#Corse Port de la Carbonite – Les opposants s’expriment

Tandis que les études se poursuivent sur le projet titanesque qui attend Bastia, ses opposants tout comme ceux qui s’en méfient, s’expriment à leur tour : Éric Simoni pour Corsica Libera et Joseph Savelli pour Inseme per Bastia sur corse matin.

Eric Simoni de Corsica libera

EricSimoniAlbaBastia– La récente réunion du comité de pilotage du port de la Carbonite révèle que le projet est plus que jamais d’actualité êtes vous inquiet ?

La dernière réunion à laquelle vous vous référez a été tout simplement ubuesque: entre les fausses assertions des uns et les dangereux atermoiements des autres, il apparaît clairement que ce “comité de pilotage” ne répond plus qu’à une seule fonction:  enfumer l’opinion afin que ce projet incohérent et néfaste aboutisse quoi qu’il en coûte. Au delà de l’inquiétude, c’est un sentiment de légitime indignation largement partagée par de nombreux observateurs que ces manœuvres suscitent.

– Les voix de l’opposition au projet dont la vôtre ne semblent pas être entendues pourquoi selon vous ?

Force est de constater que Corsica Libera est à ce jour le seul mouvement politique à s’être déterminé clairement sur le sujet. Cela a notamment conduit à l’adoption d’un amendement par l’Assemblée de Corse  imposant aujourd’hui à ceux qui continuent à faire la sourde oreille de tenir compte des débats en cours. Il est clair que depuis 2007 les porteurs du projet changent constamment d’argumentaire au fur et à mesure que des critiques ou des réserves sont formulées, sans pour autant admettre l’inanité de leur position fluctuante. On refuse d’entendre, non seulement les voix qui s’opposent, mais aussi les voix qui proposent la seule alternative crédible.

Alors, effectivement, la question est: pourquoi ? Pour servir quels intérêts ? Pour honorer quelles promesses que ce projet ne  pourra de toutes façons pas tenir, tant il est vrai que, depuis le début, tout n’est que contre-vérités et faux semblants ? Des premières estimations de coût, jusqu’aux prévisions de retombées économiques, en passant par l’argumentation portant sur des chiffres fantaisistes concernant la progression des flux de passagers, rien n’est vérifiable, et ce qui a pu l’être s’est avéré faux.

– L’un de vos principaux arguments reste la protection de l’environnement la création d’une réserve naturelle de 7000 hectares vous semble t elle suffisante ?

Le fait de présenter comme une mesure de compensation, la gestion rationnelle de nos richesses environnementales, qui sont avant tout des richesses économiques, est une véritable escroquerie intellectuelle. C’est un peu comme si on vous demandait d’être reconnaissant envers celui qui vous ampute d’un membre sain, sous prétexte qu’il s’engage à respecter le reste de votre intégrité physique.

Sans compter que la destruction irréversible de l’herbier de posidonies a aujourd’hui un coût économique faramineux que  nous avons démontré à partir d’études scientifiques incontestées à ce jour.

– Le financement oscillerait entre 370 et 550 m€ cet écart vous laisse t il perplexe ?

Depuis 2007, les chiffres présentés ont changé sans cesse, et plus ils se voulaient précis, plus ils étaient faux. Va-t-on continuer encore longtemps à prendre les gens pour des imbéciles? La dernière trouvaille en date consiste à saucissonner le projet en plusieurs phases en annonçant ainsi un coût aussi partiel qu’approximatif, qui laisse présager, qu’au final, on pourrait facilement se situer entre 800 millions et un milliard d’euros! C’est de la démence pure et simple, et l’exercice de funambulisme budgétaire auquel on assiste à cette occasion nous semble surréaliste.

Comment peut-on affirmer que le projet s’auto financera? Où va-t-on trouver l’argent pour transformer l’actuel port en port de plaisance exclusive, ce qui génèrera un surcoût aussi inutile qu’évitable ? Les mécanismes qui sont à l’œuvre aboutiront immanquablement à livrer la gestion d’un secteur stratégique vital pour la Corse à des intérêts étrangers et à un grand consortium. C’est l’avenir économique de notre pays qu’on est en train d’obérer. La faillite de la SNCM n’aura permis de tirer aucune leçon puisqu’on s’apprête à réitérer les mêmes errements mais, cette fois ci, à l’échelle de toute l’infrastructure portuaire.

– Le comité de pilotage évoque par ailleurs deux années d’études supplémentaires qu’en pensez-vous ?

Ces études de plus en plus onéreuses pour le contribuable sont à ajouter au coût global de cette entreprise néfaste. Elles aboutiront à des conclusions déjà connues, ne lèveront aucune des incertitudes actuelles, et n’apporteront rien de plus. Tout le monde le sait, mais certains font semblant d’attendre un hypothétique verdict dans le domaine de la courantologie, des retombées environnementales, et en terme de “faisabilité”. Allons-nous enfin sortir de cette hypocrisie ambiante et prendre le problème à bras le corps? Depuis 2007 nous aurions pu mener à bien un projet alternatif qui aurait déjà généré de substantielles retombées en termes d’emplois durables pour les Corses, et de développement économique au service de tous. Au lieu de ça, on a voulu faire croire à la fable d’une seule possibilité sur le site de la Carbonite, mensonge repris dans de vrais faux rapports officiels (rapport du CNPN du 20/12/2012).

C’est ainsi qu’on a ouvert la porte à une scandaleuse dérogation et à un saccage écologique, qui nous mettra au ban de l’Europe et grèvera lourdement l’attractivité touristique de la zone impactée. C’est malheureusement sur ces bases que, malgré quelques réserves de circonstance, le comité de pilotage maintient actuellement le cap vers un naufrage annoncé.

– Allez-vous mener des actions pour manifester votre opposition au grand port de la Carbonite ?

Incohérence, conséquences désastreuses sur le plan environnemental et social, non sens économique, orientations négatives et sans doute catastrophiques de la politique touristique et des transports pour la Corse: voilà ce que représente le “grand port de la Carbonite”. Il rejoint la cohorte des chantiers inutiles et dangereux que l’on voit émerger de temps à autres sous la pression de lobbies dont les objectifs financiers sont aux antipodes de toute notion de développement durable.

Conçu pour servir des intérêts privés, au détriment de ceux de la population, le port de la Carbonite ne répond à aucun besoin réel, et ne tiendra aucune des promesses qui sont faites en son nom. Nous continuerons à nous opposer à ce projet à l’Assemblée de Corse grâce à l’action déterminée des élus de Corsica Libera bien sûr, mais aussi avec toutes celles et tous ceux qui, au delà de notre mouvement, sont conscients des enjeux et prêts à se mobiliser pour que la raison et l’intérêt général l’emportent. De la pétition qui circule déjà sur internet, à la popularisation de notre projet alternatif, en passant par tous les recours possibles, y compris au niveau européen, tout est envisagé. Si certains ont aujourd’hui marqué le pas, ce n’est sans doute pas seulement parce que la patience est une de leur vertu cardinale, mais bien à cause d’une opposition qui reçoit chaque jour un peu plus d’écho.

Plus que jamais, la mobilisation populaire est donc nécessaire.

Eric Simoni, pour Corsica Libera

 

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