Nous sommes en rupture et nous irons au bout. » Alain Mosconi sort les griffes de la détermination du STC. Car le conflit à l’agence régionale de santé (ARS) pourrait bien contaminer toute la Corse. Le STC était en ordre de marche, hier matin dans les locaux de l’immeuble Castellani. Dès 10 heures, près de 150 militants durcissaient le ton. Les couloirs inondés d’affiches et de drapeaux l’attestent depuis mardi : le syndicat a investi l’agence. Et il n’en partira pas de sitôt.
Les services administratifs des hôpitaux bloqués
À la tribune, dans une salle suffocante, Tony Pruneta revient sur les raisons de ce malaise : le non-respect du protocole d’accord signé en 2009. Au centre des revendications, le coefficient géographique, une aide de l’État pour le fonctionnement des hôpitaux. « En clair, l’hôpital paie 1 000 euros, on lui rembourse 800, pour le reste on nous dit, économisez ailleurs et les Corses en pâtissent », explique-t-il. Ce coefficient permet de combler les surcoûts liés à l’insularité. « Actuellement, ce financement coûte à l’État 9 millions d’euros, on voudrait qu’il mette 20 millions », détaille à ses côtés Pierre Laffin. « À titre de comparaison, la Martinique reçoit 50 millions d’euros annuels, la Réunion, 120 », poursuit-il. Reste aussi un sérieux problème de méthode : le calcul de ces coefficients. « Un rapport de la Cour des comptes de 2004 était cinglant : il estimait que c’était un calcul plus politique que technique, or nous voulons l’inverse afin que l’on tienne compte de nos spécificités concrètes », tonnent les représentants. Parmi eux, Alain Mosconi dénonce ce « mépris du ministère de la Santé ». Hurlant vouloir « sortir du rapport dominant dominé ». Les promesses et les blessures de la négociation de 2009 sont encore tenaces. « En acceptant le protocole sans calendrier, on a été tiède, ce n’est plus le cas », embraie Jean Brignole qui évoquait la montée en puissance du mouvement. Dans la salle, on refuse l’idée de révolution permanente, mais on s’y tient près. « Les syndicats avaient signé un accord, mais ils sont revenus sur leur parole », tempêtent les militants qui assurent qu’ils ne se laisseront pas embarquer.
Niet à la réunion de demain
Ils pratiqueront demain la politique de la chaise vide. Et boycotteront la réunion organisée par le ministère et l’agence régionale de la santé prévue demain, en préfecture. « Le préfet a joué le rôle de médiateur avec le ministère, c’est insuffisant », commentent les syndicalistes. Dans cette négociation, ils se trouvent en première ligne, puisque les autres syndicats, la CFDT, FO et la CGT ne les ont pas rejoints. Des divergences de position qui n’entament en rien leur détermination. « Aujourd’hui, on nous annonce un retour en arrière, il est hors de question de s’asseoir à la table dans ces conditions », développe Pierre Laffin. Et d’argumenter : « On nous propose un bilan que nous avons déjà dressé et Dominique Blais a annoncé la remontée de ce taux de 5 à 6 %, ce qui est de la provocation puisque nous demandons le double. » Pour le STC, l’attitude du ministère est « de nature à accélérer la radicalisation rapide du mouvement. » Symptôme de ce durcissement : l’occupation hier des locaux administratifs de l’hôpital d’Ajaccio. Le STC annonce la généralisation aux autres établissements dès aujourd’hui. Ports et aéroports après-demain ? « On repart au combat et on le fait aussi pour la mémoire de Pierre Coggia, un syndicaliste décédé accidentellement en 2008. » Dans cette bataille du STC, en passe de devenir celle de la santé dans l’île, il faudra voir si les remèdes de l’État traiteront la cause de la maladie. Ou n’en réduiront que les effets secondaires.
Paul Ortoli