Il y a 26 ans, à l’Assemblée de #corse, Paul Quastana demandait au Préfet Bonnet « Quand comptez vous partir? »

Le 31 octobre 1998, 8 mois après l’assassinat du Préfet Claude Erignac, Bernard Bonnet était critiqué sur les conditions d’application de la politique dite de rétablissement de l’Etat de droit.

Paul Quastana, à l’époque conseiller territorial Corsica Nazione l’interpellait.

« Quand comptez-vous partir? »

Paul Quastana l’a demandé au préfet, au nom du groupe Corsica Nazione, avant de se lever et de quitter l’hémicycle accompagné des cinq autres élus de son groupe.

« Je partirai quand vos amis cesseront de racketter, quand vos amis cesseront d’assassiner dans les fêtes de village, quand ils cesseront de poser des bombes qui déconstruisent l’avenir », a répliqué M. Bonnet.

Dans leur intervention préliminaire, les nationalistes avaient estimé que le « pseudo Etat de droit avait bafoué le principe de la présomption d’innocence, le secret de l’instruction et les notions de justice les plus élémentaires à travers les agissements de la 14e section antiterroriste ». « Les véritables responsables de la dégradation de la situation ne seront jamais inquiétés. Votre unique priorité est la chasse, ou plutôt le safari, contre les nationalistes », avait déclaré Paul Quastana.

 

Le texte de la question orale du 31 décembre 1998 :

 

Monsieur le Préfet.

Vous êtes ici pour appliquer la politique de l’Etat en Corse c’est donc à l’Etat que s’adresse notre propos. Beaucoup de gens vous craignent et certains ont de bonnes raisons pour cela, ce n’est pas notre cas et notre propos sera donc d’une nature différente. Votre arrivée fait suite à l’assassinat de votre prédécesseur, assassinat unanimement condamné, dans une Corse traumatisée et en pleine période électorale.

Elle a été immédiatement suivie d’un tapage sans précédent, sous le prétexte d’un pseudo rétablissement de l’état de droit. Nous avons assisté à de fracassantes opérations médiatisées à outrance : descentes au Crédit Agricole et dans d’autre institutions, opérations militaires menées par les forces de police dignes de Santiago du Chili sous Pinochet ou de la bataille d’Alger à l’époque du général Massu, des dizaines de noms jetés en pâture. Le tout sous l’œil complaisant des caméras de télévisions et des journalistes français.

D’entrée de jeu le pseudo état de droit a été bafoué par ces pratiques.
Bafoué, le principe de la présomption d’innocence.
Bafoué, le secret de l’instruction.
Bafouées, les notions de justice et des droits de l’homme les plus élémentaires à travers les agissements de la 14′ section. agissements qui font l’objet d’une enquête de la part de la Ligue Internationale des Droits de l’Homme.

De façon délibérée c’est un peuple dans son ensemble qui a été montré du doigt à travers des déclarations qui relèvent du racisme ordinaire. Des déclarations fracassantes faisant état d’une situation “ ahurissante « , ce sont les propres termes de Monsieur Glavany qui se sont succédés en désignant clairement une grande partie de la classe politique et des services de l’Etat.

La plus vaste opération  » Mani Pulite » allait être lancée, on allait voir ce qu’on allait voir, et l’Etat à l’instar de l’archange Gabriel ou plutôt d’Hercule allait nettoyer de fond en comble les écuries d’Augias. en commençant. justice élémentaire oblige, par ses propres complices. Et, naïvement, une grande partie de la population insulaire y a cru. Ils ont été 40 000 a descendre dans la rue, il serait curieux de savoir combien ils seraient aujourd’hui car ce n’était certainement pas pour ça. En fait la cible était désignée d’avance : plus de 2000 interpellations visant essentiellement les milieux nationalistes ont eu lieu. Une telle politique, d’agression délibérée envers une communauté implique impérativement une obligation de résultat clairement lisible par l’opinion publique. Concrètement la montagne a accouché d’une souris, et les résultats sont les suivants : Vous avez utilisé massivement l’article 40, où sont les résultats ?

  • Au plan des affaires, pratiquement rien à part quelques opérations marginales, n’a été mis en évidence.
  • Au plan de la responsabilité de l’Etat et des suites judiciaires éventuelles, absolument rien n’a été fait. Le bilan de votre action dans ce domaine est donc totalement nul et l’opinion publique en à parfaitement conscience. La baudruche s’est dégonflée et l’Etat s’est ridiculisé.

Le Peuple Corse à toujours eu dans son inconscient collectif, forgé par des siècles de dominations étrangères, une parfaite connaissance de la justice au sens universel du terme et vous en êtes aux antipodes.

Dans son action contre la Corse, la république d’une des premières puissance mondiale s’est comportée d’une façon indigne, comme un particulier en situation de vendetta.

L’Etat a ainsi nié de façon flagrante et aux yeux de tous, ses principes fondamentaux inscrits aux frontispices de ses établissements publics : liberté, égalité, fraternité. Il y a beaucoup de poids, et beaucoup de mesures. Dans un autre domaine, vous faites état d’un souci constant de préserver et de développer le tissu économique.

Les résultats de votre action sont clairs : une inquisition fiscale frappant essentiellement les plus démunis, des milliers de procédures de recouvrement lancées sans discernement au mépris de toute notion la plus élémentaire de justice économique et sociale, des procédures bancaires au niveau des prêts et des découverts, des actions en contentieux, des avis à tiers détenteurs émis tout azimut, qui paralysent totalement toute activité des entreprises et des ménages.

Des actions policières répétées, qui frisent le ridicule par la disproportion des moyens mis en œuvre au regard des résultats obtenus : les vrais responsables, que ce soit au niveau de l’Etat ou autre ne sont toujours pas mis en cause. Par contre des dizaines de militants nationalistes avec des dossiers absolument vide sont emprisonnés à l’occasion “ d’affaires incidentes.

Vous avez beau fustiger les  » manipulateurs de l’état de droit qui se transforment en agitateurs publics irresponsables « , c’est vous qui avez ouvert la porte de cette situation.

Sous peu c’est toute une économie déjà bien mise à mal qui s’effondrera par la seule faute de votre action. Au plan institutionnel on assiste à un revirement sournois sur les principes de la décentralisation et à une régression considérable.

Une chose est sûre et d’une évidence aveuglante. et tous vos discours n’arriveront jamais à masquer une réalité que le Peuple de ce Pays à définitivement compris :

les véritables responsables de la dégradation de la situation tant au niveau local qu’au niveau des services de l’Etat ne seront jamais inquiétés. Votre unique et absolue priorité. est la chasse, ou plutôt le safari, contre les nationalistes, seuls susceptibles de remettre en cause le centralisme exacerbé d’une république qui n’a jamais su ou voulu tirer les leçons des échecs successifs et répétés de sa politique coloniale et qui s’acharne, avec des moyens colossaux sur une petite nation de deux cent cinquante mille habitants.

Nous n’en voulons pour seul exemple, parmi tant d’autres, que l’acharnement invraisemblable à l’égard de la société Bastia Securità dont le fonctionnement commercial est exemplaire et reconnu par toute la place bancaire, l’administration, et la Banque de France. Ceci a d’ailleurs fait l’objet d’une motion qui a été votée à l’unanimité par notre assemblée.

Au cours des siècles et de son histoire tourmentée, la Terre de nos ancêtres, en a vu d’autres, de multiples invasions, plusieurs républiques, des centaines de ministres et des dizaines de préfets. la Corse est toujours là et le problème avec.

Nous n’avons qu’une seule question à vous poser, Monsieur le Préfet, et elle ne s’adresse pas à l’homme que vous êtes. Cette question est posée au représentant de l’Etat et aux prérogatives exorbitantes dont celui-ci dispose au regard des nécessités de la modernité, du développement économique social et culturel, de la justice, et de la liberté d’un peuple a maîtriser son destin dans le cadre de relations apaisées et librement consenties :

Quand comptez-vous partir ?

Vous ne pouvez bien évidemment pas répondre à cette question, c’est l’histoire qui le fera, permettez nous donc de nous retirer.

Paul Quastana
Corsica Nazione

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