Femu a Corsica, cinq ans après, reste la carte maîtresse du jeu nationaliste. C’est la clef pour 2015, et au delà car il faut pouvoir s’inscrire dans la durée pour espérer changer le cours de l’Histoire d’un peuple en Europe.
Il faudra aussi se donner les moyens d’un nouveau bond en avant en 2018, qui sera l’an 1 de la future Collectivité Unique de Corse, et continuer assidument d’inscrire la Corse dans la dynamique européenne qui s’affirme dans les sillages écossais et catalan, dynamique que l’AG de l’ALE a confirmée ce week end.
L’AG d’Inseme s’est tenue samedi. Celle du PNC aura lieu le 7 juin prochain. A l’approche des territoriales de décembre 2015, les militants se remobilisent. Immédiatement après juin, commencera la campagne qui mènera aux élections de décembre.
L’état des lieux de la Collectivité Territoriale de Corse est préoccupant et les cinq années de la « gestion Giacobbi » laissent une situation financière très dégradée. L’audit présenté à l’Assemblée de Corse est en soi peu significatif, car il se limite au périmètre restreint des finances directes de la Collectivité, sans tenir compte de la sitution des offices, agences et autres structures dont le maintien à flot dépendra d’une façon ou d’une autre, un jour ou l’autre, de la CTC. Prise séparément, la CTC apparaît au bout du rouleau, et elle peut tout juste surnager avec une trésorerie exsangue. Lestée par les déficits qui s’accumulent un peu partout autour d’elle, elle semble promise au naufrage.
Aussi, derrière le consensus pour les réformes principales que l’Assemblée a votées tout au long de ces cinq années, Padduc, Collectivité Unique, propositions de la Commission Chaubon, la mandature 2010-2015 n’a pas été en mesure d’asseoir une gestion crédible. Les investissements sont en berne, les coûts de fonctionnement, plombés par le clientélisme, ont asphyxié les marges de manoeuvre et l’endettement élevé ne laisse que très peu d’espace. Paul Giacobbi n’a pas convaincu en tant que gestionnaire, ni au département qu’il dirigeait avant, ni, depuis cinq années, à la CTC.
Ce sera pour lui un lourd handicap.
La gauche semble par ailleurs bien mal en point. Le PS officiel est réduit à peau de chagrin, et les blessures du parcours départemental en Haute Corse laissent ouvertes des plaies béantes. A Aiacciu, elle a perdu la partie. Les communistes continuent de se marginaliser, et le front du refus, emmené par le PRG à l’ancienne, a perdu ses têtes d’affiche. Quant à la relève auto-proclamée, à Ile Rousse, dans le Tàravu ou à Aiacciu, elle est dans les cordes après plusieurs revers électoraux, le dernier en date étant celui des départementales de mars dernier. Paul Giacobbi a le champ libre, mais il part avec un lourd handicap, sans même compter l’effondrement que la gauche connaît au plan national.
La droite peut-elle en profiter ? Très certainement 2015 sera pour elle moins catastrophique que l’avait été 2010. Sa victoire ajaccienne, puis son « grand chelem » départemental dans le sud, lui ont redonné du lustre. Mais, patatras, aussitôt après, l’élection à la Présidence du Conseil Général a fait retomber les illusions et les divisions internes vont plomber son parcours électoral d’ici décembre. Deux listes au moins vont s’affronter, et la bataille sera rude. Au moment de se regrouper entre les deux tours, puis pour former une majorité, ou y participer, ce ne sera pas facile ! Et le potentiel dont elle dispose en Haute Corse reste bien faible.
Dans le jeu à trois composantes qu’est désormais le paysage politique en Corse, la troisième composante nationaliste se trouve mécaniquement renforcée par les difficultés des deux autres.
Mais elle a une obligation : être en mesure de générer la confiance quant à la gestion de la chose publique. Et elle doit mieux rassembler son camp pour que la recomposition se fasse naturellement autour d’elle.
Relancer Femu a Corsica sera la grande affaire de l’été. Le challenge sera de passer d’une démarche électorale à une construction politique durable.