Même s’ils ne s’accordent pas encore sur la méthode, les nationalistes apparaissent disposés à devenir la force dominante d’une alternative politique en 2014.
Toutes les mouvances du nationalisme semblent convaincues de leur possibilité d’accéder aux affaires et d’y parvenir en tant que forces centrales et majeures d’une majorité. Bien entendu, elles peuvent fonder leur conviction et leur confiance sur le score nationaliste à l’issue du second tour du scrutin territorial de mars 2010 (plus de 35 %). Cependant, depuis quelques mois, d’autres faits ou contextes encourageants sont apparus.
D’abord, Jean-Christophe Angelini l’a emporté sur Camille de Rocca Serra à l’occasion des élections cantonales de Porto-Vecchio en mars dernier. Pour la première fois, un nationaliste a défait un élu de premier plan dans le cadre d’un scrutin uninominal. Ensuite, la montée en puissance des nationalistes au sein de l’Assemblée de Corse est de plus en plus perceptible. Il apparaît que la majorité relative et hétérogène de gauche doit leur faire de nombreuses concessions pour ne pas être mise en difficulté. Enfin, la droite ne parvient pas à se réorganiser et à s’unir. Aussi les nationalistes semblent constituer la seule force capable d’assumer une alternance ou une alternative à la domination de la gauche sur la vie politique et institutionnelle de l’île. La confiance nationaliste est encore confortée pat le constat que la majorité actuelle ne parvient pas à changer la vie des insulaires et peine à traiter les dossiers fondamentaux. Toutefois, s’ils s’accordent sur le but à atteindre, les nationalistes n’ont pas encore une vision commune de la démarche à suivre.
Plusieurs discours sur la méthode
En août dernier, lors des Ghjurnate Internaziunali, Jean-Guy Talamoni a affirmé la volonté de Corsica Libera de participer à une prise de pouvoir par les nationalistes. En ce sens, il a proposé qu’indépendantistes et autonomistes, dans le respect de leur différence, s’entendent pour gagner ensemble. Pour justifier cette stratégie, il a dressé le constat que le nationalisme était désormais en position de force car nombre de ses propositions ou thèmes de débat étaient désormais acceptés par les élus des partis nationaux de gauche ou de droite (transfèrement dans l’île des détenus nationalistes, solutions de nature à freiner la spéculation immobilière, instauration d’un statut de résident corse, coofficialité des langues française et corse…) Jean-Guy Talamoni a ensuite énoncé une méthode. Il a préconisé que les courants du nationalisme, dans le respect du pluralisme, aillent ensemble dans le sens d’une accession aux responsabilités en 2014 et se mettent ainsi en situation d’être l’épicentre de toute évolution politique majeure. L’initiative de Corsica Libera a mis les mouvements autonomistes dans l’obligation de clarifier leurs stratégies. En effet, jusqu’à ce jour, une incertitude prévalait quant à leur vision de la prise de pouvoir. On a pu se demander s’ils n’escomptaient pas, en cours de mandature, rejoindre le camp de Paul Giacobbi pour le renforcer ou y remplacer certaines de ses composantes. Or, ces derniers jours, cette hypothèse a pris du plomb dans l’aile. Sans pour autant s’aligner sur la méthode défendue par Corsica Libera, Gilles Simeoni et Jean-Christophe Angelini ont fait savoir que les autonomistes entendaient que le nationalisme devienne la force politique dominante en 2014.
Pour une majorité alternative
Pour les deux leaders de Femu a Corsica, il n’est manifestement pas (ou plus) question que le nationalisme se contente, aujourd’hui ou demain, d’être une force supplétive. Ils l’ont d’ailleurs bien fait comprendre en décochant plusieurs flèches contre la majorité territoriale. Ainsi, ils ont vertement dénoncé une propension à faire du tourisme le fer de lance du développement économique, une tendance à renvoyer au lendemain le traitement des dossiers sensibles et la persistance d’une politique relevant du clanisme. « Nous sommes confrontés à un système qui va droit dans le mur » ont-ils même asséné. Ce jugement porté sur quinze mois de mandature montre des autonomistes se positionnant non pas en partenaire possibles mais en concurrents aspirant à l’alternance. Désormais, ils affichent clairement l’ambition de faire en sorte que le nationalisme, toutes tendances confondues, devienne une force dominante et assume cette avancée décisive. Pour y parvenir, ils proposent toutefois une méthode un peu différente de celle de Corsica Libera. Leur volonté est de susciter une dynamique associant tous les nationalistes, sans pour autant rechercher la constitution d’un « bloc nationaliste » La main est donc tendue à toutes les forces qui souhaitent une politique alternative en rupture avec celles menées en Corse jusqu’à ce jour dans les communes, les intercommunalités, les départements et à la CTC. L’ambition autonomiste est d’incarner une démarche à vocation majoritaire ouverte à tous ceux qui souhaitent s’impliquer dans une démarche novatrice. Pour commencer à la construire et se différencier, ils ont d’ailleurs déjà pointé et choisi d’assumer une étape importante : les élections législatives. En juin 2012, Femu a Corsica sera présent dans les quatre circonscriptions de l’île.
Pierre Corsi
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