« Contribution au débat sur la fiscalité en #Corse et l’arrêté Miot en particuliers » Michel Stefani

L’assemblée de Corse a délibéré à deux reprises en juin 2011 et en juillet 2012 pour demander un délai supplémentaire dans l’application de dispositions prévues depuis 1999 et définies par la loi de janvier 2002 s’appliquant au régime fiscal dit « dérogatoire » de la Corse au titre de l’Arrêté Miot. Tous ceux qui ne veulent pas travestir la réalité reconnaissent que cette dérogation repose sur un désordre juridique conduisant à une exonération de fait mais pas de droit.

AssembleedeCorse-MichelSTefaniLes gros patrimoines sont aujourd’hui les principaux bénéficiaires de cet avantage fiscal exorbitant, pour ne pas dire ce privilège, lorsqu’il s’agit de plusieurs millions d’euros. On peut le contester, mais force est de reconnaître que l’avantage fiscal dans ces conditions est source de concentration de biens et de spéculation et pas le contraire. Il est désormais courant chez nous de dénoncer les inégalités criantes par quelques chiffres auxquels tout le monde fait référence mais comme dit Simon Renucci : « si nous partageons le constat, nous divergeons sur les solutions » notamment la contribution des plus riches.

La justice fiscale n’a rien de « confiscatoire » ou de « colonisateur » la justice fiscale associée à la justice sociale, comme nous l’exprimons, c’est la juste répartition des richesses pour un développement harmonieux de la société favorable à l’épanouissement individuel à travers la satisfaction des besoins sociaux exprimés par les administrés. Nous proposons une refonte de la fiscalité en ce sens notamment pour taxer les revenus du capital comme ceux du travail. La différence c’est que ceux du capital reposent sur le patrimoine.

Pour ce qui nous concerne nous demandons un état des lieux, pour faire la transparence sur le patrimoine en Corse, savoir comment il se répartit, connaître la structure de la propriété privée et in fine éclairer la décision politique qui permettra de réduire les inégalités. La Corse est la région la plus inégalitaire de France métropolitaine, hors IDF, 7 points séparent les revenus des ménages les plus aisés des ménages qui le sont le moins. 1 500 ménages insulaires sont contributeurs à l’ISF, un tiers ont déclaré en 2009, en moyenne, un revenu de 1.9 M€. Ces chiffres sont à confronter à ceux de la pauvreté puisque 1 ménage sur cinq en Corse déclare des revenus inférieurs à 954 €, seuil sous lequel on est considéré comme pauvre.

Voila pourquoi nous n’appellerons pas les « pauvres » à défiler avec les riches pour la défense des privilèges de ces derniers.

Dans ses délibérations de juin 2011 et juillet 2012 l’Assemblée de Corse non, seulement n’a pas demandé le maintien de l’Arrêté Miot comme un droit inaliénable mais elle a voté un amendement de notre groupe spécifiant que les gros patrimoines insulaires non assujettis aux droits de succession le soient et que le produit de cette contribution (20 à 25 M€) soit reversé à la CTC pour soutenir sa politique anti-spéculative de construction de logements sociaux et de maitrise du foncier.

Présenté de cette façon l’amendement Giacobbi, que nous avons soutenu au Parlement, aurait pu passer au Conseil Constitutionnel dans le but de finaliser le travail du GIRTEC pour la reconstitution des titres de propriété dans une période transitoire de dix années supplémentaires. Le gouvernement peut en reprendre l’esprit dans un nouveau texte s’il veut maintenir à la fois le choix de taxer les plus hauts revenus et respecter les délibérations de l’Assemblée de Corse.

Les élus nationalistes censurent le Conseil Constitutionnel. Très bien. Nous, nous demandons sa suppression mais pour être plus cohérents ils auraient dû censurer les 3 députés UMP de Corse qui ont signé le recours motivé, non par la volonté de rétablir la justice fiscale en Corse mais de faire tomber « la mesure fiscale emblématique » de François hollande qui concerne 1500 personnes en France, peut être quelques unes en Corse, dont le revenu est supérieur à 1 M €.

La fracture sociale s’accentue, avec la crise et l’aggravation du chômage, entre ceux qui possèdent et ceux qui n’ont rien. Il faut donc construire pour ceux qui n’ont rien et qui constituent l’essentiel des 8 000 demandes de logements sociaux en Corse. Il faut se donner les moyens financiers, juridiques et techniques pour cela et dans le même temps avec cet apport combattre la spéculation immobilière et ses corollaires l’affairisme et la dérive mafieuse. Nous avons été en pointe pour la création de l’Etablissement public foncier, nous avons créé l’Agence de l’urbanisme de la Corse. Nous avons multiplié par 4 les crédits pour la construction et l’accession à la propriété des primo-accédants.

Evidemment tout le monde n’est pas pauvre et tout le monde n’est pas riche en Corse. Il y a une classe moyenne à laquelle il est beaucoup demandé pour préserver les intérêts de celle qui est au dessus. C’était l’objectif des députés UMP qui ont saisi le Conseil constitutionnel pour empêcher que les revenus supérieurs à 1 million d’euro (60 fois le SMIC) ne soient soumis à 75 % de contribution sur la part nette taxable. Les mêmes ont voté en 2007 le bouclier fiscal. Ils ne se trompent pas

C’est cette classe moyenne qui en Corse comme au plan national est dans les tranches relativement les plus imposées. Une refonte de la fiscalité sur le revenu est nécessaire pour la rendre plus progressive. Nous la proposons en même temps qu’une fiscalité des entreprises assise sur la stratégie sociale ou spéculative et le principe bonus-malus. Plus largement il y a la fiscalité indirecte qui pèse sur les biens de consommation courante comme la TVA qui touche injustement tous les ménages. Il y a des choix comme celui du Conseil général de Corse du Sud d’augmenter de 20 % la taxe foncière sans que personne ne parle de « confiscation » ou de « colonialisme ».

Mais il y a ici aussi de manière scandaleuse depuis la fin du contrôle des prix en 1986 le détournement des réfactions de TVA qui pénalise les consommateurs donc les ménages populaires pour lesquels ce dispositif est censé compenser le handicap d’insularité. Enfin on ne peut faire abstraction des bas salaires en Corse liés pour partie à la structure du marché du travail et à l’activité touristique qui a été ces 25 dernières années privilégiée au détriment des autres.

Ceux qui aujourd’hui constituent le collectif à l’appel de Me Spadoni et de Mr Coppolani portent une responsabilité politique directe à cela. Ce collectif ressemble étrangement à celui qui avait vu le jour, pour contester en 1989 la revendication d’une prime de transports portée par des milliers de travailleurs. Voila une autre raison pour laquelle nous de défilerons pas avec eux.

Mr Panunzi et sa majorité pouvaient très bien éviter la hausse de 20 % de la fiscalité départementale, les dirigeants des CCI et des Chambres agricoles peuvent très bien soutenir une politique salariale de « rattrapage historique » et accepter le blocage des prix et la restitution des réfactions de TVA aux consommateurs. Ils ne le font pas. Pourtant, aucune réforme institutionnelle voire constitutionnelle n’est nécessaire.

Quant à un statut fiscal si nous nous en tenons aux dispositifs, hors détournement des réfactions de TVA, zone franche et autres crédits d’impôts… (environ 1 milliard d’euros sur 10 ans de 1995 à 2005), accordés sans contreparties sociales en termes de salaires ou de formation, ils ont permis en Corse aussi de soutenir l’enrichissement insolent de quelques uns qui pouvaient en même temps bénéficier de la loi Scellier et construire jusqu’à l’aberration puisque aujourd’hui 1 400 logements neufs sont invendus et vides.

Ceux qui, en dramatisant la situation après la décision du Conseil constitutionnel, veulent dans l’urgence et la confusion, imposer la réforme constitutionnelle pour obtenir l’autonomie fiscale sans dire pour quelle fiscalité et dans quel but ils défendent cette revendication. Soit c’est pour rester dans l’injustice fiscale et sociale soit c’est pour en sortir et dans ce cas il faut faire la différence entre les riches et les pauvres et le niveau de contribution fiscale des uns et des autres.

Pour ce qui est du paiement des droits de succession, chaque cas est singuliers mais voici un exemple qui se rapproche le plus de la généralité : un couple laisse à ses deux enfants héritiers un patrimoine de 400 000 euros. Dans le droit commun ils ne paieront aucun droit de succession. Dans la phase transitoire donc 2013 2018 le montant non taxable sera de 800 000 €.

Dire que tous les Corses sont concernés et que la plupart devront vendre leur bien pour payer les droits est un mensonge. Reste la transmission collatérale qui, compte tenu de la spécificité réelle que nous connaissons en Corse, nécessite des mesures techniques notamment au regard de l’indivision qui en résulte. Nous sommes favorables à la création d’un barème applicable (250 000 € par exemple) sur une période définie permettant de sortir du désordre juridique. Dans tous les cas il existe la donation qu’il faut inciter comme la reconstitution des titres.

Evidemment il y a une différence entre les biens situés en bord de mer et ceux des villages de l’intérieur. Cela n’est pas sans incidence sur la localisation du désordre juridique. Cette différence repose sur la valeur du bien. Elle n’est pas la même à San Martino di Lota avec un prix du M² construit à 6 000 € et n’importe quel village de l’intérieur du Boziu de la Castagniccia ou du Niolu. D’autres facteurs interviennent, nous avons vu le cas du PLU de la commune de Solenzara proposant le déclassement de 256 ha en bord de mer. Penser qu’un tel choix serait sans effet sur l’aménagement du territoire et le prix de vente du terrain relève de la faiblesse d’esprit. Or nous savons que ceux qui font des affaires n’en ont pas.

Cela montre que ni l’arrêté Miot ni les plasticages n’ont empêché la flambée spéculative découlant du modèle économique, soutenu par toutes les forces politiques, exceptée la notre, qui a toujours défendu un développement industriel. Ce qui est primordial c’est de mettre en œuvre une politique radicalement nouvelle dans tous les secteurs. Nous nous y efforçons à travers nos responsabilités régionales mais il faudrait également que l’ensemble des politiques sectorielles changent. Pour le transport maritime nous avons vu que ce n’était pas le cas. Enfin il faut tout autant pouvoir s’appuyer sur des politiques gouvernementale et européenne elles aussi en rupture avec les précédentes aux plans économique et social.

Michel Stefani
Elu Front de Gauche à l’Assemblée de Corse

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