Ce matin l’Associu Sulidarità tenait une conférence de presse sur un tryptique : Le cas de Pierre Paoli, la journée internationale des prisonniers politiques et le projet d’amnistie. (photos, vidéos et Compte rendu dans la journée)
Voici le texte de la conférence de presse et la lettre ouverte de l’avocat de Pierre Paoli à l’attention du Président de la république et de la Garde Des Sceaux :
« En solidarité avec la résolution du premier congrès international dédié à la question des prisonniers politiques dans le monde, l’Associu Sulidarità partie intégrante du congrès « KALERA » participe chaque année au mois d’avril à une évocation solennelle de cette problématique.
cette journée est l’occasion pour nous de réaffirmer notre soutien au peuples du monde qui font face à la négation de leurs droits nationaux , sociaux ,humains, aux libertés syndicales et d’opinion .
Cela, nous permet également de dénoncer l’enfermement pour motif politique et par là même l’existence de juridictions d’exceptions, directement reliés au pouvoir politique et donc contraires à tous les principes d’une justice sereine et démocratique.
En effet, nous connaissons depuis de longues années la propension de ces institutions judiciaires très particulières à instruire les dossiers systématiquement à charge de manière inéquitable et arbitraire afin de construire des culpabilités, sur commande.
Dans ce cadre, Maître Mercinier Pantalacci, va intervenir dans cette communication sur la situation judiciaire de Petru Paoli, secrétaire national de Corsica Libera, dernier prisonnier politique corse à avoir été récemment incarcéré à Nanterre et auquel tous ici, comme à l’ensemble des prisonniers politiques corses, nous réitérons notre indéfectible et fraternel soutien.
Intervention de Maître Mercinier : (ci-joint sa lettre ouverte à François Hollande, président de la république française et Madame Christiane Taubira, garde des sceaux).
LETTRE OUVERTE
Monsieur le Président de la République,
Madame la Garde des Sceaux,Avocat j’attire votre attention, par trois exemples, sur ce qu’est actuellement la pratique de la « justice antiterroriste » en Corse: le premier est honteux, le second criminel, le troisième absurde.
En cette journée symbolique il nous appartient donc de faire un état des lieux, des divers sujets qui concerne la question des prisonniers politiques corses.
Avec la Ligue des droits de l’homme, dont nous saluons fraternellement aujourd’hui la présence de ses représentants à nos côtés, nous portons communément une plateforme de revendications, qui nous l’espérons sera enfin prise en compte et mettra un terme à la constante obstination des différents gouvernements français à vouloir exclure les détenus politiques corses de la simple application du droit et donc ainsi de continuer à bafouer la loi.
En l’espèce, c’est toujours le cas, pour ce qui concerne le rapprochement des détenus condamnés et des prévenus dont l’instruction est close.
C’est encore le cas en ce qui concerne l’équité d’attribution des aménagements de peines.
C’est encore et toujours le cas pour le regroupement des prévenus, pour le droit aux soins et à la santé (voir le cas de jean pascal CESARI), pour le droit à la formation et à l’éducation, etc…
Tout ceci n’aurait normalement plus dû être signalé à nouveau, tant l’accessibilité à ces légitimes revendications est évidente.
Mais dorénavant le temps de l’efficacité d’un certain courage politique est venu, et il doit, grâce au contexte historique que nous vivons, guider tout à chacun vers un positionnement en faveur d’une amnistie, mesure substantielle au règlement de la question Corse, dont elle est la naturelle conséquence.
La Corse a connue quatre décennies de conflit, qui a engendré le sacrifice et la privation de liberté pour de nombreux patriotes. La résistance assumé par les militants nationalistes au prix de plusieurs centaines d’années de prison, a été déterminante et à fortement contribuer au fait qu’aujourd’hui l’on puisse encore envisager un avenir pour notre peuple.
Un constat peut être fait de façon commune : la Corse est désormais entrée dans une nouvelle phase. Durant cinq années à l’Assemblée de Corse, les points de vue se sont rapprochés et de nombreux votes sont intervenus – à de fortes majorités – sur les sujets les plus importants : langue, patrimoine foncier, développement, environnement, évolution institutionnelle…
Prenant en compte cette démarche de dialogue et de cohésion des élus de la Corse, le FLNC a annoncé il y a bientôt un an sa décision de sortir de la clandestinité, et ce afin de faciliter cette démarche de construction commune. Dans le même temps, des arrestations de militants politiques ont lieu régulièrement, arrestations en relation avec des faits antérieurs à la décision du FLNC de mettre un terme à ses opérations. Pour les Corses désireux de tourner la page du conflit, ces manœuvres politico-judiciaires constituent une entrave sur le chemin de la paix. Dans tous les pays ayant connu une histoire troublée comme la nôtre, la sortie de crise a nécessairement été accompagnée par une mesure d’amnistie. La France elle-même y a eu recours à plusieurs reprises au XXe siècle.
Aussi à l’occasion de cette journée internationale 2015 et à la lumière des décisions politiques intervenues ces derniers temps dans notre pays, nous réaffirmons notre volonté de placer au cœur de nos revendications fondamentales, la demande d’amnistie pour tous les emprisonnés et recherchés, pour faits politiques antérieurs à l’initiative prise par le FLNC en juin 2014. L’enjeu capital pour l’avenir de la Corse, que constitue cette question, trouve déjà un écho très favorable dans l’ensemble de la société corse.
Cette question a d’ores et déjà été posée au sein de l’assemblée de Corse, qui s’en est officiellement saisie. Elle a été également présentée, lors de la dernière réunion à laquelle participaient, les élus de la Corse et deux ministres du gouvernement français. Elle fera également partie des échanges, lors de la réunion imminente, avec Madame la Ministre garde des sceaux.
La campagne pour l’amnistie, lancée il y a seulement quelques jours auprès des assemblées délibérantes de notre ile, trouve une large adhésion, comme le prouve les nombreuses délibérations déjà actées par divers conseils municipaux.
Aussi, nous invitons tous les responsables et acteurs politiques corses, à se saisir de l’importance de cette initiative qui doit transcender, tout esprit partisan, comme certaines postures politiciennes et ce uniquement dans le but d’œuvrer à l’avènement d’une paix durable. Nous sollicitons l’ensemble du peuple corse et sa société civile dans toutes ses composantes, celles du monde associatif, culturel, économique, etc.. Pour qu’elles prennent position en faveur de cette mesure d’amnistie, notamment en leur demandant de signer et soutenir, la pétition de portée internationale, qui sera mise à leur disposition et largement diffusée dans les jours à venir. Il nous faut contribuer tous ensemble à cette noble tache, afin de soutenir le courage, là ou vit l’inquiétude et donner l’espoir, là où le désespoir peut contraindre à l’irréparable !
AMNISTIA, est un mot d’origine Grecque, il a été inventé et utilisé par les citoyens de cette civilisation antique qui a produit de grands philosophes, dont les pensées éclairent encore un bon nombre de belles espérances, voire de réalisations humanistes.
Étymologiquement il signifie : « pardonner ».
La transcription de ce principe à la situation actuelle de la Corse doit se concevoir en intégrant les responsabilités historiques partagées par de nombreux protagonistes, au bon rang desquels, nous trouvons les différentes politiques gouvernementales françaises.
C’est d’un effort mutuellement consenti par les antagonistes qu’adviendra la validation d’une solution politique, qui doit nécessairement passer par des actes forts porteurs d’une réelle efficience politique irréversible , comme la mesure d’amnistie, .
Pour leur part et en considérant tout ce qui a été préalablement évoqué, les Corses ont déjà largement parcouru leur partie du chemin, ils attendent des responsables de la gouvernance de la France, qu’ils commencent à s’engager, sur la leur.
De par le monde, de telles initiatives, portées par des hommes de bonne volonté dont certains pourtant, ont eu a enduré les souffrances et les injustices de ceux qui s’opposaient férocement à leur combat pour la dignité humaine et la liberté, ont été couronné de succès.
Nelson Mandela, est un des symboles charismatiques de cette difficile lutte, au point d’en être devenu l’incarnation du plus haut niveau institutionnel de sa nation, enfin libérée de l’oppression.
Le combat de Nelson Mandela, a marqué à tout jamais de son empreinte la route qui mène les hommes, qui mène les peuples, à l’émancipation.
Aussi, en ce jour, nous faisons notre, deux de ses citations, qui s’inscrivent toujours et plus que jamais dans notre actualité :
« Les gens courageux ne craignent pas le pardon. Au nom de la paix. »
« Que règne la liberté. Car jamais le soleil s’est couché, sur réalisation humaine plus glorieuse »
ASSOCIU SULIDARITA
19 avril 2015