J’ai suivi la polémique sur l’œuvre d’Andres Serrano à Ajaccio. Je ne suis pas fan de cet artiste, je dirais même que je n’aime pas, surtout certaines de ses œuvres. En tant que chrétien, je n‘aime guère qu’on s’attaque aux religions quelles qu’elles soient. je n’irai donc pas le voir, mais de là à l’interdire ! On ne sait jamais jusqu’où ce genre d’interdictions peut aller. Je dirais simplement que quand on n’aime pas, on ne va pas voir ce genre d’œuvre.
Cette polémique se réfère à une Corse, terre de chrétienté. Oui, cela était peut-être vrai par le passé, mais aujourd’hui ? L’Eglise corse n’a-t-elle pas des problèmes plus importants à résoudre et ses fidèles plus de préoccupations à mettre en avant ?
Située au centre de la Méditerranée, point de convergence entre le Nord et le Sud, deux mondes différents y compris au plan religieux, dont l’île ne peut faire abstraction. La christianisation de la Corse d’ailleurs n’a-t-elle pas été l’œuvre de missionnaires venus d’Afrique ?
La Corse, comme toutes les sociétés du monde « occidental », qui n’est pas le berceau de la Chrétienté, connait une crise criarde des vocations. La population corse ayant perdu au fil des ans nombre d’anciens, les jeunes d’aujourd’hui ne prennent gère le relai dans la pratique religieuse chrétienne corse. A cela s’ajoute la désertification de l’intérieur avec le déclin du monde rural, gardien de certaines traditions et pratiques ancestrales, dont celles religieuses.
Du fait de l’absence de vocations au sein de la jeunesse corse, de nouveaux prêtres ou pasteurs débarquent dans l’île, appliquant leurs manières de faire et de dire, et oubliant pour nombre d’entre-eux la spécificité corse au plan de la pratique religieuse (à l’exemple des relations tendues des autorités religieuses avec les Confréries corses ).
Ces derniers temps d’ailleurs, nombre de polémiques, même si certaines ont été peu rendues publiques, ont perturbé la vie religieuse dans l’île. Un prêtre polonais qui refuse d’ouvrir l’Eglise pour des concerts de groupes culturels corses, un prêtre à Corte qui refuse d’ouvrir l’Eglise (1*) pour un groupe polyphonique, obligé de demander l’asile à Ponte-Leccia. Ce même prêtre qui refuse, comme l’autorise l’usage et la tradition de laisser exposer des défunts dans la chapelle de Sainte Croix à Corte !
Ce ne sont que quelques exemples dont la presse s’est faite écho, mis la liste est loin d’être exhaustive …
De tels faits traduisent malheureusement le déclin de l’influence de l’Eglise de Corse…. et des Corses au sein de leur Eglise.
L’Eglise de Corse continue à faire illusion grâce notamment à l’apport des fidèles d’origine portugaise fort nombreux dans l’île. Mais les temps de Circinellu et des prêtres corses, prêts à se sacrifier pour la Révolution corse, comme à l’époque de Pascal Paoli, ou aujourd’hui à se battre pour leurs principes religieux ou aux côtés des Corses quand ils rencontrent des difficultés, semble désormais révolue.
Les quelques prêtres corses encore en activité ne sont pas malheureusement tous de la tempe de l’Abbé Mondoloni Jean-Claude qui n’hésitait pas à s’affronter avec sa hiérarchie, lorsqu’il estimait que les décisions n’allaient pas dans le sens des intérêts de la religion en Corse et des Corses.
Non, l’Eglise de Corse n’est plus corse et son déclin semble inéluctable ? Et la Corse, est-elle encore terre de Chrétienté ?
Le dernier exemple, le plus frappant et le plus désespérant, n’est-il pas la tournure prise par les cérémonies, (mises en avant sans aucune critique par la presse), de la consécration de l’île à la Vierge Marie, sa sainte protectrice.
Sa première proclamation a pourtant été l’œuvre des Naziunale révolutionnaires corses, en révolte alors contre Gênes !
Pour nous autres Corses, le culte de la vierge fait partie de notre culture religieuse. Cette année l’Evèque de Corse a voulu procéder au renouvellement de la consécration de la Corse à la Vierge Marie (sainte protectrice des Corses). L’ensemble de l’île a donc été appelé à préparer et à participer à cet évènement dont la dernière célébration date de 1935. C’est ainsi que dans ce cadre certaines messes vont revêtir un intérêt particulier, (notamment à Lavasina ou durant la procession du Niolu).
Jusques là rien à dire.
Or à quoi avons-nous assisté ?
A la glorification d’un nouveau diacre formé en Corse, originaire du Liban… à des messes en français,en arabe ou en syriaque, selon la langue du rite maronite proche de la langue originelle de l’araméen, langue des premiers chrétiens selon ce qui est rapporté par la presse
Et personne pour s’interroger ?
A l’heure de la polémique sur la coofficialité, alors que les messes en corse (et la langue corse) interdites dans les années 70 par la hiérarchie religieuse de l’époque, avaient peu à peu acquis droit de cité grâce au Riacquistu et aux mobilisations des fidèles corses, comment expliquer l’absence de la langue corse durant ces cérémonies ?
Si j’ai loupé quelque chose, mea culpa, mais pour l’heure, je constate qu’on utilise d’autres langues, en oubliant celle des Corses qui pourtant sont sous la protection de la vierge Marie qu’on célèbre. Et pour l’heure je n’ai guère entendu de protestations concernant cette exclusion.. j’espère qu’un représentant de l’Eglise répondra et m’informera si besoin était..