La police nord-irlandaise a annoncé vendredi avoir prolongé de 48 heures la garde à vue du leader républicain Gerry Adams, entendu à propos du meurtre par l’IRA en 1972 d’une mère de dix enfants, Jean McConville.
Les enquêteurs ont indiqué avoir été « autorisés » à poursuivre leur interrogatoire du président du Sinn Fein, âgé de 65 ans, arrêté mercredi soir à propos de ce crime emblématique, dans lequel il dément toute implication.
Quelques heures plus tôt, Martin McGuinness, ancien commandant de l’Armée républicaine irlandaise (IRA), aujourd’hui vice-Premier ministre d’Ulster au sein du gouvernement bi-confessionnel de la province britannique, avait redoublé de critiques à l’égard de la police.
« J’ai dit hier que le moment choisi trahissait des motivations politiques derrière cette arrestation », a déclaré à la presse M. McGuinness, le numéro 2 du Sinn Fein. « Aujourd’hui, la décision de la police de demander une prolongation (de son interrogatoire) confirme mon point de vue ».
Gerry Adams, 65 ans, est depuis mercredi soir entendu dans un commissariat du comté d’Antrim, à propos du meurtre par l’IRA de Jean McConville, une veuve et mère de 10 enfants, il y a plus de quarante ans, enlevée chez elle par un commando dans un quartier catholique de Belfast. Il dément fermement toute implication dans cette affaire.
Sa garde à vue a fait naître des craintes de tensions pour le processus de paix scellé en 1998, dont il a été l’un des principaux artisans et qui a mis fin à trente années d’un conflit interconfessionnel dans la province britannique entre nationalistes catholiques et unionistes protestants qui a fait 3.500 morts.
Espérant voir son « collègue » Gerry Adams « complètement exonéré » à l’issue de l’interrogatoire, Martin McGuinness a mis en garde contre une éventuelle inculpation.
Il a menacé dans ce cas de « revoir » le soutien du Sinn Fein à la police, institution primordiale pour le succès du processus de paix.
Alors que les forces de police nord-irlandaises ont longtemps été dominées par les protestants, le républicain s’est livré à une attaque contre « des éléments de la police nord-irlandaise » qui, selon lui, « continuent à oeuvrer de façon négative, et contre la paix ».
Jean McConville faisait partie des 16 « disparus » dont l’IRA n’a admis le meurtre, d’une balle dans la nuque, qu’en 1999. Son cadavre enfoui sous une plage avait été retrouvé quatre ans plus tard.
Une enquête policière a démenti qu’elle était « une indic » comme l’en accusait l’IRA. Son seul tort aurait été d’avoir porté secours à un soldat britannique blessé dans un attentat de la guérilla.
Après sa mort, ses enfants ont été séparés et envoyés dans différentes structures d’accueil.
Contrairement à Michael, l’un des fils de Jean McConville, qui se dit trop terrifié par les menaces de mort proférées contre sa famille pour dénoncer les membres du commando ayant enlevé sa mère, sa soeur aînée Helen s’est déclarée prête à donner le nom des coupables à la police.
« Si une coopération totale sur l’enquête dans le meurtre de ma mère signifie nommer ceux qui ont fait irruption dans notre appartement, qui ont traîné ma mère loin de nous les armes à la main et ont été directement impliqués dans sa disparition et son meurtre, alors oui, je suis prête à donner les noms », a affirmé Helen McKendry au Guardian.
« J’ai toujours pensé que Gerry Adams était impliqué dans le meurtre de ma mère. Je le croirai jusqu’à ma mort », a-t-elle affirmé.
La garde à vue de Gerry Adams a fait remonter à la surface des souvenirs toujours douloureux dans la province. Kieran Megraw, dont le frère a disparu en 1978, a lancé un appel pour obtenir des informations afin de retrouver son corps.
« Il y a encore sept +disparus+ qui n’ont jamais été retrouvés. Ca ne vous quitte jamais », a-t-il confié à la BBC. Pour lui, la priorité de sa famille est de retrouver le corps afin de l’enterrer décemment, et non pas de traduire en justice les meurtriers, dont il a dit ignorer l’identité.
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