« La trahison est la distraction préférée des hypocrites. » – Malaxelis
Les porto – vecchiais que nous sommes suivent naturellement, à l’orée des futures territoriales, outre leur positionnement respectif, l’itinéraire de Camille de Rocca Serra. Celles et ceux qui comme nous, sont investis dans une certaine vision du développement de notre ville, de notre région et de notre pays, ne peuvent rester sans analyse sur l’homme qui caractérise, à travers son nom, une histoire politique de notre cité comme de l’assemblée de Corse. Une histoire du clan aussi.
Pour nous qui l’avons toujours loyalement combattu, son itinéraire suppose une réflexion et une projection politique avec, en filigrane l’avenir de notre île.
La droite la plus bête du monde ?
Sous ce sous – titre quelque peu provocateur, nous ne pourrions faire l’impasse sur ce schisme publiquement affiché lors des élections à la présidence du Conseil Général de Corse du Sud. En effet, au moment des succès incontestables engrangés lors des dernières élections cantonales de Corse du Sud et de Haute Corse, cette droite traditionnelle limite les effets de ses gains dans une déchirure qui semble inextricable. Ce sera Jean Jacques Panunzi qui en fera principalement les frais, avec en arrière – plan, l’inimitié historique qui sépare Camille de Rocca Serra de Marcel Francisci, le tout semble-t-il orchestré de Paris, par le président des « Républicains »…
On n’est jamais mieux trahi que par ses amis …
On ne pourrait ignorer, la loyauté envers son mouvement et Paris qui a toujours caractérisé Camille de Rocca Serra au point de l’avoir souvent éloigné de la Corse. Nous ne l’avons que trop combattu sur cet aspect pour pouvoir le passer sous silence. Aujourd’hui cette loyauté lui revient comme un boomerang. L’investiture donnée à José Rossi dont le parcours est – même si affilié à droite – sinueusement différent de celui de Camille de Rocca Serra, vient signifier à ce dernier la priorité des combines sur la clarté politique. Avec sous jacent, outre les territoriales de décembre 2015, la projection sur la Collectivité Unique de 2017 et la recompostion politique de sa famille” libérale à travers le choix résolu de la personne de Marcel Franscici. Avec à terme la relativisation voir l’effacement de Camille de Rocca Serra.
Entre légalité et légitimité
Devant cette situation où l’humiliation de Jean Jacques Panunzi en constitue toute la symbolique, Camille de Rocca Serra se devait de relever un défi somme toute existentiel : demeurer ou disparaître. Un choix où sentremêlent légalité et légitimité. L’investiture donnée à José Rossi aura pour effet – une fois n’est pas coutume – d’amener Camille de Rocca Serra sous la forte impulsion de son entourage à prendre ses responsabilités et d’annoncer la constitution d’une liste pour les territoriales de décembre 2015. Un choix qui l’émancipe – factuellement ? – de la tutelle de « son » président dont le récent voyage en Corse, particulièrement dans l’extrême sud, lui aura démontré quà défaut de prétendue connaissance de la Corse, il n’en maîtrisait aucune des ficelles culturelles ou familiales … Camille de Rocca Serra a très bien compris que la liste d’union de la droite, avec lui à sa tête n’était qu’un leurre, et sûrement pas un souhait ( Corse Matin du mardi 13 octobre 2015).
Quel choix pour la Corse ?
Au- delà de la volonté d’un homme et élu de se battre pour préserver ce que des élections ont pu lui donner, parallèlement à sa personne mis à mal particulièrement par ce qu’il est convenu d’appeler « les siens », c’est aussi et surtout une certaine vision de l’avenir de la Corse qui est en jeu. Et qui dépasse le cercle de quelques initiés. Celui qui aujourd’hui s’oppose à l’actuel « Padduc » pour des motifs de constitutionnalité devrait se rappeler combien le « padduc » alors concocté dans des bureaux extérieurs à la Corse, puis retiré par ses soins au moment de sa mandature, tant il était incompatible avec les réalités historiques, culturelles, sociétales et humaines de l’île, constituait ce qu’il y avait alors d’abject pour un développement économique car il consacrait la politique du « tout tourisme et de la residence secondaire » comme facteur d’accroissement des richesses et de l’emploi (sic !)… L’avenir de la Corse ne peut décemment être signifié ailleurs sauf à accepter la permamence de sa tutelle… Ce qui à nos yeux caractérise ni plus ni moins l’avilissement du Peuple Corse par le système colonial français.
S’opposer à l’actuel « Padduc » au nom de la fluctuante schématique « droite gauche » sans avoir préalablement su constituer et travailler un projet alternatif rend caduque l’actuel vision de la droite sur la Corse qui n’offre ainsi aucune autre perspective que de bénéficier d’un vote formel d’opposition à ceux qui actuellement portent aux yeux d’une certaine opinion la responsabilité de la situation de la faible croissance économique et de l’emploi. Pourtant avec ses limites, le « Padduc » de l’actuelle mandature ouvre de nouvelles et stratégiques pistes qui consacrent un développement endogène pertinent. Qui plus est les notions de langue, de culture et de peuple y tiennent naturellement une place prépondérante.
Il sera donc pour le moins intéressant d’attendre le programme – nouveau ? – de Camille de Rocca Serra pour en analyser le contenu par rapport à la Corse. Si il s’agit, à l’instar du président des Républicains, de s’inscrire dans une « reconnaissance spécifique insulaire de la Corse dans la constitution » – ce qui au demeurant reste flou pour quelqu’un qui prétend promouvoir une « union de la Méditerranée – ou bien s’arc-bouter sur une vision d’une « culture entrepreneuriale » qui s’appuierait sur la résidence et le bâtiment, sur un foncier mercantile et une privatisation outrancière du bien public et des biens collectifs corses. Bref sur un avatar de l’ancien « Padduc » – corsisé pour la forme – mais sur le fond consacrant ce que nous avons toujours dénoncé et combattu : la dépossession des corses.
Le choix « évolutif «
La vie politique corse s’est enrichie d’un qualificatif : les évolutifs. On l’a ainsi attribué à certains acteurs de droite comme Laurent Marcangeli qui, sans timidité politique aucune, a su s’asseoir aux « Ghjurnati Intarnaziunali di Corti » et en capitaliser un bénéfice politique lors des dernières municipales ajaciennes… Tout comme José Rossi qui hier, etait encore le rapporteur du projet « Joxe ». On peut aussi y trouver Mme Santoni Brunelli (soutien de Mr Rossi) et Mr Mondoloni (soutien de Camille de Rocca Serra). Autant dire que Camille de Rocca Serra aura à fortement préciser ses intentions en la matière, bien loin de Paris, et démontrer si il s’inscrit dans cette logique évolutive dont la Corse à inévitablement besoin et pour laquelle la Collectivité Unique n’est qu’un timoré échelon, comme l’écrit si bien Jo Peraldi dans « Paroles de Corse » (n°37 du mois d’octobre) qui prévient de ne pas se « satisfaire d’une nébuleuse Collectivité Unique, coquille vide, qui ne mérite pas cet excès de louanges ».
La lecture des semaines et mois à venir qui viendront précéder cette courte mandature sera riche d’enseignement en la matière.
En attendant l’éventualité d’un repositionnement, il demeure pour nous porto vecchiais nationaux l’impérieuse nécessité – outre d’exploiter les contradictions de nos adversaires du clan – de nous atteler à consolider nos propres forces face aux nouveaux défis que nous impose le système en place. Cela suppose une présence politique et patriotique de tous les instants et la construction des outils de l’émancipation de notre peuple en évitant l’écueil de leur détournement, démentant ainsi cette phrase de « Yasmina Kadra » ( L’attentat) : » Il te restera toujours tes rêves pour réinventer le monde que l’on t’a confisqué.