(Unità Naziunale – Lutte internationale – Publié le 17 mars 2021) le 16 mars 2021 – Le groupe Tavini Huira’atira – Assemblée de la Polynésie française a déposé mardi une proposition de résolution tentant de solliciter transparence et vérité de la part de l’Etat dans la reconnaissance des conséquences sanitaires et environnementales des essais nucléaires français. La voici :
EXPOSÉ DES MOTIFS relatif à une proposition de résolution tendant à solliciter transparence et vérité de la part de l’Etat dans la reconnaissance des conséquences sanitaires et environnementales des essais nucléaires français en Polynésie française, et à créer une commission d’enquête :
Entre le 2 juillet 1966 et le 27 janvier 1996, la France a procédé à 193 tirs nucléaires au titre de ses expérimentations dans le cadre des activités du C.E.P. 46 de ces tirs ont été effectués dans l‘atmosphère.
Jusqu‘à la loi du 5 janvier 2020 dite « Morin », les conséquences sanitaires et environnementales des essais nucléaires français en Polynésie française ont été niées par les autorités nationales, et territoriales.
La loi «Morin > a ouvert le chapitre controversé de la reconnaissance et à l‘indemnisation des victimes des essais nucléaires français en Algérie ainsi qu‘en Polynésie française. Néanmoins, les volets environnementaux et trans–générationnels ont été écartés de ladite reconnaissance.
Cette avancée législative n‘était toutefois pas surprenante, car fruit d‘une poussée parlementaire sans précédent qui avait démarré en 2002–2003 sous l‘impulsion de l‘A.V.E.N, de l‘Observatoire de l‘Armement et de la toute première association « Moruroa E Tatou » en Polynésie, période à partir de laquelle plusieurs propositions de loi (socialistes, écologistes) vont être déposées au bureau de l’Assemblée Nationale.
Ce n‘est toutefois qu‘à partir d‘une loi de programmation militaire 2014–2019 du 18 décembre 2013, amendée pour intégrer un article 53 portant modification de la Loi dite « Morin », que pour la toute première fois de l‘histoire des essais nucléaires français, a été reconnu le fait que tout le territoire de la Polynésie française a été contaminé lors des essais atmosphériques : le périmètre d‘indemnisation a donc été élargi à l‘ensemble du territoire Polynésien.
Fort du processus de décolonisation réamorcé auprès de l‘Organisations des Nations Unies grâce à une résolution du 17 mai 2013 de son Assemblée Générale, laquelle a procédé à la réinscription de la Polynésie française sur la liste des territoires non–autonomes gérée par le Comité Spécial de Décolonisation (« Comité des Vingt–Quatre »), le volet des conséquences des essais nucléaires français a repris vie au plani international.
En effet, dès 2014, le Comité Spécial de Décolonisation de l‘O.N.U fait inscrire un paragraphe au sein de la résolution Onusienne sur la « question Polynésienne », qui mandate le Secrétaire Général de l‘O.N.U à l‘effet d‘établir un rapport annuel sur les conséquences sanitaires, environnementales, économiques et sociales des trente années d‘essais nucléaires français en Polynésie française.
Au plan local, une première résolution de l‘Assemblée de la Polynésie française adoptée en décembre 2014 avait sollicité qu‘un chiffrage du préjudice subi par le Pays quant à l’occupation par l‘Etat des deux atolls de Moruroa et Fangataufa, depuis la fin des expérimentations nucléaires françaises, soit réalisé. Le vote de cette résolution cristallisera alors les divergences de vue de l‘époque au sein de la majorité politique de l‘époque, voire au sein de la classe politique locale.
Cette résolution de notre A.P.F n‘a jamais été suivie d’effet durant le mandat électif qui a suivi (2013–2018).
Devant l‘Organisation des Nations Unies, le paragraphe relatif au « reporting >> nucléaire confié au Secrétaire Général de ladite organisation fait l‘objet d‘une vive quoique silencieuse opposition de la part des autorités françaises qui parviendront, momentanément (en 2018), à le supprimer littéralement, avant que le Comité Spécial de Décolonisation ne décide de le réintégrer dans la résolution « Polynésienne » lors de sa session de juin 2019. Depuis, ce paragraphe est maintenu.
Le 29 septembre 2018, une communication officielle est déposée sur le Bureau du Procureur de la Cour Pénale Internationale de LA HAYE (Pays–Bas) par le parti Tavini Huiraatira No Te Ao Ma‘ohi FLP, afin de saisir ladite autorité de faits constitutifs de « crimes contre l‘humanité » au sens de l‘article 7 du Statut de Rome, en rapport avec l‘exposition grave et répétée de tout ou partie de la population Polynésienne aux rayonnements jonisants provoqués par les 46 essais nucléaires français dans l‘atmosphère réalisés entre juillet 1966 et juillet 1974 à partir des atolls Polynésiens de Moruroa et Fangataufa.
Dans un rapport d‘enquête intitulé « Toxique » réalisé (et publié) par le site indépendant d‘investigation « Disclosure », paru dans les médias le 9 mars 2021, un certain de nombre d‘éléments révélés confirment le fait que les autorités d‘Etat – en fonctions durant les essais nucléaires français – avaient très largement « minimisés >> les conséquences de leurs expérimentations sur la santé et l‘environnement des populations Polynésiennes depuis 1966, de façon à ne pas entraver le bon déroulement du programme de défense piloté par le Commissariat à l‘Energie Atomique à travers les activités du C.E.P
Face à de tels faits et éléments graves, les réactions de l’opinion publique et de la classe politique Polynésienne sont quasi–unanimes autour d‘une volonté de connaître la vérité, d‘en « avoir le caur net ».
Tel est l‘objet de la proposition de résolution ci–jointe que nous avons l‘honneur de soumettre à votre approbation.
Anthony GEROS
La proposition de résolution :
Tendant à solliciter transparence et vérité de la part de l‘Etat dans la reconnaissance des conséquences sanitaires et environnementales des essais nucléaires français en Polynésie française, et à créer une commission d‘enquête.
L‘ASSEMBLÉE DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE
Vu la loi organique n° 2004–192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d‘autonomie de la Polynésie française, ensemble la loi n° 2004–193 du 27 février 2004 modifiée complétant le statut d‘autonomie de la Polynésie française ;
Vu la délibération no 2005–59 APF du 13 mai 2005 modifiée portant règlement intérieur de l‘assemblée de la Polynésie française ;
Vu la proposition commune de résolution déposée par M. Richard TUHEIAVA et M. Antony GEROS, représentants à l‘assemblée de la Polynésie française et enregistrée au secrétariat général sous le no ............ du ......................;
Vu la lettre n° 2020/APF/SG du à l‘assemblée de la Polynésie française ;
ADOPTE LA RÉSOLUTION DONT LA TENEUR SUIT :
Dans un rapport d‘enquête intitulé « Toxique >> réalisé (et publié) par le site indépendant d‘investigation << Disclosure », paru dans les médias le 9 mars 2021, un certain de nombre d‘éléments révélés confirment le fait que les autorités d‘Etat – en fonctions durant les essais nucléaires français – avaient très largement « minimisés >> les conséquences de leurs expérimentations sur la santé et l‘environnement des populations Polynésiennes depuis 1966.
Face à de tels faits et éléments graves, les réactions de l‘opinion publique et de la classe politique Polynésienne sont quasi–unanimes autour d‘une volonté de connaître la vérité, d‘en « avoir le cour net ».
L‘Assemblée de la Polynésie française sollicite donc de la part des autorités de l‘Etat que toute la lumière soit faite, de manière dépassionnée et objective, sur les conditions dans lesquelles les populations Polynésiennes ont été exposées contre leur gré et insuffisamment protégées face aux rayonnements ionisants des 46 essais nucléaires aériens réalisés entre le 2 juillet 1966 et fin juillet 1974 depuis les deux atolls de Moruroa et Fangataufa.
Il est par conséquent décidé de créer une commission d‘enquête, composée de deux représentants de chaque groupe parlementaire constitué au sein de l‘Assemblée de la Polynésie française, qui aura pour mission d‘établir un rapport sur les conséquences sanitaires, et notamment génétiques, des essais nucléaires français en Polynésie française, au vu des nouveaux éléments historiques, factuels, scientifiques, sanitaires et environnementaux dont ils en auront dûment connaissance ou communication.
La présente résolution sera publiée au Journal officiel de la Polynésie française et transmise, accompagnée de son rapport de présentation, au haut–commissaire de la République en Polynésie française, au Président de la Polynésie française, aux présidents de l‘Assemblée nationale et du Sénat et aux parlementaires de la Polynésie française.
La secrétaire,
Le président,
Béatrice LUCAS
Gaston TONG SANG