« Les yeux dans les yeux », Nicolas Sarkozy a juré ne rien avoir à se reprocher, prenant « les Français à témoin ».
Et… C’est tout. On n’en saura pas plus sur les affaires quelque peu embarrassantes qui lui ont valu une mise-en-examen pour, rappelons-le tout de même, « recel de violation du secret professionnel », « corruption » et « trafic d’influence » actifs. Des délits passibles de peines pouvant aller jusqu’à 10 ans de prison. Monsieur le président n’a donc absolument rien à se reprocher. Mais des reproches, il en a.
Nicolas Sarkozy n’est qu’une victime. « Il y a une volonté de m’humilier », a-t-il déclaré, invoquant sa garde-à-vue qui a duré plus de 15 heures. Et ce matin, « les amis de Sarkozy » pleurent avec lui. Indignation totale ! A l’issue de 15 heures de garde-à-vue, encadré par quatre policiers, Nicolas Sarkozy a été déféré devant deux juges. Tout cela, à deux heures du matin ! Deux juges de gauche qui plus est. Alors forcément, comment ne pas dénoncer « une instrumentalisation politique » de la justice ? Une instruction menée uniquement à charge.
V
Monsieur le président, vous pouvez effectivement pleurer sur cette justice manipulée par un exécutif. Et laissez-nous pleurer avec vous. Laissez aussi pleurer tous ceux qui ont eu à faire avec cette justice. Mais comme vous le dites si bien, vous devez être un justiciable comme les autres. Et vous savez de quoi vous parlez. Comment a-t-on pu mettre sur écoutes vos conversations avec votre avocat ? Lors de votre interview, vous nous rappelez (l’avait-on oublié ?) que la présomption d’innocence doit être respectée. Vous vous offusquez devant un Manuel Valls qui parle de « faits graves ». « Qu’en sait-il ?, a-t-il eu les juges au téléphone ?, lui a-t-on fait un rapport ? ». Vous vous interrogez vraiment quand vous dites ça ? Ou parlez-vous, encore, de choses que vous connaissez si bien ? Tellement bien.
Nicolas Sarkozy a – du moins pour le moment – le même traitement de faveur qu’Yvan Colonna. Enfin, le même… N’exagérons rien. « La police française vient d’arrêter Yvan Colonna, l’assassin du préfet Erignac » (Nicolas Sarkozy – 4 juillet 2003, Carpentras). Une garde-à-vue de 96 heures. Une instruction menée à charge par des juges aux ordres de l’exécutif, et personnellement liés à la victime. Des écoutes téléphoniques pendant des mois. Mais celles-ci auront eu moins de résonance, tant elles n’apportaient rien à la charge. Des doutes qui ne lui ont jamais profité.
Monsieur le président, vous avez réclamé une interview seulement quelques heures après votre mise-en-examen pour vous expliquer. Vous l’avez eue. Vous avez pu, ainsi, jouer l’opinion publique contre l’institution judiciaire. D’autres auront-ils le droit de s’expliquer comme vous l’avez fait ? Nous, justiciables comme vous, nous vous le demandons, « les yeux dans les yeux ».
Laissez-moi terminer, monsieur le président, par cette citation de H.L. Mencken : « L’injustice est relativement facile à supporter ; ce qui l’est moins c’est la justice ».
Site de soutien à Yvan Colonna