« En écoutant parfois la radio, j’ai fini par repérer quelques éléments de langage, simples et pas chers, que toutes sortes d’intervenants, professionnels, politiques, journalistes, utilisent systématiquement pour toute situation, sortant un tant soit peu de l’ordinaire.
Il peut s’agir d’un accident de train, d’avion, de bateau ou de véhicule routier. Il peut s’agir tout aussi bien d’une éruption volcanique, d’une pluie prolongée, d’une sécheresse anormale, d’un tremblement de terre ou encore d’une tempête de vent. Il peut s’agir aussi d’une épidémie, réelle ou supposée, d’une détresse sociale, d’un de ces nombreux stress auquel nous soumet la vie moderne et de tant d’autres situation que je renonce à citer ici.
Dans tous les cas, il y a un groupe de quelques dizaines à quelques milliers de personnes que le langage commun appellera aussitôt les « victimes », les « rescapés », voire de manière plus insidieuse les « sacrifiés », ce qui a l’avantage de désigner de manière implicite un grand coupable qui sera, suivant les circonstances, l’incurie des pouvoirs publics à prévoir l’imprévisible et à prévenir l’inéluctable ou un « prédateur industriel et financier » ou parfois, de manière plus générale les « marchés ». Face à ce groupe, la conscience nationale, incarnée par la morale journalistique, la compassion politique ou la solidarité intéressée, propose instantanément de constituer des « structures d’écoute » voire des « cellules de soutien psychologique », peut-être encore des « structures d’accueil et d’orientation ».
Il s’agit bien entendu dans le même temps de mettre en place un « plan d’aide et de prise en charge adapté » et d’en assurer « dans la durée, le suivi individuel et collectif ». Naturellement si tout çà ne se met pas en place tout de suite, c’est la faute « de l’Etat et des élus » et le peu, l’insuffisant bien sûr qui se porte spontanément sur tout malheur potentiel n’est imputable qu’au bon cœur, à la générosité de ces admirables « bénévoles » dont la vocation semble être de se porter au-devant de la souffrance d’autrui.
La tâche est immense dans un pays où toute température s’éloignant de plus de 2 degrés d’une moyenne de 20, ou un vent supérieur à 15 km/h ou encore une pluie supérieur à 10 mm en 24 h suffisent à enclencher une alerte colorée, tandis que le malheur potentiel et parfois complètement fantasmatique permet de nourrir d’angoisse les rares moments où aucun phénomène anormal ne vient troubler notre sérénité. On l’a connu avec la grippe de Madame Bachelot qui a coûté 2 milliards de vaccins à jeter dans les poubelles de notre belle République sanitaire. Villon a composé un admirable poème sur les « langues envieuses ». Il est dommage qu’il n’ait pas versifié sur la langue de bois qui sans doute n’existait pas encore ! »
Corsica Infurmazione, L’information Corse
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