A l’heure où Paul Giacobbi fait les yeux de Chimène aux nationalistes modérés, les indépendantistes remettent les pendules à l’heure. Hier, les membres de l’exécutif de Corsica Libera revenaient à leurs fondamentaux, à l’occasion d’une conférence de presse qui se tenait à Ajaccio.
La riposte menée par les acteurs qui s’inscrivent dans la « lutte nationale » s’est faite en premier lieu sur le front politique. « Il faut mettre de l’ordre chez les nationalistes, il y a des débats à avoir pour arriver à une position unifiée », a prévenu Pierre Poggioli. Le but ? « Parvenir à une position convergente », a complété Paul-Antoine Susini.
Si le président de l’exécutif Paul Giacobbi a récemment déclaré qu’il aurait voté Jean-Christophe Angelini lors des cantonales, il a également repris bon nombre de thèmes nationalistes : foncier, résidence corse, rapprochement des prisonniers… « Dans son constat, le président Giacobbi a affirmé que dans dix ans, la Corse n’appartiendrait plus aux Corses, résumait Paul-Antoine Susini, il faut effectivement que les Corses aient la maîtrise de leur destin. »
« La balle est dans le camp des modérés et de l’Etat »
Mais que l’on se rassure, Corsica Libera n’entend pas donner suite au titre de la loi sur la propriété intellectuelle… « Nos revendications telles que la création d’une compagnie régionale corse, d’un statut fiscal dérogatoire ou de la citoyenneté corse sont régulièrement reprises », poursuivait Paul-Antoine Susini. Rappelant que « la lutte nationale a arraché pendant 40 ans de nombreuses avancées (plusieurs statuts, l’université de Corse, la défense du littoral). »Mais également que ce n’est pas « Paul Giacobbi qui a levé le lièvre des prisonniers politiques », ainsi que le rappelle Jean-Marie Poli.
Faut-il comprendre que la mouvance indépendantiste est isolée, ou que ses idées font recette sans elle ? « L’assemblée n’est que l’une des composantes du mouvement national. Il ne faut pas tout conditionner à ce qui s’y passe », appuie Véronique Sciaretti, aux côtés de Josepha Giacometti.
« Les propositions pour une solution politique globale négociée impliquent les mêmes revendications : reconnaissance du peuple corse, officialisation de sa langue, avancée significative en matière d’institutions (prise en compte des pieve en véritables provinces, pouvoir législatif pour la CTC)… »
Pour les membres de l’exécutif, si « la balle est dans le camp des modérés », selon la formule de Paul Medurio, elle est aussi dans celle de l’Etat. « Qui pourrait croire que l’on puisse négocier une solution politique sans Corsica Libera ? », interroge Paul-Antoine Susini. Sa question comprend sa réponse. Mais reste à savoir si le fracas des attentats (actuellement en hausse) sera nécessaire pour faire entendre la voix indépendantiste.
Pour l’heure, le soutien est inconditionnel. La position ne change pas non plus pour les militants interpellés. « Ces arrestations confirment que la solution répressive de l’Etat français ne tient pas compte des choix démocratiques effectués par les Corses », note Paul-Antoine Susini. En attendant, les nationalistes veulent parler d’une seule voix.
Paul Ortoli
http://www.corsematin.com/article/corse/corsica-libera-entend-peser-dans-la-solution-politique