(Unità Naziunale – lutte internationale – Publié le 3 décembre 2020 à 13h28 – source) Cette année, la journée internationale de soutien à l’Euskara est marquée, comme tous les évènements, par la pandémie. La crise sanitaire causée par la Covid-19 a secoué le monde et bouleversé nos vies. Les conséquences de cette crise sanitaire ne se font pas ressentir seulement dans le domaine de la santé, puisque elle impacte directement la situation économique de bon nombre de citoyen.nes mais affecte également les langues et cultures minoritaires. De façon générale, cette crise a touché de manière plus dure les plus vulnérables. Cela est aussi le cas concernant l’Euskara.
A l’aube de cette nouvelle décennie, un certain chaos règne dans le monde, et cette crise générale aux conséquences multiples annonce des lendemains incertains. Si des nations réprimées comme la nôtre parviennent à naviguer sur les mers agitées de ce contexte d’effondrement historique, ce sera parce qu’elles seront restées très fortement attachées à ce qu’elles sont, à leur identité. C’est exactement ainsi que nous bascophones sommes encore là aujourd’hui et que l’euskara a survécu et existe encore en ce XXIème siècle. Alors que nous avons enduré de longues décennies de mépris et d’oppression, notre langue continue de vivre, car nous autres euskaldun n’avons cessé de maintenir des dynamiques pour sa sauvegarde, sa défense et sa promotion.
Parce que finalement la volonté d’exister, d’être quelqu’un est le sens même de la vie. Face à ce choc contradictoire entre la vie et le capital c’est la survie de l’humanité qui est en jeu et la langue basque porte en elle la graine d’un avenir plein de vie. Le basque est une langue d’avenir, c’est un choix en faveur de la vie.
De la même façon que nous nous sommes soutenus les un.es les autres, nous souhaitons avant tout exprimer notre respect et notre gratitude à tou.tes les Euskaldun qui font délibérément le choix en faveur de notre langue. Ce sont elles et eux qui permettent à l’Euskara de vivre et c’est la somme de ces efforts militants qui font vivre notre langue.
Ces dernières semaines, Gaztealdia puis Euskaraldia ont permis de faire un focus sur la langue basque. Ces exercices sont primordiaux pour renforcer la demande sociale, engager un changement de nos habitudes linguistiques et de nos prises de consciences en tant que locuteurs et locutrices. Et une fois de plus, on a pu voir qu’il y a un grand soutien social et une forte volonté populaire dans l’ensemble du Pays Basque pour faire vivre l’Euskara.
Avec Euskaraldia, les acteurs de langue basque et les organisations ont demandé aux citoyen.nes de faire un pas qu’ils n’ont pas hésité à franchir. Mais cet exercice populaire est à deux dimensions dans la mesure où, en retour, les citoyen.nes demandent aux institutions de s’engager également en faveur de l’Euskara. Les membres d’EH Bildu et d’EH Bai expriment leur engagement à répondre à cet appel, à faire le nécessaire dans ce sens. Nous pensons qu’un appel spécial doit être lancé pour que les institutions publiques ne se dérobent pas à cette responsabilité.
Comme nous l’avons dit précédemment, la pandémie touche les plus vulnérables, mais les situations d’injustice ne sont pas aussi naturelles que le virus. Les décisions qui sont et ne sont pas prises en sont les fondements, ce sont des choix et des non choix politiques et très souvent de bonnes volontés qui ne vont pas jusqu’au bout de leur réalisation. Si nous regardons l’impact de la gestion de la pandémie sur le processus d’acquisition et de normalisation de la langue basque – en matière d’éducation, de culture basque, de discours institutionnels, paysage linguistique, priorités politiques et sociales, etc. – nous verrons de manière flagrante que l’Euskara est reléguée au second plan au Pays Basque allant presque jusqu’à disparaître de la scène pendant la pandémie. De ce fait, cette année Euskaraldia s’est plus que jamais avéré essentiel, et a permis de révéler que quelque chose ne va pas lorsque certaines institutions qui nous invitent à prendre part à Euskaraldia ne sont pas exemplaires en matière d’utilisation de l’euskara. Et cette lacune ne peut être comblée par Euskaraldia seulement.
Au-delà de ça, nous avons également vu comment certaines avancées ne peuvent être prises pour définitivement acquises. C’est le cas par exemple dans l’éducation, où des milliers d’élèves qui ne bénéficient pas d’un environnement bascophone dans leur vie personnelle, n’ont que l’école pour côtoyer l’Euskara et ont dû subir des retours en arrière. En matière d’éducation, en plus de la transmission de la langue, de son utilisation, d’un statut d’officialité et tous les autres objectifs similaires, la priorité à court terme est de permettre à tous les enfants du Pays Basque d’apprendre en Euskara.
La pandémie a révélé les crises existantes et les problèmes structurels tant de façon générale que pour ce qui est de l’Euskara. Certains voyants sont allumés en rouge vif. A l’heure de repenser la société, il convient également de requestionner la manière avec laquelle nous revitaliserons et dynamiserons l’Euskara en repensant les stratégies et les feuilles de route qu’il nous faudra adopter. L’enjeu est de repenser cette nouvelle société en Euskara. Pour ce faire, il nous faudra réunir les organisations qui portent Euskaraldia, tous les acteurs de la langue basque, et les citoyen.nes afin de travailler ensemble dans la conception et la mise en œuvre de nouvelles politiques linguistiques.
En tant que membres d’EH Bai et d’EH Bildu, nous réaffirmons notre engagement à poursuivre nos efforts sur cette voie.
Afin de faire face à l’incertitude induite par cette situation de crise générale, les sources de cohésion que sont l’identité populaire et le développement linguistique sont plus nécessaire que jamais.
Euskal Herri, le 3 décembre 2020,
EHBai et EHBildu