(Revue de presse – Corsicainfurmazione.org – Publié le 16 mars 2024) Les indépendantistes de Nazione tenaient une conférence de presse suite aux diners de Beauvau, afin de clarifier la position du mouvement pour les jours et semaines à venir.
(Alta Frequenza)
(FR3Corse) L’accord signé lundi devra obligatoirement passer devant l’Assemblée nationale et le Sénat, où certains élus de droite ont déjà considéré que son contenu était trop favorable aux positions des nationalistes corses.
(FR3Corse) D’ailleurs, dès lundi soir, Gérald Darmanin a ressuscité l’expression de “ligne rouge” qu’il n’utilisait plus depuis maintenant quelques mois. Nazione n’est pas signataire de l’accord de Beauvau. Nous estimons que le fait que d’autres organisations issues du mouvement national aient signé cet accord constitue une faute politique, dans la mesure où il acte d’abord le renoncement à tous les éléments d’une solution politique réelle.
(Mediabask) Aujourd’hui, ce qui est proposé derrière le vocable d’autonomie, c’est une autonomie au rabais, une sous-autonomie, comme d’ailleurs la reconnaissance d’une « communauté historique et culturelle », c’est la reconnaissance d’un peuple au rabais ou d’un sous-peuple puisque cette déclaration n’ouvre pas de droits en matière démocratique quant à la capacité de choisir librement son destin dans le cadre du droit à l’autodétermination.
(Corse Matin) Pas de doute dans les rangs de Nazione. La rédaction constitutionnelle avalisée à Paris, dans la nuit du 11 au 12 mars, est rédhibitoire, a scandé à l’envi le parti indépendantiste, ce samedi 16 mars, depuis le palais des congrès d’Ajaccio.
(Corse Net Infos) Josepha Giacometti Piredda, ne votera pas ce texte qui sera soumis à l’hémicycle lors de sa prochaine session.
(RcfM) « Rien n’est garanti dans le texte constitutionnel », renchérit Josepha Giacometti Piredda, parlant d’une « sous-autonomie ».
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Il y a maintenant deux ans, la mobilisation populaire, massive et déterminée, du peuple corse suite à l’agression mortelle de l’un des siens, Yvan Colonna, avait contraint le ministre de l’intérieur français a annoncé l’ouverture d’un « processus à vocation historique » devant conduire à l’ « autonomie » de la Corse. Dans les semaines et mois qui ont suivi, les forces vives qui avaient obtenu l’ouverture de ces discussions en ont été volontairement exclues pour laisser le monopole de la démarche à la représentation institutionnelle. Les revendications portées par la rue autour de la reconnaissance des droits du peuple corse ont ainsi laissée la place à la logique des « lignes rouges » imposées par Gérald Darmanin et avalisées par la majorité de Gilles Simeoni et ses alliés. Lundi dernier, l’ « accord de Beauvau », validée par les représentants de Femu a Corsica, du PNC, de Core in Fronte et d’une partie de la droite, est venu clôturer ce cycle de deux années de débats et de discussions. Nazione, qui n’a pas participé aux diners de Beauvau, n’est pas signataire de cet accord et considère que son approbation par des forces issues du mouvement national constitue une faute politique. Après plusieurs décennies de lutte nationale, près d’une décennie de succès électoraux, et deux années de discussions que seule une situation de nature insurrectionnelle a rendu possible, cet « accord » imposé par Paris revient à renoncer explicitement à l’essence de notre combat, à savoir la reconnaissance des droits du peuple corse sur sa terre. Les termes de cette « écriture constitutionnelle » excluent à la fois la possibilité les éléments d’une solution politique historique et même la simple reconnaissance d’une autonomie « de plein droit et de plein exercice » qui n’est autre que la norme pour des millions des dizaines de millions d’Européens et, singulièrement, pour tous ceux qui vivent en territoires insulaires. La négation des éléments d’une solution politique à la question nationale corse. Contrairement aux explications alambiquées livrées par certains responsables autonomistes au sortir du dernier dîner de Beauvau, l’Accord Darmanin est un obstacle à la reconnaissance des droits nationaux du peuple corse et à l’ensemble de ses déclinaisons : protection de la terre, priorité à l’emploi, droits linguistiques… Cela signifie concrètement que :
▪️La reconnaissance d’une « communauté historique, linguistique, culturelle, ayant développé un lien singulier à la terre » n’a qu’une portée déclarative et ne crée aucun droit spécifique au bénéfice des Corses. Elle n’équivaut pas à la reconnaissance d’un peuple et de son droit à choisir librement son avenir, à savoir le droit à l’autodétermination.
▪️La possibilité d’un statut de résident qui réserve l’achat de la terre et de l’immobilier à ses bénéficiaires, la corsisation des emplois ou encore la protection des entreprises corses face à la concurrence déloyale de groupes étrangers sont rendus impossibles par le texte avalisé à Beauvau. Contrairement à la rédaction de l’article 74 (statut de la Polynésie) qui reconnaît la possibilité à la Polynésie d’adopter des mesures « en faveur de sa population, en matière d’accès à l’emploi, de droit d’établissement pour l’exercice d’une activité professionnelle ou de protection du patrimoine foncier », l’accord de Beauvau dispose, au contraire, que le pouvoir de l’Assemblée de Corse ne peut s’exercer « lorsque sont en cause les conditions essentielles d’exercice d’une liberté publique ou d’un droit constitutionnellement garanti ». Dans un contexte de dilution de l’identité corse sous les effets conjugués de la colonisation de peuplement et de la spéculation immobilière, cette mention est contraire aux intérêts de notre peuple.
▪️La co-officialité de la langue corse est mise en échec par l’absence au sein du texte de mention susceptible de déroger à l’article 2 de la Constitution française (« La langue de la République est le français ».
En somme, aucune des causes du conflit politique qui oppose la Nation corse à l’Etat français n’est susceptible d’être traitée au fond par ce projet de statut. L’absence d’une autonomie « de plein droit et de plein exercice
Enfin, l’Accord de Beauvau prétend doter la Corse d’un « statut d’autonomie dans la République ». La réalité juridique du texte contredit pourtant les effets d’annonce politiques. Le « pouvoir normatif » octroyé à l’Assemblée de Corse n’est que la manifestation d’une autonomie au rabais très en-deçà des standards européens des territoires réellement autonomes. Cette « autonomie » n’est ni « de plein droit » ni « de plein exercice ». En droit constitutionnel, l’autonomie se manifeste par la capacité pour une collectivité à exercer le pouvoir législatif dans des domaines de compétences garantis par la Constitution et ce, sans être soumise à un contrôle politique quelconque du Parlement étatique Or, l’Accord de Beauvau, en renvoyant au vote d’une loi organique « les conditions et réserves » dans lesquelles s’exercera le pouvoir normatif de l’Assemblée de Corse soumet son contenu ses modalités de mise en oeuvre à l’opportunité politique des parlementaires français, d’une part, et au contrôle du Contrôle constitutionnel, d’autre part. Ni solution politique, ni autonomie : l’Accord de Beauvau n’est finalement que la dernière amélioration en date du statut particulier de la Corse organisé selon les principes d’une décentralisation à la française. Ni « avancée décisive », ni nouvelle « étape franchie », l’Accord de Beauvau est un verrou et une entrave. Pour la reconnaissance du peuple corse et de son droit à décider librement de son avenir. En conséquence, si en tant qu’indépendantiste nous aurions pu accompagner une autonomie réelle fondée sur la prise en compte des droits imprescriptibles du peuple corse, nous ne saurions apporter notre approbation à un accord politique, passé dans un salon ministériel au mépris de l’Assemblée de Corse, qui nie notre existence en qualité de peuple et tourne le dos aux fondamentaux de la revendication nationale. Aussi, c’est pour ces raisons factuelles, qu’en notre nom à tous, Josepha Giacometti Piredda ne validera pas par son vote ce texte. Si nous regrettons ce constat d’échec pour la Corse, Nazione poursuivra le combat pour une solution politique véritable, seule garantie d’une paix réelle et d’une liberté retrouvée. En conformité avec les principes du droit international public exprimée par les Nations Unies, nous continuerons d’affirmer que « la sujétion des peuples (…) à une domination et à une exploitation étrangères constitue un déni des droits fondamentaux de l’homme ». Qu’aussi « tous les peuples ont le droit de libre détermination » et « en vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique ». Ce droit à la « libre détermination », nous continuerons de le faire valoir, en Corse et sur la scène internationale.
NAZIONE
16 mars 2024