Luis Fernando Sotelo, étudiant âgé de 20 ans, adhérent à la Sixième Déclaration zapatiste, a été arrêté le 5 novembre 2014 suite aux manifestations et aux actions pour la présentation en vie des 43 étudiants disparus depuis le 26 septembre 2014.
Le juge a signifié sa mise en détention préventive pour les délits d’attaques à la paix publique [délit qui est pénalement du même type que le délit de terrorisme], d’attaques aux voies de communication et de dégradations (d’une station de Tramway, d’un distributeur de titres de transport et de caméras de surveillance). Quatre entreprises privées et le gouvernement de la Ville de Mexico, demandent à Sotelo de payer une somme effrayante de 13 millons de pesos, l’équivalent de 685 700 euros de dommages et intérêts. Cela signifie que Fernando sera soumis à un procès judiciaire, qu’il devra affronter enfermé dans la prison préventive Sud de la ville de Mexico. À présent, les avocats solidaires et la famille mènent une lutte acharnée et ardue contre le système judiciaire.
Lettre de Luis Fernando Sotelo depuis la Prison Sud de la Ville de México
14 octobre 2015
En guise de mise en commun à partager,
Alors qu’aujourd’hui l’État dans sa forme matérielle (son personnel et ses bureaux) contribue au spectacle de « JUSTICE », une audience se tient pour me donner un espace en guise de réponse (application de peine) … bien que je n’ai pas à me soumettre (justifier) aux moyens (de « moyens » et « fin ») en dehors des tribunaux car ce que ce dernier aimerait entendre de ma bouche c’est que je suis coupable d’être délinquant. Cependant et comme conséquence de mon refus de participer à leurs accusations forgées et préfabriquées à mon encontre, je tiens à signaler que pour moi, ce tribunal représente une pierre angulaire (la plus visible de l’édifice) de la répression en ville, s’agissant, de fait, d’un moyen « a priori » de consensus social ; la distribution de la justice comme moyen de contenir la violence non officielle (celle qui n’est pas capitaliste) n’est, selon mon expérience empirique, qu’un marché supplémentaire, un autre marché de consommation (relativement) à la portée de la majorité dépendant du niveau d’assistanat aux inégalités… c’est pour cela que demander justice à ces tribunaux n’est pas une revendication d’un quelconque droit humain (« qui serait toujours respecté »), mais ce serait revendiquer la domination des choses (bureaucratie, capital, pouvoir, autorité) sur les humain-e-s.
Au contraire, en portant ce « regard » deux chemins pourraient alors surgir, celui de continuer à donner toujours plus de pouvoir et moyens à l’État (avec des votes, des opinions, des juges ou avec des policiers) pour rêver à un réformisme qui amputerait encore le mal qu’ils nous font (notre douleur) ou un autre qui serait celui de s’armer pour combattre l’irrationalité de leur domination.
Je remercie solidairement et salue avec respect qui a écouté ou a bien voulu écouter ma parole ; avec humilité mais avec beaucoup de joie je laisse cette petite contribution à partager.
La répression est un phénomène qui souvent se transforme dans la pensée des personnes (disons des prisonnier-e-s) en quelque chose d’abstrait, peut-être un peu comme on transforme l’exploitation pour être plus supportable. La vérité c’est que c’est la répression elle-même qui nous maintient immobiles dans ce même système de pensée.
Nous ne luttons pas pour des chefs, nous ne le faisons pas pour faire de la politique, la politique si c’est un travail rémunéré nous dégoûte, la politique n’est qu’un aspect de la vie, qui attend encore d’être libéré au niveau individuel et collectif, parce que nous luttons non pour un morceau de vie mais pour la vie, pour l’autodétermination et la liberté.
Luis Fernando Sotelo Zambrano
Prison Sud de la Ville de México, 4 Octobre 2015.
Aux compas solidaires :
Tout d’abord un salut très respectueux pour vos luttes de résistance, je suis très heureux de la dynamique qui se crée à partir de la mise en commun de ma parole..
Depuis mon emprisonnement, je regarde le monde à travers les lunettes de la rage, de la douleur, de l’indignation, la soi-disant garantie d’une vie plus ou moins « digne » à l’intérieur du capitalisme (et bien sûr ce n’est pas seulement depuis que je suis enfermé). Une rage, une douleur, une indignation tellement banales comme est devenu banal (expérience de tous les jours) ce crime appelé capitalisme. Et c’est là que ma rage et mon indignation marchent et qu’elles rencontrent la solidarité et la résistance tout au long de ces presque 11 mois sans oublier ces douleurs qui sont mes sœurs.
Je considère la systématisation de la société comme cause des inégalités, pour autant que la classe politique feigne d’ignorer la dégradation subie par toutes et tous les individus de la société… Enfin, si nous ne nous basons que sur « les objectifs de vie » promus par la mentalité bourgeoise et sa condition matérielle, jamais au grand jamais nous ne parviendrons à nous émanciper des erreurs du passé ; il vaut mieux parier que les luttes anti capitalistes se poursuivront avec conscience, critique et beaucoup de joie ; c’est sur ce terrain là que je grandis. (Awww! jeje).
Saluts et amitiés rebelles à:
La Red vs la Represión, La Sexta, La Sexta Barcelona, Okupa Che, La Cruz Negra, Les Trois Passants, La Cabra Libertaria, La Comunidad de San Francisco Xochicuahutla, La Comunidad Nahua de San Pedro Tlanixco, Radio Regeneración, FPFVI-UNOPII, Los Brújulos, Los Cafetos, Pan tierra y Libertad, CCH Vallejo.
Prison Sud de la Ville de México, 4 Octobre 2015.
Luis Fernándo Sotelo Z.
Traduit par Amparo
Plus d’infos
Source CNA- MX (Cruz Negra Anarquista de Mexico)