#corse #CuuFFiCiaLiTà ☑ « un pas supplémentaire pour l’émancipation du peuple corse » U Cumunu

Après plusieurs mois de débats ayant occupé la société corse, ravivant d’ailleurs des discours que l’on pouvait croire définitivement tombés dans les poubelles de l’Histoire, le statut de coofficialité de la langue corse proposé par Pierre Ghionga a été adopté par l’Assemblée de Corse, avec 36 voix pour.

Signalons tout d’abord le travail considérable réalisé par le service de la langue corse de la CTC et tout particulièrement par Sébastien Quenot.

Cette mesure de sauvegarde de la langue corse, indispensable pour la faire revivre et qu’elle redevienne la langue employée naturellement par les habitants de notre île, est cependant encore loin d’être appliquée. En effet, la CTC ne disposant que de pouvoirs restreints en la matière, notamment en ce qui concerne les mesures contraignantes (obligation d’apprendre la langue pour les fonctionnaires afin de créer un service public réellement bilingue, par exemple), il faudra faire valider ce projet au plus haut niveau de l’Etat. La modification de la Constitution et du sacro-saint article 2, ajouté il y a une vingtaine d’années pour faire barrage à d’éventuelles décisions de ce type, est ainsi indispensable. Un changement du texte suprême de la République française également nécessaire pour les autres mesures qui, on l’espère, pourraient être adoptées par l’Assemblée de Corse, notamment en ce qui concerne la protection du foncier ou le transfert de compétences.

La bataille ne s’annonce pas simple.

Tout d’abord parce que les partis représentés au Parlement sont profondément jacobins. Même le Front de Gauche, dont les élus corses sont majoritairement favorables à cette mesure (Etienne Bastelica a notamment martelé la nécessité de rendre obligatoire l’enseignement du corse), est piloté à Paris par des personnages comme Jean-Luc Mélenchon ou Clémentine Autain ayant affirmé leur opposition plus ou moins ferme à une mesure de coofficialité.

Mais aussi et surtout, le gouvernement, ses alliés et son « opposition » savent qu’une telle mesure est de nature à redonner aux travailleurs corses une réelle cohérence, à enclencher de nouveau la « fabrique de Corses » que notre terre a toujours été. Les actuelles divisions existantes au sein de la classe opprimée, entre les Corses d’origine et les Corses d’adoption, sont en grande partie liées à « l’insécurité identitaire » dans laquelle une partie de notre peuple se trouve.

Comme l’a justement dit Paul-Félix Benedetti à l’Assemblée, citant Simone de Beauvoir, au même titre que l’on devient femme, on devient Corse. Or, la langue occupe une place centrale dans l’identité corse et, par conséquent, dans la prise de conscience de son appartenance à un même peuple, le peuple corse. Permettre à tous ceux vivant en Corse de partager notre langue, c’est permettre au peuple corse de continuer à vivre, à s’enrichir. Cette conscience nationale, doublée d’une indispensable conscientisation de son appartenance de classe, effaçant les divisions factices entretenues par l’impérialisme français et le capitalisme, doit permettre de réunir les travailleurs exploités au sein d’objectifs communs, pour la libération nationale et la libération sociale.

Loin d’être un « acte d’amour pour la République française » comme l’a curieusement présenté Pierre Ghionga, cette décision doit être, au contraire, le point de départ d’une nouvelle phase de l’émancipation du peuple travailleur corse.