Déclaration de Résistants basques

Les 3 et 4 mai, devant la chambre correctionnelle de Paris, s’est tenu le procès des Résistants basques Marina Bernado, Zigor Garro, Ekain Mendizabal et Gurutz Maiza. Le premier jour, Zigor Garro a pu faire en français la déclaration qui suit.

Le 24 mai, Zigor Garro a été condamné à 10 ans de prison, Marina Bernado Bernado à 9 ans, Juan Gurutz Maiza à 7 ans et Ekain Mendizabal à 5 ans.

Madame la présidente, membres de ce tribunal, Madame le procureur, Maître, familles, mamans et papas, frères et sœurs, compagnes et compagnons, citoyens basques, catalans, français, allemands, suédois et autres, agents de police embusqués au fond de la salle, Messieurs les gendarmes, amis et ennemis, bonjour!

Quatre ans et demi auront été nécessaires pour préparer ce procès dont l’issue va se décider en deux jours. Quatre ans de solitude et de captivité qui n’ont pas contribué, il faut le dire, à nous enseigner l’amour des lois et le respect pour la magistrature. Ne vous attendez donc pas à nous voir participer à ce procès, ni à nous entendre applaudir la proclamation de vos jugements.

Notre attitude doit vous sembler peu fondée. Pourtant, on vous assure qu’il y a ici de quoi nourrir le scepticisme.

En premier lieu, nous nous demandons pourquoi les tribunaux français nous interdisent systématiquement de nous exprimer dans notre langue. Les moyens existent pourtant : où sont passés les interprètes de basque et de catalan, si prompts habituellement à traduire notre courrier et les documents saisis par la police ? Mais à quoi bon s’étonner. Il n’est pas anodin que la France s’acharne à nier l’existence de notre langue. Reconnaître l’euskara, tout vivant et singulier qu’il est, reviendrait en effet à reconnaître l’identité du peuple qui le parle. Et c’est une réalité sur laquelle la France, empêtrée dans son jacobinisme séculaire, a choisi fermer les-yeux.

Vous nous direz que cette question, politique, ne concerne pas un tribunal dont la seule préoccupation est de sanctionner des faits en s’appuyant sur des lois. Mais quand ces lois n’ont précisément d’autre ambition que de nous assimiler, et de réaffirmer l’État français dans chaque parcelle du territoire qu’il occupe, quelle légitimité pensez vous que nous puissions leur accorder? Le besoin de liberté qui nous anime est d’emblée considéré comme nul et non avenu et il semble que la France, soucieuse de se dérober à une réflexion authentiquement politique sur l’existence du peuple basque, ait à cœur de traiter la question de manière exclusivement policière et pénale. C’est, derrière des jeux de manches et diabolisations en tout genre, faire le choix de la force et de la raison d’État, contre celui d’une réflexion démocratique digne de ce nom.

Ce tribunal ne peut donc pas se soustraire à la réalité institutionnelle dont il dépend, à moins qu’il ne brise tout à coup ses chaînes et ne se déclare insoumis aux lois. Mais voilà qui ne risque pas d’arriver. Car si la justice avance peu à peu dans le monde, ce n’est précisément pas le fait des fonctionnaires de justice, qui se bornent le plus souvent à être les exécutants du pouvoir politique, offrant ainsi un spectacle navrant de marionnettes.

D’un autre côté, nous savons à quel point il vous semble exotique que l’on puisse trouver au sein d’une démocratie comme la vôtre des motifs de combat. Qu’il puisse rester, en France, des zones où l’engagement et la résistance ont un sens, qu’il demeure des droits à arracher à votre Droit, voilà qui vous paraît injustifiable. Et pourtant, il n’est pas de démocratie qui ne cache, dans quelque obscure institution, un vieux reste de régime autoritaire. Pas de régime, si démocratique qu’il soit, où la liberté ne soit encore par endroits à conquérir. Le contraire serait surprenant : qu’il suffise de voter tous les 5 ans pour jouir de sa liberté comme d’un capital sécurisé.

C’est une question de priorité. Pour certains la priorité est d’escalader les échelons au sein de l’administration judiciaire. D’autres décident un beau jour que le principe de leur existence, c’est l’amour de la liberté. Voilà la force productive qui guide nos actions. Voilà pourquoi nous sommes ici. Parce que nous sommes amoureux de nos peuples, de leur histoire rebelle, combative, insurgée, de ces gens chez nous qui ne rient pas de voir les flics en embarquer un autre. Nous sommes ici parce que la justice est pour nous autre chose qu’une administration encombrée et inerte. Parce que le confort n’a pas eu raison de notre volonté et que nous sommes prêts, pour vivre dignement, à sacrifier cette vie même. Comme en Palestine, comme au Kurdistan, et ailleurs encore.

Vous direz que notre combat est idéaliste. Nous qui avons passé plus de 4 ans dans les établissements que vous destinez à la protection -et la réinsertion sociales. Nous qui avons vu où mènent réellement vos décisions de justice, à quel mépris de la personne humaine, à quelle exclusion de fait, nous vous demandons: qui, de nous, a perdu le sens des réalités ? Qui est illuminé ?

Si étrange et exotique que cela puisse vous paraître, on est confrontés, en tant que peuple, à un choix simple et terrible : vivre ou mourir. Or, rien ne dit que nous ayons décidé de nous retirer dans des réserves comme les Indiens d’Amérique. La preuve : nous sommes ici. Nous luttons, nous résistons, nous sommes vivants. Ces 50 années de lutte de l’ETA ont permis à la liberté de passer de l’utopie au projet. En Janvier dernier, l’ETA a décrété un cessez-le-feu général, permanent et vérifiable par la communauté internationale. Ce pas vise à mettre en place un processus non violent qui, de manière démocratique, devrait garantir la réalisation prochaine de ce projet. La France et l’Espagne tiennent une occasion en or de démontrer que le vilain bruit des bombes est aussi absurde qu’elles le prétendent. Mais gare aux malentendus, il n’y a que la justice véritable qui puisse garantir la paix. Sur ce, nous n’en démordrons pas.

Gora Euskal Herria eta askatasuna !

Eskerrik asko.

 

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