Le président de Catalogne Artur Mas a annoncé jeudi un référendum le 9 novembre 2014 sur l’indépendance de cette région du nord-est de l’Espagne, en dépit de la farouche opposition de Madrid qui a dénoncé une « erreur historique ».
« ‘Voulez-vous que la Catalogne soit un Etat ? Oui ou non ?’ sera la première question. Et si la réponse est « oui », ‘Voulez-vous que cet Etat soit indépendant’ sera la deuxième », a déclaré Artur Mas lors d’une conférence de presse.
Le gouvernement espagnol a immédiatement réagi, promettant que le référendum n’aurait pas lieu.
« Cela provoque une division sociale, une confrontation sociale sans précédent en Catalogne. C’est une erreur historique », a affirmé le ministre de l’Intérieur, Jorge Fernandez-Diaz.
La Catalogne, l’une des 17 régions autonomes d’Espagne, à la très forte identité culturelle et linguistique, est en proie à une forte poussée indépendantiste depuis plus d’un an, sous l’effet notamment de la crise économique qui a alimenté les rancoeurs envers l’Etat central.
Alors que ce projet de référendum couvait depuis des mois, le président nationaliste a expliqué jeudi qu’un accord avait été conclu avec les composantes de la majorité au Parlement régional, dont la gauche indépendantiste de l’ERC.
Selon Artur Mas, le choix de la date du 9 novembre « laissera le temps à l’Etat espagnol, aux institutions de l’Etat, pour négocier avec les autorités catalanes la forme que doit prendre cette consultation dans les cadres légaux existants, qui sont nombreux ».
Le président nationaliste catalan est en conflit ouvert avec le gouvernement conservateur de Mariano Rajoy depuis que ce dernier a rejeté, en septembre 2012, sa demande d’un « pacte fiscal » octroyant plus d’autonomie financière à cette région de 7,5 millions d’habitants, lourdement endettée et qui représente environ un cinquième de la richesse du pays.
Depuis, la polémique fait rage, les pour et contre l’indépendance semblant se radicaliser, sous le regard inquiet de l’Union européenne.
Artur Mas, au départ modéré, a durci le ton, poussé par la gauche indépendantiste, deuxième force du Parlement régional depuis les élections de novembre 2012, et s’est très vite engagé à organiser un référendum d’autodétermination en 2014.
Les indépendantistes ont multiplié les démonstrations de force à l’occasion des deux dernières « Diada » (Jour de la Catalogne), célébrées tous les ans le 11 septembre.
En 2012, une manifestation avait réuni des centaines de milliers de personnes à Barcelone. Cette année, une immense chaîne humaine a relié le nord au sud de la région.
Pour y répondre, des dizaines de milliers de manifestants, soutenus par le Parti populaire, de droite, au pouvoir à Madrid, se sont rassemblés le 12 octobre dans la capitale catalane, sous une bannière espagnole géante, pour défendre l’unité du pays.
Car le gouvernement central a affirmé à plusieurs reprises qu’il s’opposerait par tous les moyens légaux à un référendum sur une éventuelle indépendance, qu’il juge anticonstitutionnelle.
Le ministre de la Justice Alberto Ruiz Gallardon l’a martelé jeudi, juste après l’annonce d’Artur Mas: « Le vote n’aura pas lieu, et il n’aura pas lieu car notre Constitution n’autorise aucune communauté autonome à soumettre à un vote ou à un référendum les questions touchant à la souveraineté nationale », a-t-il déclaré à Madrid.
Cette annonce surgit au premier jour d’un colloque organisé par les autorités catalanes qui a ravivé l’ire de Madrid, à commencer par son intitulé: « Espagne contre Catalogne: un regard historique (1714-2014) ». Un rappel de la date du 11 septembre 1714, celle de la prise de Barcelone par les troupes franco-espagnoles, hautement symbolique pour les indépendantistes catalans.
La chef de file régionale du PP, Alicia Sanchez-Camacho, a accusé mercredi les nationalistes catalans d’avoir « lancé la spirale de la haine et la spirale de l’affrontement ».
Selon un récent sondage du Centre d’études d’opinion de Catalogne, 48,5% des personnes interrogées se disent en faveur de l’indépendance et 18,6% préfèrent le système de régions autonomes actuel.
Riche région du nord-est de l’Espagne, qui fut longtemps son moteur économique, la Catalogne est désormais celle qui ploie sous la dette la plus lourde (52,6 milliards d’euros fin juin, 26,6% de son PIB).
En janvier, elle a même dû demander plus de neuf milliards d’euros au fonds d’aide mis en place par Madrid.
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