Jeudi dernier, aux alentours de 23h00, s’est achevé le dernier procès en date contre la Résistance basque :
Le résultat, en termes de condamnation ? Vous le savez peut-être :
– Ekaitz Sirvent Auzmendi : 18 ans comme l’avait demandé l’Avocat général.
– Ainhoa Ozaeta Mendikute : 14 ans au lieu des 16 demandés
-Peio Sanchez Mendaza : 5 ans dont 2 avec sursis conformément à la réquisition.
Avec, en plus et pour tous les trois : interdiction définitive du territoire français. Peio ne retournera pas en prison certes, mais si cette décision n’est pas annulée en Appel, il devra renoncer à la situation stable qu’il avait réussi à réaliser en Iparralde : renoncer à son emploi entre autres.
Ces sanctions sont exorbitantes au vu des dossiers présentés mais elles ne sont pas surprenantes lorsqu’on a suivi, observé, le déroulement de l’audience.
Le Président, dès le départ tout en rondeurs, s’est présenté comme un homme de dialogue, voulant disait-il faire s’exprimer les accusés. Dès le départ, les accusés ont dit qu’ils s’exprimeraient mais ne répondraient pas aux questions. Le problème pour le Président était que ses deux dossiers comportaient très peu de preuves et une quantité impressionnante de questions auxquelles seuls les accusés auraient pu éventuellement répondre. L’audience, en dehors des auditions des témoins de l’accusation (policiers, experts en tous genres, victimes…), s’est limitée essentiellement à des questions, mais des centaines de questions posées aux accusés par le Président relayé par l’ Avocate des Parties civiles (non mandatée par les deux victimes ayant témoigné, mais par une obscure Association des victimes de l’attentat du DC10 d’UTA, reconvertie pour défendre les victimes du terrorisme), relayé également par l’Avocat général qui ne faisait que compléter ou préciser le questionnement accusateur du Président. Aucune différence au niveau des interventions de ces trois individus, si ce n’est le ton.
A chaque question il y a eu une réponse, toujours la même : « je n’ai rien à dire ». Du coup, l’Avocat général a précisé ses intentions en précédent généralement ses questions d’un : « vous ne contestez pas que… », facile à décoder.
Le silence des accusés, ils l’ont exprimé très clairement dans la déclaration liminaire faite par Ekaitz, c’était la contestation de la légitimité de ce tribunal à les juger. L’Avocat général, comme le Tribunal, ont fait comme si chaque silence était un aveu de culpabilité, comme si la seule vérité possible était dans ces conditions, la culpabilité. Alors que s’il y avait question c’était parce qu’il y avait absence de preuve. La défense l’a rappelé au Tribunal : c’est à l’accusation de faire la preuve de la culpabilité. Pas l’inverse : ce n’est pas à l’accusé de faire la preuve de son innocence. Même si l’accusé conteste la légitimité du Tribunal !!!
Ce que nous n’avons pu que constater, c’est qu’il n’y avait à aucun moment un juge qui recherchait la vérité entre l’Accusation et la Défense et qui, ensuite, arbitrait, mais un juge qui était une partie de l’Accusation.
Quand l’Avocat général déclare en préalable à ses réquisitions, que les peines qu’il va demander sont celles qu’il déciderait s’il était à la place des juges, il veut se faire croire honnête et raisonnable. Qui espère-t-il tromper ? Ce qui est attendu de lui, ce qu’il fait, avec force et sans regarder sur les moyens, c’est accuser, pas arbitrer. Faire croire que ses demandes peuvent être celles d’un arbitre, c’est une escroquerie intellectuelle. Sauf à considérer que, dans des affaires de soi-disant terrorisme, Siège et Parquet…même combat !?!
Les excès en tous genres de Jean François Ricard (comportement, propos, réquisitions…) sont connus, mais il faut reconnaître qu’au cours de ce procès il s’est surpassé :
– Surpassé quand il s’en prend ulcéré à la Défense qui ose intervenir alors que les accusés ont décidé de garder le silence. Comme si vouloir garder le silence signifiait renoncer à sa défense !?!
– Surpassé encore plus quand il s’en prend aux accusés.
Plus que ses réquisitions exorbitantes, plus que sa volonté manifeste de ne pas se contenter d’obtenir des peines extrêmes, ce qui est le plus révoltant et le plus méprisable en lui, c’est sa volonté d’humilier et de blesser. Il le fait sans retenue et sans vergogne. Lui qui ne voit pas un brin d’humanité dans le regard des accusés parce qu’ils ont continué de garder le silence pendant l’audition des victimes, lui, plonge son nez dans son ordinateur lorsque Yolanda Molina brandit les photos des corps torturés d’Unai Romano et d’Iratxe Sorzabal. Pas un regard de compassion, pas un regard tout court. Un regard qui fuit. Et cet individu veut donner des leçons d’humanisme à des militants d’ETA. De qui se moque-t-on ?
C’est encore lui qui reconnaît les qualités d’intelligence et d’acharnement au travail des deux militants dans le box. Mais c’est pour mieux les démolir. Leurs qualités sont au service d’ETA, donc du Mal. Il n’utilise pas ce mot mais il en imprègne son discours. Il en utilise d’autres comme fanatiques et extrémistes. Ignorant délibérément dans son discours leurs motivations et leurs objectifs. Il faudra que la Défense lui rappelle qu’ETA n’est pas une organisation terroriste, que la lutte armée n’a été qu’un moyen pour faire reconnaître les droits légitimes refusés au Peuple Basque. Que ce que veut ETA c’est certes l’Indépendance et le socialisme, mais au travers de l’Autodétermination. ETA a dit clairement que dans ce cas elle se soumettrait au verdict populaire quel qu’il soit. Jean François Ricard le sait parfaitement comme il sait parfaitement la différence qu’il y a entre les Résistants basques et les terroristes qu’il a côtoyés dans son passé à la 14ème section. Il le sait très bien mais il veut l’ignorer parce que ce procès est politique et que lui, comme la Justice française, ne veulent à aucun prix le reconnaître. A aucun prix, ils ne veulent reconnaître le droit du Peuple basque à l’autodétermination. Et la Justice est un moyen indispensable au sein de l’Appareil d’Etat
C’est leur logique mais, et on n’arrêtera pas de le réaffirmer, cette logique n’est pas la nôtre et ne le sera jamais. Malgré tous les coups portés aux nôtres, malgré tout l’écœurement que suscite le comportement de leurs serviteurs dans ce simulacre pitoyable et plus généralement dans le monde judiciaire français.
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Une dernière chose très personnelle. . Dans les yeux de Jean François Ricard je n’ai vu que la haine ou l’indifférence de son prochain. Dans vos yeux Ekaitz, Ainhoa, Peio, moi j’ai vu au contraire durant ces si longues trois semaines tout l’humanisme du monde. Celui de celles et ceux qui se battent pour les autres, de ceux qui respectent les autres, profondément et avec amour.
Si vous étiez des terroristes je n’aurais pas été là moi non plus. Cela ne fait aucun doute. Vous êtes, le contraire, tout le contraire. C’est une certitude, une évidence. Merci à vous.
Michel Combes p. Txalaparta Irrati Librea