois listes nationalistes sont en présence sur douze au total, les deux hommes, qui se présentent comme prisonniers « politiques », se montrent circonspects au sujet de la demande d’amnistie générale portée par le courant indépendantiste.
« Nous ne sommes pas contre l’amnistie, mais soyons honnêtes, nous ne l’avons jamais demandée », disent Alain Ferrandi et Pierre Alessandri, qui affirment avoir oublié les conséquences personnelles de leur geste au moment de passer à l’acte : « Si nous avions pensé une seule seconde à nos familles, nous n’aurions pas pu le faire.«
Claude Erignac a été abattu de trois balles en début de soirée le 6 février 1998, alors qu’il circulait à pied dans Ajaccio. L’arme du crime avait été volée l’année précédente lors d’une prise d’otages à la gendarmerie de Pietrasella.
Reuters